Extraits

Les flammes se couchent. S'inclinent. Le bouleversent. Elles ont l'air de souffrir. De lutter pour rester allumées. Il s'agenouille sur le prétoire de bois. Se met à prier avec ferveur. Les anges ont besoin d'aide. De son soutien. Du soutien de Dieu. Et il reste là. Devant l'homme sur la croix. Une bonne partie de la nuit. Il veille. Il prie. Pour qu'elles ne s'éteignent pas. Pour qu'elles tiennent. Jusqu'à demain. Parce que demain. Sûrement. Il s viendront. Ils a les autres. Les nouvelles. Elles sont prêtes. N'attendent qu'eux. Eux et leur amour. Si grand. Si profond. Le Père François sourit. Prie encore. De tout son cœur. Pour Yann. Pour Kévin. Pour les Anges de l'Eternité.

« S’il lui était arrivé quelque chose. Il le saurait. Son cœur. Aurait cessé de battre. »

«  Kévin, Kévin, en quelques mois, tu es devenu toute ma raison de vivre.  »

Il se coule doucement. Hors du lit. Attrape le paquet. Il s’arrête un instant. Admire le corps de cet homme. Qui le met déjà dans un tel état. Rien que de l’imaginer crier sous ses mains. Le ferait défaillir. Le fait bander. Yann. Yann. Yann. Il sourit. Il dort en chien de fusil. La tête dans les bras. Comme s’il voulait se protéger. Il n’en revient pas encore. Qu’il le lui ait demandé. Yann. Yann. Il sort sur la terrasse. Les nuits sont plus fraîches. L’été est fini. Il allume une clope. A juste le temps. De tirer deux bouffées. D’observer les toits de Paris. Brillants sous la lune. Qu’il est déjà là. Il le sent se lover. Contre son dos. Comme un chat.

« Je croyais que tu dormais. » Il se sent fondre. Dans sa chaleur.

« Oui, mais c’est vide dès que tu n’es pas là. » C’était toujours vide. Avant.

Une maison. Des fleurs. Des arbres. Un chemin. Et eux quatre. Andréa les a dessinés. enlacés. Sa mère et son père. Elle pointe le papier. De son petit doigt tendu. « Toi et maman, fous fous faites des bisous, parce que fous fous aimez très fort. »

Son cœur se serre. L'allusion de sa fille n'est pas là par hasard. Du haut de ses 5 ans. Il sait qu' elle comprend bien des choses. Avec son âme de fillette.

« Là, ché moi, et ichi, bébé Charlotte. »

Il adore. Son cheveu sur la langue. La façon dont elle zozotte. Si naturellement. Il adore. Comment elle a toujours appelé sa sœur. Bébé Charlotte.

Dehors. La nuit est tombée. Tout est resté. Tel qu'il l'ont laissé. La nappe à carreaux verts et blancs. La bouteille de vin blanc à moitié vide. La voiture à l'arrière du corps de ferme. Ils dorment. Nus. Heureux. Lovés dans la paille qui les recouvre. Tel un manteau d'or. Emplis d'amour. Dans leur grange. La grange au bout du monde.

« Tu veux bien prendre le bain avec moi? »

Kévin soutient le vert. Il en a tant envie. Seulement. Il baisse les yeux. Le cœur battant.

Il insiste. « Dis-moi, si tu veux pas, ce n'est pas grave. »

Il hoche la tête. Un peu gêné. « Oh si, mais je suis un peu pudique, je vais avoir du mal à me mettre nu devant toi. »

Yann sourit. Réfléchit un court instant. Et propose. D'une voix émue. «  Tu vas à la salle de bain, tu remplis la baignoire. » Il rit. «  Pas trop hein, parce qu'on va faire tout déborder, tu te mets dans l'eau et t'es prêt, tu m'appelles, c'est moi qui te rejoindrais, ça te va? »

Kévin hésite encore. Et Yann rajoute « On fait ce qu'on a envie, Kévin, rien d'autre, c'est juste un bain, on est obligé de rien, ça ne veut pas dire que... »

Kévin l'embrasse. Ne le laisse pas finir. L'idée l'excite au plus haut point. Bien sûr qu'il en a envie. De quoi précisément. Il ne sait pas encore. Mais tant qu'il sera avec lui. « D'accord, j'y vais alors. »

Lentement. Il se décolle. Laisse la main glisser. Sur son corps presque nu. Le cou. Le torse. La hanche. La cuisse. Yann frémit sous la caresse. Lâche un faible cri. Accompagné d'un frémissement de tout le corps. Murmure un « Kévin ». Qui se meurt. Dans sa gorge nouée. Il appréhende. Mais il en a tellement envie. Oh oui. Tellement.

Yann le regarde. Le laisse prendre son visage. Poser ses lèvres doucement. Sur les siennes.

Ils se dévorent à nouveau. Se pressent l’un contre l’autre. Entremêlent leurs langues.

Kévin promène ses mains. Sur son corps. Et mu par un brûlant désir. Enfouit ses mains. Sous le tee-shirt. Pour remonter ses paumes. Dans son dos. Il perçoit. Sous ses doigts. Le corps meurtri. Les boursouflures des marques. Les cicatrices. Il le sent trembler. De plus en plus fort. Le serre contre lui.

Yann décolle sa bouche. Baisse la tête. Frémit. C’est bon. C’est fort. Sa tête tourne violemment. Sa poitrine se comprime. Ça le dépasse totalement. Il a peur. Si peur.

Instantanément. Kévin le ressent. Et ôte tout de suite ses bras. Qu’il repose sur le tissu. Il se détache un peu. Et cherche ses yeux. Cherche à lire. Le vert. Qu’il commence à deviner. Si bien.

« Kévin, je… » Il baisse la tête.

« Chut, c’est rien, tout va bien. » Il prend sa main. Dans la sienne. La porte à sa bouche.

« Je suis bien, tu sais, mais… » Il fuit son regard. C’est trop dur. Trop difficile.

« Tu te rappelles, tu m’as dit, je ferais rien que tu ne veuilles pas, c’est pareil pour moi. » Il le voit hésiter. Le sent effrayé.

« Ce n’est pas… » Il se rapproche. Se niche dans son cou. Tremblant.

« Dis-moi. » Il peut sentir. Sa peur. Il l’enlace. Doucement.

« C’est que je suis pas habitué. » Il n’a jamais. Connu rien de tel. Tout à coup. Il se sent vierge de tout.

« J’avais pourtant l’impression que tu étais plus à l’aise que moi, que t’avais… »

« J’ai jamais rencontré quelqu’un comme toi, Kévin, j’ai jamais… » Fait vraiment l’amour.

« Tu es bien ? »

« Oh oui, si tu savais combien. » Il ferme les yeux. Se calme. Toujours niché.

« Alors, écoute, je ne peux te répéter ce que tu m’as dit au début, je ne ferai jamais rien qui doive te gêner, on a tout le temps. » Il embrasse ses cheveux. Caresse sa joue.

« J’adore te toucher, t’embrasser, c’est… » Si bon. Si intense. Ses lèvres s’entrouvrent. Son cœur explose.

« Regarde-moi, s’il te plaît. » Il attend. Attend qu’il lève la tête. « Tu n’as pas peur de moi?»

« Non, bien sûr que non. » Et comme pour lui prouver. Il lève ses yeux. Lui donne son vert. Éclatant. Mais troublé. Il sourit timidement. Comme honteux.

« Alors, tout va bien. » Il sourit.

« Oui. » Le bleu plonge en son cœur. Qu’il sent comme nu. Il soutient son regard. Si bleu. Si intense. Ses mains se crispent aux siennes. Il frissonne.

Kévin l’enserre. L’embrasse dans le cou. Laisse remonter ses lèvres. Sur sa peau. Comme il aime déjà le faire. Il sent son corps. S’abandonner. Se détendre. Au creux de ses bras. Il remonte jusqu’à sa bouche. Dans laquelle il s’enfonce. Profondément. L’entraînant avec lui. Dans un tourbillon puissant. D’émotion et d’amour. Kévin réalise. Juste à cet instant. À quel point il l’aime. Ferme les yeux. Se perd dans l’étreinte.

Yann se laisse emporter. Dans ce baiser troublant. Qui l’emporte. Dans un doux voyage. Et lorsqu’il rouvre les yeux. Il est allongé sous Kévin. Qui lui sourit. Confiant. Yann sourit aussi. Il ne tremble plus. Dévore des yeux cet homme. Qui est devenu tout. Et comprend. À ce moment précis. Que quoi qu’il arrive. Jamais. Jamais plus. Il ne pourra se passer de lui.