Ajouter un extrait
Liste des extraits
ACCOMPAGNEMENT
Je marche à côté d’une joie
D’une joie qui n’est pas à moi
D’une joie à moi que je ne puis pas prendre
Je marche à côté de moi en joie
J’entends mon pas en joie qui marche à côté de moi
Mais je ne puis changer de place sur le trottoir
Je ne puis pas mettre mes pieds dans ces pas-là
et dire voilà c’est moi
Je me contente pour le moment de cette compagnie
Mais je machine en secret des échanges
Par toutes sortes d’opérations, des alchimies,
Par des transfusions de sang
Des déménagements d’atomes
par des jeux d’équilibre
Afin qu’un jour, transposé,
Je sois porté par la danse de ces pas de joie
Avec le bruit décroissant de mon pas à côté de moi
Avec la perte de mon pas perdu
s’étiolant à ma gauche
Sous les pieds d’un étranger
qui prend une rue transversale
Afficher en entierIl ne s’agit pas exactement de choisir entre un lieu ou un autre : tous se valent. Il s’agit plutôt de trouver un appui, c’est-à-dire un centre, quelque chose de solide dans un univers trouble et instable, un lieu habitable en soi comme hors de soi, d’où rayonner ensuite, à l’instar du soleil, centre et chaleur de son système.
Afficher en entierJe n’ai pas ma place dans ce monde. Ni dans l’autre. Je ne change rien à rien. Mais le monde est là, et il est beau ; cela me fait mal. Parce que ça ne dure pas, parce que ça ne peut pas se dire. C’est le temps qui est le problème de l’espace : tout passe, on n’en sort pas. Rester où je suis ne mène à rien ; bouger me tue. L’impasse est totale. Tous mes pas se perdent, sont d’emblée des pas perdus. Le monde est un désert. Pareillement, je suis vide. Je suis une cage, une maison sans feu, une salle d’attente, un bout de trottoir qui ne va nulle part.
Afficher en entierJe ne suis pas bien du tout assis sur cette chaise
Et mon pire malaise est un fauteuil où l'on reste
Immanquablement je m'endors et j'y meurs.
Afficher en entierLes yeux le coeur et les mains ouvertes
Mains sous mes yeux ces doigts écartés
Qui n'ont jamais rien retenu
Et qui frémissent
Dans l'épouvante d'être vides
Afficher en entierJ'avais son bras d'eau fraîche autour de mon cou
Et la brûlure de son ventre sous mon épaule
Et ma tête était portée sur le spasme misérable
de son corps
Roulée sur cette suffocation misérable
Sur cette respiration malade
Et dans mes yeux qu'on ne peut fermer
L'horreur d'un plafond bas et blanc
Et cependant autour de mon cou
Son bras incroyable restait d'eau fraîche
Afficher en entierOn se perd pas à pas
On perd ses pas un à un
On se perd sans ses pas
Ce qui s'appelle des pas perdus
Afficher en entierOn dirait que sa voix est fêlée
Déjà?
Il rejoint parfois l'éclat du rire
Mais quand il est fatigué
Le son n'emplit pas la forme
C'est comme une voix dans une chaudière
Cela s'arrête au milieu
Comme s'il ravalait le bout déjà dehors
Cela casse et ne s'étend pas dans l'air
Cela s'arrête
et c'est comme si ça n'aurait pas dû commencer
C'est comme si rien n'était vrai
Moi qui croyais que tout est vrai à ce moment
Déjà?
Alors, qu'est-ce qui lui prend de vivre
Et pourquoi ne s'être pas en allé?
Afficher en entierCAGE D'OISEAU
Je suis une cage d'oiseau
Une cage d'os
Avec un oiseau
L'oiseau dans ma cage d'os
C'est la mort qui fait son nid
Lorsque rien n'arrive
On entend froisser ses ailes
Et quand on a ri beaucoup
Si l'on cesse tout à coup
On l'entend qui roucoule
Au fond
Comme un grelot
C'est un oiseau tenu captif
La mort dans ma cage d'os
Voudrait-il pas s'envoler
Est-ce vous qui le retiendrez
Est-ce moi
Il ne pourra s'en aller
Qu'après avoir tout mangé
Mon cœur
La source du sang
Avec la vie dedans
Il aura mon âme au bec.
Afficher en entierEt cependant dressé en nous
Un homme qu'on ne peut pas abattre
Debout en nous et tournant le dos à la direction
de nos regards
Debout en os et les yeux fixés sur le néant
Dans une effroyable confrontation obstinée et un défi.
Afficher en entier