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Dans un village ordinaire et sans nom, une femme à la tête couverte d'un foulard propose du gruau d'avoine dont elle remplit nos tasses à la louche. En approchant, je m'aperçois qu'elle n'est pas vieille du tout, peut-être du même âge que ma mère, avec des cheveux devenus prématurément gris. Elle ne me quitte pas des yeux. Mes amis la remercient en anglais et en allemand, et elle répond en polonais. On secoue la tête pour lui montrer qu'on ne comprend pas. Elle traduit lentement en allemand.
- Peut-être... une mère... fera ça... pour mon fils, dit-elle.
Afficher en entierLors de leur deuxième journée, Bill entend un silence mortel s'abattre sur la procession devant eux, et ils commencent à croiser des hommes et des femmes qu'on a écarté du chemin pour les laisser passer. Ils doivent être environ deux mille. Ils sont en pyjamas et en sabots de bois ensanglantés. Ils ont la tête nue, rasée. Ils n'ont pas de manteaux, pas de sous-vêtements, pas de couvre-chefs, pas de fuss-lag. Ils tremblent de manière incontrôlée et certains se soutiennent entre eux. Ils ont le regard fixé devant eux, ou baissé, et ne se concentrent pas sur les prisonniers, n'attendent rien d'eux.
Afficher en entierIl faisait chaud, c’était un pénible labeur, et je retournai deux fois à la maison chercher de l’eau pour les prisonniers.
Chaque fois que je leur en apportais, je gardais Bill pour la fin et j’essayais de lui soutirer un mot ou deux, malgré le regard attentif du garde.
— Je m’appelle Bill, déclara-t-il. Et toi ?
— Izabela, répondis-je.
Il répéta deux fois mon prénom avec le plus grand sérieux,
« Izabela, Izabela », comme s’il était capital pour lui de le prononcer correctement.
Afficher en entierLa ville s’emplit de bruits : notre respiration, le battement du sang dans nos oreilles, le claquement de nos bottes sur la route, l’aboiement des chiens, la course et les cris des hommes qui se rapprochaient toujours plus. On aurait peut-être pu s’arrêter, frapper à une porte et implorer de l’aide, mais on n’en fit rien. On continuait en courant de plus en plus vite, Bill me traînant à sa suite. J’étais à bout de souffle et mon sac de toile frappait lourdement contre mes jambes.
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