Extraits

Pour notre part, nous avons fait notre métier de journaliste. Dont elle connaît mieux que quiconque l’essence, les exigences et les devoirs. Nous l’avions prévenue que nos seules limites seraient celles de notre déontologie. Sans autocensure. Elle l’a accepté. Même si, parfois, nos questions étaient rudes ou indiscrètes, même si nos interrogations successives portaient souvent le poids du doute. Ses réponses ont aussi parfois fait naître chez nous l’intuition du calcul, de la réponse ou du plan inspirés par une équipe de communicants. Aux personnes qu’Anne Sinclair nous a suggéré de voir, nous avons rajouté nombre d’autres, pas forcément désirées, parfois simplement oubliées, mais indispensables à nos yeux pour compléter une version, en équilibrer une autre, nuancer ou parfois contester. Au total, quelque soixante-dix témoins rencontrés, parfois plus d’une fois.

Il nous paraissait important d’associer Anne Sinclair au projet. À l’automne 2009, il lui est soumis. Elle réfléchit. Pèse. Soupèse. Entre Paris, son port d’attache, Washington, où la carrière de son mari l’a conduite, et Marrakech, le lieu de villégiature familiale. Une retenue naturelle la dissuade. Une fausse modestie s’invite. Une tentation narcissique s’insinue. La femme de tête évalue les risques, pèse les avantages, mesure les inconvénients. Imagine assurément pour son mari des retombées positives pour sa communication de candidat potentiel. La dame de cœur, flattée par le projet, pense à l’homme dont elle partage la vie et qui partage la sienne. À l’ambition de « Dominique », ambition qu’elle appuie autant qu’elle en craint les conséquences. Les oracles d’Euro RSCG sont évidemment consultés. Et les « communicants » rendent apparemment un avis favorable. Pour l’ultime feu vert, la dame de cœur consulte les six enfants qui forment leur famille recomposée. Une fois les données saisies, additionnées, mixées, la décision est prise. Un mois s’est écoulé.

Anne Sinclair nous dit oui, un beau matin, autour d’une boisson chaude, dans l’arrière-salle du restaurant Ma Bourgogne, l’un de ses endroits favoris, pas loin de son appartement de la place des Vosges.