Vous utilisez un bloqueur de publicité

Cher Lecteur,

Nous avons détecté que vous utilisez un bloqueur de publicités (AdBlock) pendant votre navigation sur notre site. Bien que nous comprenions les raisons qui peuvent vous pousser à utiliser ces outils, nous tenons à préciser que notre plateforme se finance principalement grâce à des publicités.

Ces publicités, soigneusement sélectionnées, sont principalement axées sur la littérature et l'art. Elles ne sont pas intrusives et peuvent même vous offrir des opportunités intéressantes dans ces domaines. En bloquant ces publicités, vous limitez nos ressources et risquez de manquer des offres pertinentes.

Afin de pouvoir continuer à naviguer et profiter de nos contenus, nous vous demandons de bien vouloir désactiver votre bloqueur de publicités pour notre site. Cela nous permettra de continuer à vous fournir un contenu de qualité et vous de rester connecté aux dernières nouvelles et tendances de la littérature et de l'art.

Pour continuer à accéder à notre contenu, veuillez désactiver votre bloqueur de publicités et cliquer sur le bouton ci-dessous pour recharger la page.

Recharger la page

Nous vous remercions pour votre compréhension et votre soutien.

Cordialement,

L'équipe BookNode

P.S : Si vous souhaitez profiter d'une navigation sans publicité, nous vous proposons notre option Premium. Avec cette offre, vous pourrez parcourir notre contenu de manière illimitée, sans aucune publicité. Pour découvrir plus sur notre offre Premium et prendre un abonnement, cliquez ici.

Livres
715 499
Membres
1 017 571

Nouveau ? Inscrivez-vous, c'est gratuit !


Inscription classique

En cliquant sur "Je m'inscris"
j'accepte les CGU de booknode

Tous les livres de Harald Welzer

" Je ne suis pas le monstre qu'on fait de moi. Je suis victime d'une erreur de raisonnement ", déclare Adolf Eichmann à l'issue de son procès. Comme après lui tous les exécuteurs allemands, rwandais, serbes et croates, dont les cas sont étudiés dans ce livre, il récuse résolument l'idée qu'il aurait agi monstrueusement et en dehors des catégories morales de la communauté des hommes. Pourtant tous ont tué systématiquement ceux qu'eux et leurs semblables avaient exclus de l'humanité par définition. Qu'on puisse les qualifier de meurtriers est une idée restée jusqu'à ce jour étrangère aux exécuteurs dans leur immense majorité, car leur projet anti-humain avait bâti un système de responsabilité morale clans lequel le meurtre de niasse était une évidence. Dans un dispositif social, montre Harald Welzer, il suffit qu'une seule coordonnée, l'appartenance sociale ou ethnique, se décale pour que tout l'ensemble change et que s'établisse une réalité autre que l'antérieure. Ce décalage, observable dans le national-socialisme, où il est fondé scientifiquement sur une théorie des races, et dans l'ex-Yougoslavie et au Rwanda, où il est fondé ethniquement, consiste en une redéfinition radicale de qui fait partie ou non de l'univers d'obligation générale. La distinction inéluctable et absolue entre appartenants et non-appartenants est commune à ces sociétés meurtrières, par ailleurs extrêmement différentes. Une fois lancée, la pratique d'exclusion conduit à la spoliation, et la déportation et la violence dont elle est assortie transforment, avec une régularité terrifiante, le déplacement en " nettoyage ", en extermination pure et simple des non-appartenants.

Pendant toute la guerre, les Britanniques ont procédé à des écoutes systématiques de milliers de prisonniers allemands et ont transcrit les passages de ces conversations qui leur paraissaient présenter un intérêt spécifique (stratégie, organisation de la chaîne de commandement, moral des troupes évoluant au fil de la guerre selon que les soldats étaient sous-mariniers ou marins, dans l’armée de l’air ou l’armée de terre, etc.). Ces procès-verbaux reposaient dans les archives sans que quiconque en saisisse l’importance décisive. Dans un premier temps, leur lecteur a l’impression d’entendre parler les soldats, avec la rude franchise de la camaraderie lorsque ceux-ci racontent leurs combats, la mort donnée et la mort reçue. Très vite, cependant, il comprend la nature inédite de cet ouvrage : jusque-là, les historiens, pour étayer leurs recherches sur la perception de la violence et la propension à tuer, utilisaient des sources très problématiques (dossiers d’enquête, descriptions dans les lettres de la poste aux armées, récits de témoins oculaires, Mémoires), car rédigées en toute conscience pour un destinataire - un procureur, une épouse restée au domicile, voire un public auquel on communiquait une vision propre des choses. Mais lorsque les soldats internés dans les baraquements britanniques parlent entre eux de la guerre en temps réel, c’est sans intention particulière, ils disent ce qu’ils pensent et ce qui les meut (course aux décorations, massacres des populations civiles et viols des femmes, mépris pour les soldats italiens et peur panique des représailles de l’Armée rouge, sentiment de l’inéluctable défaite et culte du Führer, etc.). Cette source brute, sans apprêt, conduit à porter un regard tout à fait neuf sur la mentalité de la Wehrmacht, fruit d’une éducation étrangère à l’humanisme libéral et porteuse de valeurs cimentées par l’appartenance de l’individu à un collectif, qui en tout lui sera supérieur. La nazification est alors une ultime couche idéologique, ce complément qui fit notamment basculer les soldats des crimes de guerre dans ceux contre l’humanité.

Qu’on ne s’y trompe pas : cet ouvrage va bien au-delà de son sujet immédiat – la manière dont on parlait de l’époque nazie et de la Shoah, dans les années 2000, au sein des familles allemandes. Il concerne, par ses méthodes, son cadre d’analyse, voire ses conclusions, tous ceux qui, en France ou ailleurs, ont à réfléchir aux mécanismes de la transmission de la conscience historique d'une période d’exception, soit à la confrontation de la mémoire sociale et de la mémoire familiale.

Au fil de quarante-huit entretiens familiaux et de cent quarante-deux interviews individuels sur les histoires vécues du passé national-socialiste et transmises entre les générations, il apparaît, en effet, qu’à «la mémoire culturelle» (celle qu’une société institue à une époque donnée sur un certain passé à travers célébrations, discours officiels et enseignement) s’oppose «la mémoire communicative», non plus cognitive mais émotionnelle, ciment de l’entente des membres d’un groupe (parents et proches) sur ce qui fut leur passé vrai, et qui est constamment réactivée dans le présent d’une loyauté et d’une identité collectives.

Ainsi se transmettent dans les familles d’autres images du passé national-socialiste que celles diffusées à l’école : romantiques et enjolivées par l’intégration de scènes cinématographiques, par exemple, elles sont avant tout relatives à la souffrance des proches, causée par le mouchardage, la terreur, la guerre, les bombes et la captivité.

Paradoxalement, il semble que ce soit justement la réussite de l’information et de l’éducation sur les crimes du passé qui inspire aux enfants et petits-enfants le besoin de donner à leurs parents et leurs grands-parents, au sein de l’univers horrifique du national-socialisme, une place telle qu’aucun éclat de cette atrocité ne rejaillisse sur eux. Transmis sous forme non pas de savoir mais de certitude, ces récits, pour finir, convainquent chacun qu’il n’a pas de «nazi» dans sa propre famille : «Grand-Père n’était pas un nazi.»

Nouveau ? Inscrivez-vous, c'est gratuit !


Inscription classique

En cliquant sur "Je m'inscris"
j'accepte les CGU de booknode