Commentaires sur ses livres

[Ce commentaire concerne l'édition 2014.]

Nous avons ici un manuel destiné aux licences et CPGE, recommandé par certains manuels de lycées pour approfondissement. Ceci crée des attentes, et il faut avouer qu'elles ne sont pas satisfaites.

Au niveau des chapitres réussis, on relèvera la majeure partie des chapitres sur le Moyen-Orient. Les blocs de dates à retenir en début de chapitre sont utiles et généralement bien choisies (pas toujours). Les encadrés "zoom" apportent un éclairage sur des faits et événements précis, capables d'illustrer efficacement des concepts développés dans le corps du texte. La reliure est d'excellente qualité et résiste sans broncher à des infamies (dans mon cas, un accident au verre de jus de fruit).

Au niveau des déficiences de forme, on remarquera l'absence totale d'index (cartes, notions) et d'annexes (mots-clefs). Il n'y a pas non plus de conclusion générale. L'orthographe latine n'est pas normalisée (sont concurrents "Al Jazeera" et "Al Jazira" par exemple), il y a des fautes typographiques récurrentes (en particulier des guillemets et des parenthèses qui ouvrent sans fermer à répétition). On se plaindra avec raison du déséquilibre dans le dépliant des cartes : des pays manquent en Afrique, le Moyen-Orient n'a pas de carte de géographie physique.

Les déficiences de fond sont, sans doute possible, les plus graves. L'Afrique subsaharienne est particulièrement maltraitée : une introduction rejette explicitement le terme, lui préférant celui d'Afrique noire, ce dont on voit difficilement la conciliation avec la pensée moderne ; bien des pays ne sont que nommés et jamais présentés, alors que la présentation pays par pays est annoncée comme un objectif en introduction générale et est effectivement faite pour l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient, on se retrouve donc à ne pas savoir ce qu'il peut bien se passer dans des pays aussi vastes et supposément importants que le Mozambique ou la Namibie, d'un point de vue français il est particulièrement décevant de ne pas avoir de présentation sur l'ensemble des pays africains riverains de Mayotte et de La Réunion, ni sur les pays du golfe de Guinée à peine ébauchés, ni sur l'état actuel du Rwanda et du Burundi qui jouissent pourtant d'une triste célébrité dans l'histoire française.

La première section, supposée appuyer les caractères généraux de l'ensemble du bloc Afrique et Moyen-Orient, est particulièrement mauvaise. Les migrations préhistoriques sont désignées comme des migrations traditionnelles en lien direct avec les migrations actuelles, l'histoire du peuplement est très maltraitée alors qu'un chapitre lui est consacrée ; les déserts sont présentés comme le biome capital de l'ensemble de la zone (alors même que la carte associée montre clairement qu'ils sont inconnus dans un immense territoire tropical couvrant presque la moitié de l'ensemble) ; le chapitre sur les économies de rente est déficient du point de vue pédagogique et manque d'études de cas qui permettraient d'obtenir une vue d'ensemble. Les économies de rente sont d'ailleurs réexpliquées à plusieurs reprises au cours du livre, mettant en exergue cette tare originelle du chapitre introductif, et seule l'étude sur les économies pétrolières du Golfe persique présente un réel intérêt.

La seconde section sur l'Afrique a des torts majeurs. Si elle a bien des apports sur l'histoire du XXe africain (n'oublions pas que nous parlons d'un public lycéen), en revanche elle est irrecevable pour les dynamiques contemporaines. L'agriculture est bâclée, tout est vu au prisme du pessimisme, voire du primitivisme ; très peu de pays sont caractérisés (on compte parmi ceux-ci la Côte-d'Ivoire, l'Afrique du Sud et la RDC). Au sujet du Congo justement, on relève de réelles confusions entre Congo-Brazzaville et Congo-Kinshasa de la part de certains des auteurs et même des erreurs sur la localisation de villes congolaises. Le travail de direction et d'harmonisation à cet endroit semble bien avoir minimaliste.