Extrait

Discuter ne servait à rien. J’étais sur le point de ne plus pouvoir contrôler mes nerfs et de faire une sottise. Saliha continuait à sourire en tendant le DVD. Quand elle comprit que je n’allais pas le prendre, elle le posa sur une petite table. Ils sortirent lentement puis fermèrent doucement la porte derrière eux. Je restai quelques instants interloqué puis m’affalai dans le fauteuil le plus proche. J’étais plongé dans la plus extrême confusion. J’allumai une cigarette… Mon Dieu, que m’était-il arrivé ? Qui étaient ces gens ? Étaient-ce des escrocs ou des fous ? Quels qu’ils fussent, comment connaissaient-ils les noms des personnages de mon nouveau roman que personne en dehors de moi n’avait lu ? Était-il vraiment possible qu’une vie réelle surgisse de personnages littéraires imaginaires ? Il existe une science – la parapsychologie – qui étudie les prodiges que nous sommes incapables d’expliquer. J’eus soudain une pensée angoissante : peut-être étais-je malade, mentalement perturbé et en proie à des hallucinations ? Si j’avais eu l’habitude de fumer du haschich, cela aurait pu s’expliquer par une dose trop forte. J’avais une seule fois essayé le haschich et cela m’avait plongé dans un tel état d’abrutissement que je m’en étais définitivement tenu éloigné. Je ne sais pas comment certains écrivains peuvent rédiger leurs ouvrages sous l’influence de la drogue. Pour moi, l’écriture nécessite une extrême concentration. J’étais en cet instant complètement éveillé. Ces deux visiteurs étaient réels, et moi, dans l’effroi que m’avait causé leur apparition, j’avais agi avec précipitation et fait preuve de brutalité à leur égard. J’avais eu tort de les chasser. J’aurais dû les retenir jusqu’à ce que j’aie compris leur secret. J’aurais dû surmonter ma stupéfaction et les écouter.