Extraits

« Au Brésil, ils ont une façon un peu plus optimiste de parler d'enfant trisomique.

Ils disent qu'il s'agit d'un enfant spécial.

Spécial au sens exceptionnel. D'ailleurs, quand Julia est née, plusieurs amis de Patricia lui ont dit qu'elle avait de la chance d'avoir un enfant spécial. P our certains brésiliens, c'est le bébé qui choisit ses parents à la naissance.

Dans notre cas, il aurait donc fallu considérer qu'on avait eu de la chance d'être choisis par cet enfant spécial: c'était une preuve de confiance, le signe que nous saurions nous occuper d'elle. »

Delcourt, p. 113

« Mesdames et messieurs, bienvenus à Handicapland !

Ici vous ne vous ennuierez pas !!

Il y en a pour tous les goûts : des cardiologues, des psychologues, des kinésithérapeutes...

Approchez, approchez, n'ayez pas peur !

Ce sont des sensations assurées !! »

Delcourt, p. 97

« Et puis je me suis surpris à espérer que Julia ne survive pas à son problème cardiaque, pour que ce cauchemar s'arrête.

Peut-être que si on "oubliait" de la faire opérer du cœur...

Et en pensant à ça, j'étais encore plus en colère contre moi.

Comment peut-on souhaiter la mort de son enfant ?

On serait quand même plus tranquille sans elle...

Si ça se trouve, avec un peu de chance, elle va y passer. Sinon tu n'as qu'à l'abandonner !

Mais t'as pas honte de penser ça ? T'es infect ! C'est ta fille, merde !

Mais enfin, tu vas pas l'écouter quand même ! La vie serait plus simple sans elle... »

Ce n'est pas toi que j'attendais mais je suis quand même content que tu sois venue.

— Mais... tu lui as pas donné de bain ? Maman a dit qu'il fallait lui donner un bain !!

— On peut rien te cacher à toi ! Je plains ton futur mari !

— Fabien ! Je crois que c'est pour maintenant.

— Mmm... C'est pas vrai, pourquoi que c'est toujours la nuit que ça se passe ? Y a pas moyen d'attendre un peu, au moins que le jour se lève ?

— Non, vraiment pas.

— Oui, allô, bonsoir, enfin bonjour, il nous faudrait une ambulance pour ma femme, qui n'est pas capable d'attendre le matin pour accoucher.

... Nous aimerions au moins que l'on ne nous dise plus d'un air triste "vous ne méritez pas ça" ! Bien sûr qu'on mérite notre fille... D'ailleurs, on a de la chance qu'elle nous ait choisis.

Delcourt, p. 79

« Je repensais immédiatement à la pédiatre brésilienne nous disant qu'on avait plus de chances de gagner au loto que d'avoir un enfant trisomique quand la clarté nucale est normale...

Putain, j'étais verni alors !

J'aurais dû jouer au loto plutôt que de faire cette gamine. »