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Par la malheureuse condition de l'espèce hu-maine, nos plaisirs sont pour l'ordinaire passagers et trompeurs; ils sont au moins futiles, vains et courts. On les poursuit, on les obtient avec peine; on en jouit avec inquiétude, et is entraînent le plus souvent après eux des suites funestes. À ces caractères on reconnaît principalement ceux que l'on goûte dans l'union des deux sexes. Il n'en est pas de même des plaisirs de femme à femme; ils sont vrais, purs, durables et sans remords. On ne peut nier qu'un penchant violent n'entraîne un sexe vers l'autre; il est nécessaire même à la reproduction des deux, et sans ce fatal instinct, quelle femme de sang-froid pourrait se livrer à ce plaisir qui commence par la douleur, le sang et le carnage ; qui est bientôt suivi des anxiétés, des dégoûts, des incommodités d'une grossesse de neuf mois, qui se termine enfin par un accouchement laborieux dont les souffrances sont la mesure et le point de comparaison de celles dont on ne peut calculer ou exprimer l'excès ; qui vous tient pendant six semaines en danger de mort et quelquefois est suivi durant toute une longue vie de maux cruels et incurables.
Cela peut-il s'appeler jouir ? Est-ce là un plaisir vrai ? Au contraire, dans l'intimité de femme à femme, nuls préliminaires effrayants et péni-bles, tout est jouissance; chaque jour, chaque heure, chaque minute cet attachement se renouvelle sans inconvénient: ce sont des flots d'amour qui se succèdent comme ceux de l'onde sans jamais se tarir, ou, s'il faut s'arrêter dans ce délicieux exercice, parce que tout a un terme et qu'à la fin le physique cesse de répondre aux épanchements de deux âmes si étroitement unies, on se quitte à regret, on se recherche; on se retrouve, on recommence avec une ardeur nouvelle, loin d'être affaiblie, irritée par l'inaction.
Les plaisirs de femme à femme sont non seulement vrais, mais encore purs et sans mélange.
(pp. 66-67)
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