Extraits

Sans doute est-elle restée d'ailleurs profondément inconsolable comme on le demeure après des pertes essentielles, le coeur à jamais fêlé, mais suffisamment désireuse de vivre pour ne pas consentir totalement à la dépression et à la mort.

Il y a surtout cette impuissance terrible que j'ai ressentie devant son chagrin, cette conscience que j'ai eu très vite d'être incapable de lui donner la consolation et le salut.

Je reviens vers cette période dans un mélange d'appréhension et de tristesse parce qu'elle marque pour moi la fin d'un monde et d'un bonheur que je n'ai pas retrouvé.

La douleur filtrait, discrète, inguérissable.

Elle était sortie de cette épreuve usée et défaite, remplie d'une tristesse qui ne s'effaceraient jamais.

Echoués dans l'arrière-salle de ce bar, parmi les poinçons des bougies qui vacillent sur les tables, nous sommes les veilleurs sans voix de cette nuit de février, sur les rives d'un monde anéanté par la tragique découverte du matin, au seuil d'une nuit béante, creusée par la solitude et la souffrance, une nuit où se revit l'atroce départ, le délaissement irrémissible, sans lumière, sans possible consolation, dans le buisson noir, épineux, du deuil.

Les breuvages ne manquent pas, Hélène déteste la mesure lorsqu'elle reçoit. Elle n'est avare ni de bons mots, ni de rires, encore moins de ce qu'elle offre, une fête réussie est une soirée qui dure, insoucieuse des contraintes de la vie réelle et du lendemain.

Ceux en qui elle avait mis toute sa confiance échapperaient toujours à ses sarcasmes, à ses mots d'esprit, et ce malgré l'agacement qu'elle pouvait avoir parfois.

Elle était intraitable, d'une insolence et d'une lucidité que rien n'arrêtait.

Elle aimait trop les relations profondes et justes pour s'accommoder de l'hypocrisie mondaine.