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"Cela semblait incroyable, mais à peine se touchaient-ils que des étincelles semblaient jaillir entre eux. Et l'innocence qu'il pensait avoir devinée chez elle semblait confirmée elle aussi. Il soupçonnait le contraire jusqu'à-là, mais à présent, il aurait juré être le premier l'homme qu'elle eût jamais embrassé".

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Tout doucement, il la souleva dans ses bras et, subjugué par la beauté sereine de son visage d'ange, effleura ses lèvres du plus chaste baiser qu'il eût jamais donné.

Il l'installa auprès de sa sœur à l'abri du rocher et rajusta sur elle son grand manteau noir, puis, le dos appuyé au tronc rugueux d'un chêne, il contempla Flame et Leonora étendues côte à côte, si différentes et pourtant si étrangement semblables. Elles lui semblaient d'une force, d'une bravoure, d'une audace admirables, également obstinées et téméraires, et d'une loyauté si ombrageuse qu'elle en devenait presque un défaut.

Et aussi — comment ne pas se l'avouer ? — tout aussi chères à son cœur l'une que l'autre.

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— Dieu du ciel ! S’exclama-t-il pour lui-même, comment pouvait-elle avoir des lèvres aussi douces, aussi brûlantes ? Et elle tremblait entre ses bras !

Il ne lui fallut qu'un instant pour comprendre qu'elle ne devait pas avoir connu souvent de tels baisers. Jamais, en fait, il l'aurait parié.

Il releva la tête, incapable de trouver les mots qu'il fallait.

— Milady..., souffla-t-il d'un ton bourru.

Leonora leva vers lui des yeux étonnés.

— Comment est-il possible que vous n'ayez encore jamais embrassé un homme ?

Elle battit des paupières, offensée de s'entendre poser une telle question.

— Vous n'êtes point un homme, messire, mais un sauvage...

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"-J'ai pensé qu'après un si long voyage, vous seriez bien aise de vous changer. Dillon n'éleva nullement la voix, mais ses paroles claquèrent comme la lanière d'un fouet :

-Nous sommes des guerriers, milady, des Highlanders. Nos vêtements peuvent vous paraître frustres et grossiers, mais croyez qu'ils ont été tissés avec amour".

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"-S'il est si parfait, pourquoi donc me tient-il prisonnière dans cette geôle ? Avant de répondre, le moine balaya du regard la pièce où ils se trouvaient, le feu crépitant devant eux, et les fauteuils confortables et couverts de fourrures épaisses.

-Je me demande si vous croyez vraiment que ses frères jouissent d'un confort équivalent à celui qui vous est offert ici, milady, sincèrement, ou s'ils ne croupissent pas plutôt dans quelque donjon glacé. Leonora resta figée, saisie par la honte, incapable de répondre".

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"Il devait avouer qu'elle faisait preuve d'une résistance surprenante pour une habituée à vivre dans le luxe. Une telle équipée devait représenter pour elle le summum de l'inconfort et de l'aventure. N'empêche, lui qui s'attendait à la voir gémir sans cesse et se plaindre à l'envie, il la trouvait diablement forte et courageuse".

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"Celui qu'on appelait Dillon devait paraître avenant aux femmes de sa race, sans doute, et à bien y réfléchir, elle aurait souscrit à cette assertion n'eût été cette balafre qui courait de sa joue à ses lèvres, et que l'ont devinait sous sa barbe courte. Il ne portait nulle chemise sous son manteau et elle avait du mal à détacher ses yeux du mouvement souple de ses muscles jouant sous la peau hâlée de sa poitrine. Certes, aucun anglais n'aurait souffert de se présenter en un tel appareil devant une dame, mais pour quelque étrange raison, elle restait fascinée par ce spectacle qu'en d'autres circonstances elle aurait certainement trouvé offensant".

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Chapitre 1

Angleterre, 1292

— Moira ! Les sauvages arrivent ! Je les vois ! s'exclama Leonora, la fille de lord Alec Waltham, en contemplant depuis le balcon de sa chambre perchée tout en haut du donjon du château, la campagne verdoyante de son pays bien-aimé.

Aussi loin que l'oeil pouvait voir s'étendaient les terres offertes à son père par le roi Edouard en remerciement de ses bons et loyaux services. Parmi la noblesse d'Angleterre, le souverain n'avait pas de meilleur serviteur que lord Waltham et la générosité du monarque à l'égard de son féal suscitait l'admiration dans tout le royaume, mais aussi une certaine crainte pour l'intéressé, tant Edouard pouvait parfois se montrer versatile et s'emporter contre ses plus fidèles amis si d'aventure ceux-ci se risquaient à proférer la moindre critique à son égard.

— Que Dieu nous protège ! s'exclama la dénommée Moira. Où cela ?

La vieille servante traversa la pièce à pas lents puis, une fois sur le balcon, scruta l'horizon en se protégeant de la clarté aveuglante du soleil de sa main posée contre son front ridé.

— Là-bas, sur cette colline, répondit la jeune femme. Ne vois-tu pas leurs épées qui étincellent par moments ?

— Si, laissa tomber sombrement Moira en se signant furtivement. Jamais je n'aurais cru voir un jour de tels païens venir dormir sous le même toit que nous autres chrétiens, et encore moins partager notre pain. Ah Seigneur ! Que n'ai-je entendu dire à leur propos.

— Comment, tu n'as fait seulement qu'entendre parler d'eux ? s'étonna Leonora. N'en as-tu donc jamais vu de ta vie en chair et en os ?

— Non, souffla la vieille femme, qui servait en sa jeune maîtresse la troisième génération de Waltham. Mais les histoires qu'on m'a contées à leur sujet vous feront dresser les cheveux sur la tête. On dit que ce sont des géants, et qu'il vont quasi nus été comme hiver, seulement couverts de hardes puantes, qu'il neige ou qu'il vente.

Constatant l'effet de ces paroles sur sa protégée, elle ajouta :

— Ceux qui les ont vus racontent qu'ils sont affreux à contempler et qu'ils parlent si mal qu'un croyant se doit de se boucher les oreilles pour ne pas pécher en les écoutant, et aussi qu'ils ont le visage plus hirsute que la hure d'un sanglier...

— Oh, Moira, s'exclama Leonora en ouvrant de grands yeux horrifiés et en portant la main à sa gorge. Que vais-je faire ? Mon père m'a ordonné d'accueillir ces... ces créatures du diable !

— Il aurait mieux fait de vous consigner dans votre chambre jusqu'au départ de ces païens, si vous voulez mon avis, remarqua sans détour la servante. Qui sait quelle vilenie ils nous préparent ? On dit encore qu'ils aiment à dévorer les enfants anglais et à boire leur sang.

— Tais-toi, Moira, tu déraisonnes et je ne veux plus entendre de telles sornettes. Jamais mon père n'inviterait de tels monstres sous son toit.

— Vous semblez oublier que cette rencontre a été ordonnée par le roi, et non décidée par milord Waltham.

— Crois-tu que notre souverain mettrait délibérément son plus fidèle ami en danger, justement ?

Moira resta silencieuse, gardant pour elle les réflexions que lui inspirait la naïveté de sa jeune maîtresse. De toute façon, il y avait des espions partout. Malheur à ceux qui perdaient la faveur du roi.

Leonora suivit des yeux les trois hommes qui arrivaient aux abords du château. Sur un ordre bref, le pont-levis fut abaissé et l'on hissa la herse tandis que les sabots des chevaux claquaient déjà sur le bois noirci par d'innombrables crottins.

— Il faut que ces Highlanders soient fous, commenta la jeune femme en quittant le balcon ; ou diablement courageux, pour entrer ainsi dans un château où les attendent plus de cent des meilleurs soldats du royaume !

— On dit également, ajouta Moira d'un air entendu, qu'il ne faut qu'un seul d'entre eux pour défaire toute une armée d'Anglais.

— Tu finiras pendue si tu continues à proférer des propos séditieux, Moira, lança la jeune femme en sortant de sa chambre. Ce ne sont point des dieux tout de même, mais des mortels tout comme nous.

Elle fit deux pas puis lança, par-dessus son épaule :

— Et je vais de ce pas m'en assurer par moi-même. Nous sommes assez nombreux ici pour qu'il n'y ait aucun risque.

Une fois sa maîtresse partie, la vieille nourrice se jeta à genoux en se signant pour prier le ciel de protéger le château et tout particulièrement sa protégée. Leonora n'avait que vingt ans, et l'obstination d'une mule en plus de la fougue de sa jeunesse. Elle ne tarderait pas à apprendre qu'il s'en fallait de beaucoup que le monde fût aussi civilisé que le beau royaume d'Angleterre.

— Que ferons-nous s'ils nous demandent de déposer nos armes, Dillon ?

— Robert a expliqué que pour les convaincre de notre désir de faire la paix, il fallait que nous soyons prêts à nous soumettre à leurs exigences, répondit Dillon Campbell en sautant à bas de son cheval et en tendant les rênes à un jeune palefrenier qui le regarda en ouvrant de grands yeux, visiblement subjugué.

Choisissant de ne pas prêter attention à l'effet qu'il semblait avoir sur le garçon, le Highlander épousseta son manteau avant de le jeter négligemment sur son épaule puis passa la main dans son épaisse chevelure pour retrouver forme humaine.

Ses deux frères, Sutton et Shaw, l'imitèrent de concert. Quoique jumeaux, et parfaitement identiques pour ce qui concernait la couleur de leurs cheveux, blonds comme la paille en hiver, et de leurs yeux plus verts que les montagnes des Cairngorms, ils différaient étonnamment par leur caractère. Depuis l'enfance, Sutton imitait son frère aîné en tout, ne rêvant que plaies et bosses et profitant de la moindre occasion pour tirer son épée du fourreau où, selon lui, elle ne faisait que rouiller inutilement. Shaw, au contraire, montrait des dispositions intellectuelles étonnantes, au point que les moines avaient pris la décision de faire de lui l'un des leurs. Un jour prochain, il entrerait dans leur monastère en qualité de moine cette fois-ci, et mènerait parmi eux une vie d'étude et de prière.

— Faudra-t-il leur donner toutes nos armes ? insista Sutton, que cette perspective n'enchantait visiblement pas.

Dillon s'efforça de réprimer le sourire qu'il sentait naître sur ses lèvres.

— Ce que dit Rob importe peu, finalement, répondit-il. Il est à Edimbourg au milieu des nôtres et ce n'est point lui qui va devoir dormir sous le toit de l'ennemi. Pour moi, je n'ai aucune confiance en ces chiens d'Anglais et je tiens qu'il ne faudra leur confier que celles qu'ils pourront voir. Il sera prudent de garder sur nous nos sgian dubh bien cachés dans nos bas, en cas de besoin. Il se pourrait même qu'ils nous sauvent la vie...

— Tu as raison, approuva Sutton, soulagé, en caressant sous la laine qui recouvrait son mollet la lame fine qu'il y dissimulait, et qu'il n'avait aucunement l'intention de livrer à l'ennemi.

— Souvenez-vous de ce que je vous ai dit, reprit Dillon. Ne vous fiez à personne, ne laissez rien au hasard et soyez sur vos gardes à chaque instant.

Devant eux, la lourde porte qui donnait accès à la cour s'ouvrit lentement et des soldats en grand nombre surgirent pour leur faire une haie d'honneur, visiblement impressionnés par l'aspect redoutable de ces hôtes inhabituels. Les plus grands parmi eux rendaient bien une tête aux deux plus jeunes, et quant au chef des Highlanders, on aurait cru un géant.

Dans la cour se tenaient plusieurs personnages ; l'un d'eux semblait être un évêque et les autres des sénéchaux ou des officiers. Tous en tout cas regardaient les visiteurs avec une curiosité teintée de crainte et ils semblèrent presque soulagés lorsque apparut celui qui devait être le maître des lieux, suivi d'une jeune femme ravissante qui vint prendre place à ses côtés lorsqu'il s'arrêta sur le perron.

Vêtu d'un doublet à col de martre et de braies de satin, il avait fière allure, mais ses yeux vifs et pleins d'intelligence éclipsaient tout le reste en lui.

— Je suis lord Alec Waltham et vous souhaite la bienvenue en Angleterre et dans mon château, lança-t-il à l'adresse des Highlanders campés au milieu de la cour.

Dillon s'avança comme s'il eût voulu protéger ses frères.

— Merci, lord Waltham, répondit-il en présentant son épée à plat sur ses mains tendues. Je suis Dillon Campbell et ceux-ci sont mes frères, Sutton et Shaw.

Les deux jeunes gens firent un pas en avant, offrant eux aussi leur estoc en gage de paix. Waltham accepta, faisant signe à son capitaine des gardes de prendre les armes avec célérité avant d'attirer sa fille près de lui pour la présenter aux nouveaux arrivants.

— Voici Leonora, ma fille bien-aimée, annonça-t-il fièrement.

— Milady, murmura Dillon, conscient du contraste entre la splendeur des vêtements de son hôte et les hardes couvertes de poussière qu'il avait sur le dos.

D'un geste vif, il souleva la main de la jeune femme et l'effleura de ses lèvres. Elle avait l'odeur des roses fraîchement cueillies, une peau d'un blanc d'albâtre, des cheveux plus sombres que l'aile d'un corbeau, et quand elle leva furtivement les yeux vers lui, Dillon crut voir en ceux-ci comme le reflet de la bruyère qui fleurissait sur les collines de son pays. Il n'avait pas souvenir d'avoir jamais vu une telle couleur et fut si surpris de ce regard étrange qu'il lâcha subitement la main de la jeune femme et recula d'un pas, instinctivement.

Leonora hocha doucement la tête, trop impressionnée pour parler. La voix de l'Ecossais semblait tout aussi policée que celle d'un Anglais, quoique imperceptiblement plus gutturale, et sa main calleuse et dure semblait avoir assez de force pour lui briser les os. Mais plus impressionnant encore : en sentant les lèvres de l'inconnu effleurer sa peau diaphane, elle avait senti lui parcourir l'échiné un frisson délicieux dont elle tremblait encore.

Moira avait raison, en tout cas. Ces Ecossais ressemblaient en effet à des géants. Ils avaient une stature, une allure qui ne rappelait en rien celle des hommes qu'elle connaissait et autour d'eux flottait une odeur à la fois enivrante et forte, comme celle des chevaux après une longue course. Leurs épaules massives et leurs cheveux clairs qui tombaient en cascade tempétueuse sur leurs épaules attestaient qu'ils descendaient en droite ligne des Vikings. D'ailleurs, comme ceux-ci — à ce qu'en rapportait la légende — ils portaient des vêtements d'une rusticité extrême et d'une telle sobriété qu'il semblait presque étonnant qu'on l'autorisât à les rencontrer, car ils laissaient à voir de leur peau nue bien plus qu'il n'était convenable.

Celui qu'on appelait Dillon devait paraître avenant aux femmes de sa race, sans doute, et à bien y réfléchir, elle aurait souscrit à cette assertion n'eût été cette balafre qui courait de sa joue à ses lèvres, et que l'on devinait sous sa barbe courte. Il ne portait nulle chemise sous son manteau et elle avait du mal à détacher ses yeux du mouvement souple de ses muscles jouant sous la peau hâlée de sa poitrine. Certes, aucun Anglais n'aurait souffert de se présenter en un tel appareil devant une dame, mais pour quelque étrange raison, elle restait fascinée par ce spectacle qu'en d'autres circonstances elle aurait certainement trouvé offensant.

Lord Waltham prit la parole, pour ne pas laisser s'installer un silence pesant :

— Permettez que je vous présente monseigneur l'évêque d'York.

— Votre grâce, salua Dillon en baisant l'anneau de ce dernier.

— Comment, vous êtes chrétien ? s'étonna l'ecclésiastique, interloqué.

— Oui, répondit Campbell. Après le décès... prématuré de nos parents, nous avons été recueillis par des moines, qui nous ont élevés au monastère de Saint-Collum.

L'évêque rayonnait, ravi d'apprendre que ces gens qu'il imaginait païens fussent chrétiens eux aussi. Et qu'ils aient été élevés par des moines de surcroît augurait bien des pourparlers de paix que Waltham voulait mener avec eux.

Ce dernier fit s'avancer un autre personnage, qui portait un doublet bicolore somptueux ainsi que des braies de soie bleue.

— Je vous présente George Goodwin, duc d'Essex, l'émissaire du roi, annonça-t-il.

L'autre garda un visage impassible, mais Dillon perçut nettement une certaine hostilité dans son regard, ce qui lui convenait parfaitement, car il préférait de loin savoir ce qu'un homme avait sur le coeur avant de s'asseoir à la même table que lui. Comme un guerrier salue son adversaire avant de se lancer contre lui, il leva la main droite et la tint un instant ouverte face à son vis-à-vis, qui imita son geste sans un instant d'hésitation.

— Et voici lord James Blakeley et son fils Alger, poursuivit le maître des lieux.

Le père comme son rejeton avaient les cheveux et la barbe coupés de frais et la prestance de soldats intrépides. Le premier inclina la tête sans autre manifestation de bienvenue, quant au second, il garda la main sur le pommeau de son épée et s'approcha de lady Leonora tout en défiant le visiteur du regard. Il semblait évident qu'il considérait comme de sa responsabilité personnelle la sécurité de la jeune femme et qu'il craignait que ces étrangers ne fussent une menace pour celle-ci.

L'attitude des deux hommes ne laissait pas de troubler Dillon, et il sentit une crainte longtemps enfouie refaire surface en lui, mais la chassa incontinent en s'exhortant à penser que n'importe quel soldat anglais pouvait susciter en lui de tels sentiments.

Lord Waltham présenta ensuite un homme âgé au crâne presque entièrement dégarni et qui s'appuyait pesamment sur une canne.

— Lord John Forest, annonça-t-il, le conseiller particulier du roi.

Dillon scruta le visage du vieillard, qui l'examina en retour avec une méticulosité discrète, sans sembler toutefois éprouver ni sympathie ni aversion particulière pour l'étranger.

— Bienvenue, lança-t-il cependant en tendant la main.

— Merci, répondit le Highlander en acceptant son salut. Lord Waltham observait soigneusement la réaction de son hôte à chaque nouvelle présentation, conscient qu'entre des hommes qui nourrissaient une inimitié aussi féroce qu'ancienne les uns envers les autres, la première rencontre revêtait une importance capitale. S'il voulait que la confiance s'installe, il fallait absolument que les préliminaires soient aussi amicaux que possible.

Ce qui semblait loin d'être le cas.

— Vous devez être fatigué après ce long voyage, remarqua-t-il. Vous voudrez sans doute vous sustenter quelque peu avant de gagner vos chambres. Suivez-moi.

Quand le maître des lieux tourna les talons, entraînant sa fille avec lui pour gagner la grande salle, Dillon fit signe à ses deux frères de le suivre de près.

Ils pénétrèrent à l'intérieur du château et traversèrent une pièce immense illuminée d'innombrables chandelles. Tout en marchant, les deux jumeaux surveillaient du coin de l'oeil les soldats qui les suivaient à distance respectueuse. Bientôt, toute la petite troupe arriva devant une lourde porte de chêne. Un serviteur vint l'ouvrir et s'écarta pour libérer le passage. Tous entrèrent, sauf les soldats qui, eux, restèrent à l'extérieur, sans doute pour monter la garde.

Une fois qu'ils furent à l'intérieur, on disposa des fauteuils couverts de fourrure en arc de cercle autour du feu qui brûlait dans la cheminée. Lord Waltham et sa fille engagèrent un conciliabule avant de s'adresser à l'un de leurs serviteurs, puis s'installèrent enfin. Alger Blakeley vint se placer d'autorité à côté de la jeune femme, comme s'il eût été son promis.

— Asseyez-vous, messires, et réchauffez-vous à ce feu, suggéra lord Waltham.

Les trois Highlanders s'exécutèrent et se virent servir aussitôt un pichet de bière, qu'ils gardèrent à la main sans y toucher en attendant que leur hôte ait bu une première gorgée. Quand Dillon se fut persuadé que le breuvage mousseux ne contenait nul poison, il hocha la tête en direction de ses cadets, qui prirent chacun une longue lampée. Les pichets furent bientôt vides et un nouveau serviteur approcha pour les remplir tandis qu'un autre leur offrait du pain trempé dans du vin, ce qui constituait un remontant d'une efficacité insigne.

Lord Waltham considérait ses invités avec intérêt. Sa fille, elle, trop intimidée pour se sentir à son aise, se contentait de garder les yeux baissés et n'ouvrit pas la bouche une seule fois.

— Le voyage a-t-il été éprouvant ? s'enquit le duc d'Essex.

— Non, répondit Dillon en étirant ses longues jambes vers l'âtre pour savourer la chaleur vivifiante qu'il sentait s'installer en lui après son premier pichet de bière.

Si les Anglais avaient l'intention de les enivrer, il faudrait qu'ils s'emploient à leur servir quelque chose d'un peu plus fort, car dans leur monastère, les moines produisaient la meilleure bière d'Ecosse ainsi qu'un alcool réputé et l'on buvait la première à table tous les jours.

— Quand on a passé sa vie dans les Highlands, voyager quelques jours dans votre pays est un jeu d'enfant.

— N'êtes-vous point fatigués ? s'étonna tout de même lord Waltham en levant un sourcil perplexe, persuadé qu'à la place des trois étrangers, ses propres soldats seraient rentrés fourbus.

— Aucunement. Peut-être si nous avions chevauché jusqu'à Londres aurions-nous besoin à présent de nous rafraîchir quelque peu, mais nous n'avons pas fourni plus d'efforts pour venir jusqu'ici que nous ne l'aurions fait en une journée de voyage dans les Highlands.

— J'ai entendu parler de cette contrée, intervint Leonora sans réfléchir, pour regretter aussitôt cet impair.

A peine ces paroles prononcées, elle sentit peser sur elle le regard lourd de l'Ecossais et se maudit de s'être montrée si frivole. Elle ne voulait nullement attirer l'attention sur elle et voilà qu'à présent l'étranger la fixait de ses grands yeux noirs avec une telle intensité qu'elle s'en sentait gênée.

— Et que vous en a-t-on dit, milady ? lança celui-ci. Leonora regarda son père du coin de l'oeil et constata que, comme à son habitude, il lui souriait tendrement. Le trépas de leur mère et épouse avait rapproché ces deux êtres de manière étonnante, au point que lord Waltham prenait souvent le conseil de sa fille pour les affaires concernant le royaume. Le roi lui-même appréciait les qualités de la jeune femme et les relations qu'elle entretenait avec les amis de son père, dont l'âge et le rang auraient dû l'impressionner, mais avec lesquels elle semblait se sentir parfaitement à son aise.

— Qu'elle est plutôt... sauvage, affirma-t-elle en se passant la langue sur les lèvres.

— En effet, confirma Dillon après s'être donné le temps de boire une gorgée de bière. Aussi sauvage qu'on peut l'être, et aussi fort belle...

Leonora sentit de nouveau un frisson lui parcourir l'échiné. Il disait cela avec des accents si passionnés qu'on aurait pu croire qu'il parlait d'une femme aimée.

— Robert de Bruys doit vous tenir en haute estime pour avoir fait de vous son ambassadeur, intervint l'évêque, subjugué par l'apparente quiétude de l'Ecossais, qui se tenait dans son fauteuil comme s'il devisait tranquillement avec des amis.

D'être totalement encerclé par des soldats anglais ne semblait pas l'inquiéter le moins du monde, ce qui semblait confirmer la rumeur selon laquelle les Highlanders ne connaissaient pas la peur.

— Rob sait que je n'ai qu'une parole, répondit Campbell.

— Toute la question est de savoir quelle valeur lui accordent vos compatriotes, répliqua le duc d'Essex avec un sourire méprisant.

L'Ecossais ne broncha pas devant cette remarque insultante. Il parlait si bas que les autres devaient tendre l'oreille pour comprendre ses paroles, quoiqu'ils n'eussent aucun mal à discerner dans sa voix une résolution inflexible.

— Je ne serais point céans si elle n'en avait aucune, répondit-il avec son accent discrètement guttural.

— Fort bien ! lança lord Waltham, soucieux de désamorcer cet échange qui risquait de tourner en querelle.

Mieux valait ne pas mettre un terme à la rencontre avant même qu'elle ait commencé. Pour détendre l'atmosphère, la présence d'une femme se montrait toujours un atout inégalable.

— Si vous vous sentez assez reposé à présent, peut-être ma fille pourrait-elle vous conduire à vos chambres ? suggéra le maître des lieux.

L'intéressée adressa à son père un regard suppliant, mais celui-ci détourna délibérément les yeux. Cela n'échappa nullement à Dillon Campbell, qui aurait pu s'amuser de la chose s'il ne l'eût trouvée insultante. Il semblait en effet évident que la jeune femme aurait cent fois préféré affronter une horde de chats sauvages plutôt que de devoir escorter les visiteurs jusqu'à leurs quartiers.

— Je vais accompagner milady Leonora, intervint Alger Blakeley.

— Non, répondit Waltham d'un ton sans réplique en lançant au jeune homme un regard menaçant, avant de se tourner de nouveau vers ses hôtes : si vous désirez quoi que ce soit, n'hésitez point à en faire la demande. Nous souperons au coucher du soleil. Quelqu'un viendra vous chercher.

— Milord, votre grâce, salua Dillon pour toute réponse, en inclinant légèrement la tête devant les deux hommes, après quoi il emboîta le pas à la jeune femme suivi de ses deux frères qui fermaient la marche.

Ils gravirent un escalier en colimaçon élégant pour arriver à l'étage et admirèrent au passage les tapisseries qui couvraient les murs et la nuée des serviteurs qui s'agitaient en tous sens, qui polissant un bougeoir, qui cirant un meuble tandis que d'autres passaient devant eux portant de lourdes panières d'osier remplies de linge.

On vivait bien chez lord Waltham, apparemment.

Dillon s'intéressait tout particulièrement à la jeune femme qui marchait devant lui. Même à Edimbourg, la capitale de son pays, il n'avait pas souvenir d'avoir jamais vu donzelle mieux accoutrée. Le tissu de sa robe chatoyait dans la lumière des chandelles, et chaque mouvement qu'elle faisait imprimait à ses hanches — qu'on devinait voluptueuses sous l'épaisseur trompeuse de ses jupons — un roulis qu'il ne pouvait s'empêcher de trouver furieusement excitant. Ses cheveux sagement retenus dans une résille dansaient doucement sur ses épaules et il se demanda l'espace d'un instant quelle allure aurait cette Anglaise hautaine une fois ses boucles noires libérées de leur carcan de fils d'or.

En s'ébrouant pour chasser ces pensées inopportunes, il songea à sa mission.

Leonora s'arrêta un instant devant deux énormes portes de chêne sombre, puis une fois qu'elle les eut ouvertes d'une poussée franche, pénétra dans la pièce sans se retourner avant de faire signe aux serviteurs qui s'y trouvaient de vider les jeux, ce qu'ils firent sans demander leur reste en voyant les étrangers hirsutes qui suivaient leur jeune maîtresse.

Ils avaient fait du bon travail : un feu crépitant brûlait dans l'âtre, devant lequel se trouvaient quelques fauteuils disposés en arc de cercle pour que les invités puissent s'y réchauffer à leur aise en vidant le tonnelet de bière qui trônait sur une table en compagnie de trois gobelets de vermeil ouvragé.

— Est-ce là notre chambre à coucher ? s'enquit Sutton en ouvrant une porte.

— Oui, l'une d'elles en tout cas, répondit la jeune femme en le regardant s'aventurer dans la nouvelle pièce, suivi comme son ombre par son jumeau.

Quand les deux frères revinrent dans la pièce quelques instants plus tard, ils tenaient à la main des vêtements d'une finesse incroyable.

— Regarde, Dillon, s'exclama Sutton. Nous avons trouvé cela sur les lits. Tâte cette étoffe. Tu n'en as jamais vu de plus douce...

Dillon regarda ses frères avec une moue de mépris.

— Nous n'avons nul besoin de cela, rétorqua-t-il. Rendez-les à milady Leonora.

— Mais...

— Obéissez !

Quand les jumeaux s'exécutèrent, Dillon se tourna vers la jeune femme.

— Pouvez-vous m'expliquer ce que cela signifie ? demanda-t-il d'une voix sombre.

— Nous avions entendu..., commença-t-elle en se mordant la lèvre, bien en peine soudain de savoir quoi dire.

Comment lui expliquer en effet qu'elle avait éprouvé une certaine pitié en voyant leur mise fruste, et demandé à son père la permission de leur fournir des atours plus en rapport avec la splendeur de cette demeure dans laquelle il les recevait, ainsi qu'avec leur statut d'émissaires royaux. Comment faire état des rumeurs qui couraient sur leur race, et la propension des hommes de celle-ci à aller à moitié nus même en présence de femmes inconnues ?

— J'ai pensé qu'après un si long voyage, vous seriez bien aise de vous changer...

Dillon n'éleva nullement la voix, mais ses paroles claquèrent comme la lanière d'un fouet :

— Nous sommes des guerriers, milady, des Highlanders. Nos vêtements peuvent vous paraître frustes et grossiers, mais croyez qu'ils ont été tissés avec amour.

Il eut une pensée pour les longues heures passées par sa soeur et les nonnes du couvent à tisser la laine de leurs moutons. Les couleurs du tissu épais lui rappelaient son pays, avec ses vallons où croissait une herbe verte et drue, le bleu de sa bruyère fleurissant sur les collines et le noir de la tourbe qui tapissait ses plaines par endroits. A lui seul, ce tartan évoquait l'Ecosse comme aucune parole n'aurait su le faire.

— Voudriez-vous nous voir oublier la terre qui nous a vus naître pour nous transformer en paons ridicules, milady ? Notre histoire est riche et notre peuple en est fier, quoi que vous puissiez en penser. Nous n'avons pas la même idée de ce qu'est un homme, d'après ce que j'ai pu voir tout à l'heure.

— Je... je ne voulais point vous offen...

Effarée, le rouge aux joues, Leonora s'arrêta un instant pour se reprendre :

— Pardonnez-moi, messire. Je n'avais nullement l'intention de vous blesser. Je vais envoyer quelqu'un pour prendre vos vêtements et vous promets de vous les renvoyer lavés et secs avant l'heure du souper.

L'Ecossais répondit d'une voix qui grasseyait un peu plus encore que d'habitude, signe évident que sa colère, loin de s'apaiser, ne faisait que croître, au contraire.

— C'est inutile. Nous sommes peut-être des sauvages, mais nous avons apporté d'autres vêtements. Si vous voulez bien avoir l'obligeance d'envoyer l'une de vos servantes aux écuries, elle trouvera notre équipage sur nos chevaux.

— A votre guise, répondit la jeune femme en battant en retraite, peu désireuse de rester en présence de ce butor qui la mettait si mal à son aise.

Mais celui-ci ne la laissa pas s'enfuir si facilement et s'avança vers la porte pour la lui tenir ouverte. Quand elle passa devant lui, elle sentit leurs corps se frôler l'espace d'une fraction de seconde, mais ce contact suffit à l'émouvoir. Une onde de chaleur l'envahit, qui ne devait rien au feu qui craquait dans la cheminée. Sentant se poser sur elle le regard de braise du Highlander, elle baissa la tête pour cacher le rouge qui lui montait aux joues.

— On viendra vous chercher à l'heure du dîner, souffla-t-elle avant de s'éloigner.

— C'est fort aimable à vous, milady, répondit Dillon d'un ton où perçait le mépris.

Leonora serra les dents, ulcérée de s'être montrée aussi faible devant ce sauvage qui moquait son hospitalité.

Aussi longtemps qu'elle vivrait, jamais elle ne lui pardonnerait cet affront.

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