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- Yep, acquiesça-t-il avec un sourire penaud. J’étais là aussi, et j’ai vu cette étincelle entre vous. Il vous suivait partout comme un petit chien. Il n’était personne à l’époque.

Il n’a jamais été « personne ». Pas pour moi.

Mais je me tus. On ne disait pas ce genre de choses à des étrangers.

- C’était il y a vraiment longtemps.

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Et comme de mon côté je m’étais déjà préparé à y faire face, je ne sais pas pourquoi cela me rendit si triste. Mais c’était le cas. Comme si quelqu’un avait coupé ma ligne de vie. Je m’assis sur le bord du lit défait dans ma chambre d’hôtel et réécoutai les messages plusieurs fois, et à chaque fois, J.X. semblait plus fatigué et plus… fataliste.

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Mon Dieu. Étant moi-même du genre socialement arriéré, je ne savais que trop bien à quel point c’était atroce pour lui. Et je ne voulais pas l’écraser par un refus. Si seulement j’étais J.X., qui était parfaitement capable d’accepter des invitations spontanées. En fait, il faisait toujours ce genre de choses : aller dîner avec des lecteurs après une séance de dédicace ou assister à des déjeuners de clubs de lecture. Mais j’étais moi, et j’avais déjà épuisé mon lot quotidien de sociabilité. Je voulais juste rentrer chez moi.

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— Que vous êtes-vous dit quand vous avez trouvé le corps d’Elijah Ladas ?

— Que je jouais de malchance. Et qu’il était encore plus malchanceux que moi.

Sydney fronça les sourcils et jeta un nouveau coup d’œil à ses notes.

— La police a-t-elle des suspects dans cette affaire ?

— La police a toujours des suspects.

— Vous ont-ils donné un indice quant aux personnes sur lesquelles ils se concentrent ?

— Je ne suis pas dans la confidence.

Sydney semblait réellement sceptique.

— C’est dur de croire que la police ne voudrait pas collaborer avec un si célèbre détective amateur. Sans compter que votre partenaire, J.X. Moriarity, est un ancien agent de la police de San Francisco.

— Il serait encore plus difficile de croire que la police mettrait un écrivain de romans policiers dans la confidence. Ça n’arrive qu’à la télévision. Vous me confondez peut-être avec Jessica Fletcher. J’ai de plus beaux cheveux et je ne fais pas de vélo.

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Nous changeâmes de position sans trop de grâce. C’est le problème avec le sexe. Il y a tellement de choses qui sont juste bizarres, maladroites, tu-es-sûr-que-ça-va-rentrer ?, mais nous rampâmes, et je chevauchai les hanches minces de J.X., mes orteils s’enfonçant dans le matelas en essayant de me mettre en position. Du yoga ? Vraiment ? Et comment diable appelleriez-vous cette position ?

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Mais. Mais je savais aussi qu’un chapitre venait de se clôturer pour moi. Je n’avais pas écrit depuis des mois. Je n’avais aucun projet d’écrire quoi que ce soit. Pire encore, je ne trouvais aucun intérêt à écrire quoi que ce soit.

Et si je n’étais plus écrivain, qu’est-ce que j’étais ? J’avais passé l’ensemble de ma vie d’adulte à gagner mon pain grâce à mes mots. Si je n’avais plus les mots, que me restait-il ? Écrire n’était pas simplement une description de poste. C’était une manière de voir le monde, de faire partie du monde. Depuis aussi longtemps que je puisse m’en souvenir, tout ce que j’avais expérimenté avait été filtré à travers la perspective d’un écrivain prenant des notes mentales.

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Il vint dans ma direction (la foule s’écartant devant Sa Seigneurie) et je dis :

— Salut. Désolé, je suis en re…

Sa main atterrit sur mon épaule et sa bouche recouvrit la mienne. Il sentait le cuir, les feuilles de tamarinier et l’auramber. Il avait le goût des pastilles à la menthe et de lui-même. Ce n’était pas un de ces baisers « Chéri, enfin te voilà ! » appropriés pour des retrouvailles en public. Ça ressemblait plus à un baiser « Chéri, ils m’ont dit que tu étais mort ! ». OK, peut-être pas aussi passionné, mais clairement plus fiévreux que ce dont j’avais l’habitude lors d’une dédicace. Ou n’importe où ailleurs que dans notre chambre à coucher. Je crois même que l’on reçut des applaudissements.

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Sur le trajet du retour à Cherry Lane, je m’arrêtai faire des courses et fis quelques provisions de produits de première nécessité comme des pizzas congelées, du poulet frit congelé, des tourtes congelées, des nems congelés, des lasagnes congelées, des burritos congelés, de la bière, des crevettes frites congelées, des muffins au chocolat et de la crème glacée. Ainsi qu’un sachet de citrons verts, de la laitue prélavée et deux bouteilles d’eau minérale gazeuse.

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— Bien sûr que si, tu l’es. Ta mère est suédoise, n’est-ce pas ? répondit Rachel patiemment.

— Suisse. Mais non. Elle est américaine. Ma grand-mère était suisse. Cela ne me qualifie pas pour écrire des romans policiers scandinaves.

— Il n’est pas nécessaire d’être scandinave pour écrire des romans policiers scandinaves.

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Je fis un signe de tête enthousiaste à J.X. pour qu’il voie que je l’écoutais.

— As-tu entendu un seul mot de ce que j’ai dit ? demanda Rachel.

— Je t’aime, dit J.X.

— Je t’ai entendue, répondis-je brièvement.

Le silence de Rachel et l’expression de J.X. semblaient tout aussi déconcertés.

— Je t’aime aussi, dis-je à la hâte à J.X.

Il sourit d’un air incertain. Mon sourire était tout aussi douteux.

— Christopher ? demanda Rachel. Tu es toujours là ? Christopher ?

— Je suis là, dis-je automatiquement, tandis que J.X. levait la main pour un dernier adieu et disparaissait dans le hall.

Quelques instants plus tard, et ce qui semblait être un long chemin, j’entendis la porte d’entrée se fermer. Puis le bruit distinct d’une clé qui tourne dans la serrure.

Au temps pour les jalons et les marqueurs de relation. Je t’aime aussi.

Je. T’aime. Aussi.

D’une certaine façon, j’avais eu l’intention, la première fois que je réussissais à dire les mots à J.X., d’y mettre un peu plus… de conviction.

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