Ajouter un extrait
Liste des extraits
Il recula, cherchant à tâtons derrière lui la poignée de la porte. « Et dites à Clerk Tradayn que je suis prise ce soir aussi. » La romancière attendait, presque au bas des marches, pendant que Dik tripotait maladroitement la poignée. Comme elle semblait s’être coincée, il sortit son autre main de sa poche afin d’assurer sa prise. Son exemplaire de L’Affirmation glissa sous sa capote, tomba à terre. Le laissez-passer, logé entre Orfé et Hilde, voleta hors du volume. Dik se baissa pour les ramasser
Afficher en entierL’ancien bureau de la scierie s’ornait d’une fenêtre donnant sur la pente qui descendait vers le village puis, au-delà, sur les montagnes lointaines. La pièce, nue et sale, était meublée d’un bureau, d’une chaise et d’un minuscule radiateur électrique à chaleur rayonnante doté d’un seul barreau. Comme il n’y faisait guère plus chaud qu’au rez-de-chaussée, Dik comprit pourquoi Mlle Kaine travaillait revêtue de ses fourrures
Afficher en entierL’inconnue recula et referma la fenêtre d’une main ferme. Dik, obéissant, partit dans la direction indiquée, s’écartant de la bande chauffante pour progresser sur une piste étroite dont la neige piétinée constituait un sentier durci, irrégulier. Ce ne fut qu’en contournant le coin de la scierie et en découvrant une porte incrustée dans le mur qu’il comprit qu’il avait dû parler à Mlle Kaine en personne
Afficher en entierLa frontière retrouva son calme ; Dik rentra au village sain et sauf, quelques jours plus tard. Quarante-huit heures de repos l’attendaient, et le temps qu’il passait d’habitude à traîner sans but autour des baraquements avait soudain un sens
Afficher en entierLe blizzard s’interrompit le troisième jour, mais Dik fut affecté au déblayage, une escouade entière aidant les tracteurs à dégager les rues, une fois de plus. La pelle à la main, les bras et le dos endoloris, il passa de longues heures à se demander de manière obsessionnelle pourquoi les bourgeois n’avaient pas fait poser des bandes chauffantes à travers le village, comme le long de la frontière ou sur les talus couronnés par le parapet du mur. Sous la neige et la glace attendaient les vieux pavés, qui grinçaient contre le coin en métal de sa pelle tandis qu’il peinait à la tâche
Afficher en entierCette nuit-là, le jeune homme glissa le laissez-passer dans le roman, au sein du passage décrivant la mémorable première rencontre d’Orfé et Hilde, la fascinante épouse du rival d’Orfé, Coschtie. C’était une de ses scènes favorites du gros volume, emplie d’ambiguïté, de défi intellectuel, traversée par la pulsation sous-marine d’un courant sexuel
Afficher en entierIl comptait alors devenir professeur de lettres modernes à l’université de Jethra, décision directement inspirée par l’œuvre de Moylita Kaine. Aussi loin que remontaient ses souvenirs, il avait toujours lu de la fiction et de la poésie ; il avait lui-même écrit des poèmes, mais un livre bien particulier – L’Affirmation[1],
Afficher en entierDik attendit en tapant des pieds, frissonnant, jusqu’à ce qu’enfin lui parvînt le bruit du jet de vapeur qui résonna dans le vent glacial ; le jeune homme eut un pincement au cœur, un sentiment à présent familier, celui du mal du pays
Afficher en entierLes grandes doubles portes s’ouvrirent, laissant tomber un large rayon de lumière orangée sur les carrosseries polies et la neige piétinée. Dik, les épaules voûtées, poursuivit son laborieux chemin vers la caserne de la police. Derrière lui, les bourgeois quittaient l’hôtel du civisme, les portières claquaient. Quelques instants plus tard, les voitures le dépassaient en un lent convoi puis quittaient la rue du village pour le chemin étroit menant à la gare, située plus bas dans la vallée aux flancs escarpés. Alors seulement il devina les raisons de l’expédition.
Afficher en entierOn volait donc sans être importuné. Les appareils ne semblaient bouger que pour suivre le soleil, qui progressait peu à peu au zénith, le long de l’équateur. Leurs occupants finissaient par connaître la forme des îles, les couleurs changeantes de la mer aux endroits où les courants étaient plus lents ou plus profonds, où des rochers crevaient la surface des flots. Ils finissaient par connaître les îles, sans jamais les avoir visitées. Ils brûlaient d’y voyager, de découvrir ce que signifiait la neutralité, où elle mènerait
Afficher en entier