Ajouter un extrait
Liste des extraits
La mort au-dessous ; au-dessus, l’inconnu. Un choix. Un moment d’inattention ou un seul faux pas et il mourrait, en allant se briser sur les rochers tranchants comme des lames de couteau. Ses doigts en sang agrippaient la falaise par les prises les plus infimes. Les muscles de ses mollets vibraient comme des cordes pincées, et les acides lui brûlaient les bras, bien qu’il n’eût aucun souvenir de s’être épuisé.
Comment était-il arrivé ici ?
Il n’avait pas la réponse, il ne savait pas grand-chose de quoi que ce fut, hormis que face à lui le mur de roche accidenté était rendu glissant par l’eau, et disparaissait au-dessus dans les bruines. Qu’y avait-il au sommet de cette falaise ? Aucune réponse ne lui vint, mais il discernait assez bien ce qu’il y avait en bas. Une crampe commençait à lui prendre la main droite, et il souleva tour à tour chaque doigt de la pierre, de la façon la plus douce possible, pour essayer d’atténuer la douleur de chacune de leurs articulations.
De longs cheveux noirs lui pendaient devant les yeux, et il secoua la tête pour dégager son champ de vision. Le mouvement faillit le faire tomber de la paroi, sur laquelle il serra les doigts plus fortement encore. Il cracha de l’eau de pluie et leva les yeux vers la bouillie grise de nuages brumeux. Était-il près du sommet ? Aurait-il été plus facile de grimper, ou bien le sol, aussi éloigné soit-il, était-il plus proche ?
Il n’y avait aucune façon de le savoir, mais il devait trancher rapidement.
Une mauvaise décision valait mieux que pas de décision, et ses options n’étaient qu’au nombre de deux. Battre en retraite vers un destin connu ou grimper vers un futur incertain. Même en n’ayant aucun souvenir de lui-même, il savait que faire machine arrière n’était pas dans sa nature. Une décision, une fois prise, devait être menée à son terme, vaille que vaille.
Il ignorait comment il pouvait savoir cela de lui-même, mais ayant pris sa décision, il savait que celle-ci était la bonne.
Il souleva sa main droite et la fit glisser le long de la falaise, à la recherche d’une prise plus haute, et en ayant trouvé une, il s’y agrippa avec fermeté. Doucement, il tendit la main gauche et s’accrocha à une fine protubérance. Il leva son pied, dont la plante nue saignait (d’avoir grimpé si haut ?) et le plaça convenablement. Il poussa et fit monter son corps, en éprouvant une puissante sensation de victoire rien que d’avoir franchi cette courte distance.
Avec une patience et une lenteur atroce, il se mut de nouveau vers le haut ; chaque geste était dangereux, et douloureux, mais accompli avec une détermination implacable à ne pas faillir. La pluie s’intensifia et fouetta son corps d’épingles glacées, comme pour chercher de façon méprisable à le déloger de la paroi.
Afficher en entier