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Mais dans l'orchestre, il n'y a pas d'espoir. Il y règne l'implacable hiérarchie des capacités, l'atroce hiérarchie des choix irrévocables, l'horrible hiérarchie du talent, la hiérarchie inébranlable dictée par les lois de la physique, qui détermine les sonorités et les fréquences, n'entrez jamais dans un orchestre !...
Afficher en entierVous savez ce que je gagne ? Impôts déduits, mille huit cents par mois. Quand on enregistre un disque, ou que je vais faire un remplacement ailleurs, je peux faire un petit supplément. Mais normalement je gagne mille huit cents, impôts déduits. C'est ce que gagne aujourd'hui un petit employé de bureau, ou un étudiant qui a un job. Et qu'est-ce qu'ils ont comme formation ? Ils n'ont aucune formation. Moi, j'ai passé quatre ans au Conservatoire Supérieur de Musique; j'ai été formé à la composition par le professeur Krautschnick, à l'harmonie par le professeur Riederer; je répète trois heures le matin et je joue quatre heures le soir, et quand je ne joue pas, il faut que je sois à côté de mon téléphone, et je ne peux pas me coucher avant minuit, et avec tout ça on voudrait encore que je travaille mes partitions, bon Dieu de bois, si je n'étais pas assez doué pour déchiffrer directement, il faudrait que je travaille quatorze heures par jour !...
Afficher en entierle public aujourd'hui se sent brimé si on ne le laisse pas applaudir tout son soûl.
Petit commentaire perso : ça c'était en 1981, aujourd'hui on en est à la standing ovation obligatoire.
Afficher en entierJ'irais même plus loin que Goethe. Je dirais que, au fur et à mesure que je vieillis et que j'avance dans la compréhension intime de la musique, plus je me rends compte que la musique est un insondable secret, un mystère, et que plus on s'y connaît, moins on est capable d'en dire quelque chose de valable
Afficher en entierEt on comprend bien ça. L’instrument n’est pas précisément maniable. Une contrebasse, c’est plutôt, comment dire un embarras qu’un instrument. Vous ne pouvez guère la porter., il faut la traîner ; et si vous la faites tomber, elle est cassée. Dans une voiture, elle ne rentre qu’à condition d’enlever le siège avant droit. A ce moment là, la voiture est pratiquement pleine. Dans un appartement, elle se trouve sans cesse sur votre chemin. Elle est plantée là… avec un air si bête, vous voyez… mais pas comme un piano. Un piano, c’est un meuble. Vous pouvez le fermer et le laisser là où il est. Elle, non. Elle est toujours plantée là… Dans le temps, j’avais un oncle qui était malade et qui n’arrêtait pas de se plaindre qu’on ne s’occupait pas de lui. La contrebasse est comme ça….
Afficher en entierLa pensée est une affaire trop complexe pour qu'on laisse le premier venu y bricoler en amateur.
Afficher en entierIl existe un petit menuet de Mozart, Kôchel 334 : à mourir de rire ! Ou encore le numéro cinq du Carnaval des Animaux de Saint-Saëns : « L’Éléphant », pour contrebasse solo et piano, allegretto pomposo, ça dure une minute et demie : à mourir de rire ! Ou bien, dans la Salomé de Richard Strauss, les cinq phrases pour contrebasse, quand Salomé regarde dans la citerne : « Comme il fait noir dans ce trou ! Ce doit être affreux de vivre dans un antre aussi sombre. Cela semble un tombeau… » Une page à cinq parties de contrebasse.
Afficher en entierEh bien, voilà. Dittersdorf, concerto en mi majeur pour contrebasse et orchestre. En réalité, il s’appelait Ditters tout court. Karl Ditters. Il a vécu de 1739 à 1799. En même temps, il était intendant des Eaux et Forêts. Et maintenant, dites-moi franchement : c’était beau ? Vous voulez le réentendre ? Je ne vous parle pas de la composition, je vous parle uniquement du son ! La cadence ? Vous voulez réentendre la cadence ? Mais elle est à mourir de rire, cette cadence ! Tout ça vous a une sonorité, mais à pleurer ! Et pourtant, c’est un premier soliste, je préfère ne pas vous dire son nom, parce qu’il n’y est vraiment pour rien.
Afficher en entierJ’ai le plaisir de changer onze fois de position de main. C’est même pas du sport, c’est de la musculation. Et sur toutes les cordes, il vous faut appuyer comme un dingue, regardez mes doigts. Tenez ! J’ai de la corne au bout des doigts, regardez, et des sillons, tout durs. Avec ces doigts, je ne sens plus rien. Je me suis brûlé les doigts, l’autre jour, je n’ai rien senti, je ne m’en suis aperçu qu’à l’odeur de la corne brûlée.
Afficher en entierIl faut dire que la femme, dans la musique, joue un rôle subalterne. Dans la créativité musicale, je veux dire, dans la composition. Elle joue un rôle subalterne. A moins que vous ne connaissiez une compositrice célèbre ? Ne serait-ce qu’une ? Vous voyez ! Est-ce que vous avez jamais réfléchi à ça ? Vous devriez y réfléchir. Réfléchir à la féminité dans la musique en général, peut-être. Maintenant, il est sûr que la contrebasse est un instrument féminin.
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