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Contrairement à ce qu’ils avaient cru. ce n’était pas une armée qui se dirigeait sur eux, mais deux. Les Aneiriens étaient poursuivis, et le Glaneur n’avait pas besoin de distinguer les drapeaux de cette seconde force pour deviner son identité. Autour d’eux, le vent qu’il avait conjure avec l’aide des deux ministres poussait des hurlements déchaînés.

— Ils sont bloqués, constata Keziah, soulagée. C’est Gershon, ajouta-t-elle devant le regard perplexe de Fotir.

— Vous êtes sûre ? interrogea le ministre de Curgh, peu convaincu.

— Je reconnaîtrais le capitaine entre mille, lui expliqua la jeune femme. Ils ont dû suivre les Solkariens depuis Kentigern.

— Alors il nous reste un espoir.

Grinsa, les yeux sur les capitaines aneiriens qui avançaient en tête de colonne, opina.

— Pour le roi et ses hommes, oui, admit-il avec un coup d’œil rapide sur les lignes de Kearney avant de revenir aux capitaines. Mais notre situation ne s’est guère améliorée.

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— Voici le jour que nous avons attendu et créé, dit-il enfin d’une voix posée mais assez puissante pour être entendue de tous. Le jour qui verra l’accomplissement de notre destin. Il y a neuf siècles, notre peuple est entré en conquérant sur les Terres du Devant. Comme vous, ils étaient prêts à mourir pour leur cause. Comme vous, ils ont offert leurs pouvoirs à un Tisserand. Ils constituaient la plus grande armée qui ait jamais marché sur ces landes, et ils ont écrasé toutes les armées eandi qui se dressaient sur le chemin de leur conquête. Ils allaient vaincre. Ils auraient vaincu sans la trahison de l’un d’entre eux.

Il considéra chacun des visages tournés vers lui.

— Carthach.

Il prononça le nom du traître qui était dans tous les esprits.

— Je ne cite pas ce nom pour rouvrir une plaie ancienne, mais pour vous rappeler combien nous étions proches de la victoire, et combien nous avons attendu la rédemption. Depuis neuf siècles, nous subissons sa trahison. Depuis neuf siècles, nous attendons d’accomplir la promesse tenue par cette première armée de Qirsi. Aujourd’hui, notre longue attente arrive à son terme. Aujourd’hui, nous allons laver notre histoire, effacer la tache que nous a imposée la trahison de Carthach. Aujourd’hui, nous reprenons le combat. À partir d’aujourd’hui, nous allons régner sur les Terres du Devant, comme nous aurions dû le faire depuis si longtemps. Ensemble, vous et moi, allons créer un nouveau monde.

Il se dressa sur ses étriers.

— Nous combattons pour la gloire de Qirsar ! cria-t-il en soulevant une formidable clameur chez ses guerriers.

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— Sois honnête avec moi, Grinsa. Tu n’as jamais connu d’autre Tisserand, n’est-ce pas ?

— Non, admit-il.

— Moi non plus. Nous partageons quelque chose d’unique. Personne n’est jamais entré dans mes rêves comme tu viens de le faire. Et de la même manière, je suis le premier à être entré dans les tiens. Tu peux le nier autant que tu le veux, mais nous nous ressemblons, nous partageons la même affinité. Même si elle est basée sur notre désir de nous tuer mutuellement, elle nous réunit.

— Nous sommes Tisserands, mais au-delà de cela, nous n’avons rien en commun. Je sais ce que tu vaux, ce dont tu es capable. Tu es cruel, arbitraire, ambitieux au-delà de tout.

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— Ce n’est rien, voulut le rassurer sa sœur, les hommes du roi peuvent les battre, même sans notre aide.

— Vous ne comprenez donc rien Keziah ? s’emporta-t-il. Ce n’est pas ce que je veux ! Arrêtez de penser comme les Eibithariens ! Ces hommes ne sont pas nos ennemis ! Pas plus que les soldats de Braedon qui se battent contre votre roi au nord ! Il faut trouver le moyen de mettre un terme a ce combat avant que l’armée de Gershon ne les tue tous.

— Comment ? demanda Fotir.

Grinsa, au comble du désespoir, secoua la tête. Déjà, les deux armées s’affrontaient.

— Je ne sais pas, avoua-t-il, vaincu.

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