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Extrait ajouté par ilovelire 2016-08-25T23:24:50+02:00

Nicolas était gêné de rire avec les autres, malgré son deuil. Certes, tous ses amis lui avaient présenté leurs condoléances à domicile. Mais, cette formalité accomplie, ils parlaient devant lui aussi librement qu’autrefois. Eût-il préféré rester chez lui pour ne pas entendre leurs plaisanteries ? Il était si bien parmi ces gens jeunes à l’esprit vif et à la langue déliée ! Assis sur des coussins, vautrés sur des sofas, l'uniforme déboutonné, le sang au visage, la pipe à la bouche, ils discutaient maintenant les mérites comparés des deux grandes danseuses Kolossova et Istomina. Chacune avait ses partisans fanatiques. Il en était de même pour les chanteuses. Quand Koz-lovsky prétendit avoir une admiration sans réserve pour la cantatrice française Dangeville-Vanderber-ghe, Kostia, qui était un adorateur de l’Italienne Catalani, se fâcha, traita tous les sopranos français d'excréments musicaux et se vit contraint d’avaler une deuxième coupe expiatoire. Les esprits s’échauffant, on en vint naturellement à la politique. Là, tout le monde fut d’accord pour condamner les tergiversations du tsar Alexandre. Il avait octroyé, l’année précédente, une sorte de constitution à la Pologne. Qu’attendait-il pour étendre ces mesures libérales à la Russie? Ne jugeait-il pas son peuple assez mûr pour jouir des mêmes droits que les voisins ? Au lieu de se relâcher, la surveillance policière s’était renforcée.

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-08-25T23:24:41+02:00

La sonnette retentit. Quatre invités se présentèrent ensemble. Tous des militaires. Ils avaient dégrafé leurs ceintures et posé leurs épées dans l’antichambre. Le plus imposant de ces officiers était Hippolyte Roznikoff, qui avait été l’ami intime de Nicolas à Paris. Devenu aide de camp du général Mi-loradovitch, gouverneur de Saint-Pétersbourg, le « bel Hippolyte » avait gagné de l’embonpoint et de l’assurance. Grand et fort, frisé, moustachu, il éclatait de rire pour un rien et prétendait que la température montait de trois degrés dès qu’il entrait dans une pièce. Avec lui, étaient venus le petit Youri Almazoff, lieutenant au régiment de Moscou, Volodia Kozlovsky, cornette aux gardes à cheval, et l’énorme Dimitri Nikitenko, qui servait dans les dragons. Peu après, arrivèrent encore le capitaine Shé-drine, du régiment Ismaïlovsky, et un homme d’une trentaine d’années, aux cheveux blonds coupés en brosse, au regard déformé par d’épaisses lunettes et au menton replet. Il se nommait Stépan Pokrovsky, se disait poète, et était employé à l’administration des douanes.

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-08-25T23:24:34+02:00

Marchant dans la rue, à grandes enjambées, Nicolas humait le parfum de la mer toute proche. Un vent vif, accourant du large, balayait la perspective Nevsky dans le sens de la longueur. Les rares passants entrevus à cette heure tardive semblaient des fantômes, des représentations abstraites, des pensées en promenade, dont les auteurs, en chair et en os, dormaient au fond de leurs lits. C’étaient les rêves des habitants de Saint-Pétersbourg qui prenaient le frais, à l'insu de leurs maîtres. Nicolas lui-même n’était-il pas un spectre déambulant dans la cité, tandis que son corps réel était resté là-bas, entre son père et Sophie ? Le fait seul qu’il pût se poser la question lui prouva qu’il n’était pas dans son état normal.

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-08-25T23:24:25+02:00

Dans la rue, Nicolas respira l’air de la nuit avec avidité. C’était la première fois, depuis trois semaines, qu’il mettait les pieds dehors. Sophie avait insisté elle-même pour qu’il se rendît à cette réunion d’amis chez Kostia Ladomiroff. N’avait-elle pas son beau-père pour lui tenir compagnie après le souper ? Ils joueraient aux échecs. Nicolas était à la fois heureux et inquiet de leur bonne entente. Connaissant le caractère entier de sa femme et de Michel Borissovitch, il doutait que l’accalmie fût durable. En tout cas, le résultat de cette réconciliation était que Sophie acceptait maintenant d’aller vivre à Kachtanovka. Elle semblait même pressée de quitter Saint-Pétersbourg. Nicolas admettait fort bien qu’elle voulût fuir les lieux qui lui rappelaient son deuil. Mais il était persuadé qu’après quelques mois à la campagne elle regretterait sa décision. A ce moment-là, il serait trop tard pour revenir en arrière. Enterrés à Kachtanovka, ils y resteraient jusqu’à la fin de leurs jours.

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-08-25T23:24:17+02:00

Et il suivit son fils avec ennui. Au bout d’un long couloir, Nicolas poussa une porte. Michel Borissovitch franchit le seuil et s'immobilisa, étonné. Dans la pénombre, il reconnaissait le lit avec son baldaquin jaune, les deux tables de nuit cylindriques, l’armoire au fronton sculpté, l'icône de la Vierge d’Ibérie, dans son coin. C’était la chambre qu’il avait occupée avec sa femme, Olga Ivanovna, peu après leur mariage. Nicolas était né ici même, vingt-cinq ans plus tôt. Pris de vertige, Michel Borissovitch sentait revivre en lui une angoisse, une joie, une fierté, dont la source était depuis longtemps tarie. L'évocation de ce passé était si précise qu’il en oubliait pourquoi il était venu. Il pensait à sa jeunesse, à des moments de bonheur, à des paroles d’amour, à des rires, à des baisers, et ne voyait pas Sophie. Soudain, il la découvrit, à travers un écran de brume. Elle était étendue à la place de sa femme, dans le lit de sa femme, avec, sur son visage, cet air de fatigue et de vaillance que sa femme avait après son accouchement. Mais, près d’Olga, il y avait alors un berceau avec un bébé à l’intérieur. Près de Sophie, il n’y avait rien. Comme elle devait souffrir de ce vide !

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-08-25T23:24:09+02:00

Il haletait de fureur. Une idée se précisait dans son cerveau. La mort du petit Serge était un châtiment divin. Le Seigneur punissait Nicolas parce qu’il avait, épousé, contre la volonté de son père, cette étrangère, cette catholique. Jamais — il en était convaincu — un pareil malheur ne fût arrivé si la mère avait été russe. Mort à quatre jours, Serge n’avait certainement pas été baptisé. Un prêtre avait-il du moins béni son corps avant l’inhumation ? Inutile de le demander. « De toute façon, il est parmi les chérubin songea-t-il. Et moi qui voulais planter un sapin pour marquer sa naissance ! » Un voile de larmes passa devant ses yeux.

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-08-25T23:24:01+02:00

Un quinquet à la flamme mourante éclairait le départ d’un large escalier de marbre. Michel Borissovitch gravit les marches, en soufflant, jusqu’au premier palier. Là, il frappa du poing au vantail. Un tonnerre secoua la maison. « Je suis fou ! pensa-t-il aussitôt. Je vais réveiller le bébé, la mère !... » Mais cette perspective l’amusait plus qu’elle ne lui donnait du scrupule. Ne recevant pas de réponse, il cogna encore. Des pas traînants se rapprochèrent. La porte s’entrebâilla. Une main s'éleva lentement, tenant une chandelle allumée. Dans ce halo surgit la face d’un domestique roux et lippu. Michel Borissovitch reconnut le serf Antipe, qu’il avait cédé à Nicolas. Les prunelles d’Antipe s'arrondirent, sa mâchoire se décrocha, il se signa le creux de la poitrine. Se fût-il trouvé nez à nez avec un fantôme, qu’il n’eût pas reculé plus précipitamment dans l’antichambre.

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-08-25T23:23:48+02:00

Il glissa les papiers entre deux boutons de sa tunique et repartit en boitant vers le poste de garde. Michel Borissovitch Ozareff s’appuya au dossier de la banquette, allongea ses jambes et ferma les yeux. Il avait mis quatre jours à peine pour venir de sa propriété de Kachtanovka à Saint-Pétersbourg, et, malgré l’incommodité du voyage, il ne sentait pas sa fatigue. Sans doute le bonheur lui donnait-il une seconde jeunesse ! Dès qu’il avait reçu la lettre de son fils annonçant la naissance du petit Serge, il avait décidé de prendre la route. Pouvait-il encore témoigner de l’hostilité à sa bru, sous prétexte qu’elle était française, catholique et qu’il avait jadis refusé son consentement au mariage ? En mettant au monde un enfant mâle, héritier du nom des Ozareff, elle s’était placée au-dessus des reproches de son beau-père. Après quatre ans de séparation, il se félicitait de l’occasion qui leur était offerte à tous deux de se réconcilier, sans que ni l’un ni l’autre eût à souffrir dans son amour-propre. Au fond, il n’avait jamais cessé d’estimer cette femme. Il s'aperçut qu’il pensait moins à son fils qu’à sa belle-fille dans l’affaire. C’était, paradoxalement, Sophie et non Nicolas qu’il avait hâte de revoir. Il tira une montre de son gousset : dix heures du soir. N'était-il pas trop tard pour tomber dans la demeure d’une jeune accouchée? Il n’avait pas jugé utile d’annoncer sa venue : la missive fût arrivée en même temps que lui. Un rire silencieux lui monta aux lèvres. « Et le petit, comment est-il ? Brun comme sa mère, ou blond comme son père ? Cet imbécile de Nicolas ne le décrit même pas dans sa lettre !» Il imagina un bébé robuste et hilare, une sorte d’Hercule enfant, étranglant des serpents dans son berceau. L’invalide rapporta les papiers :

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-08-25T23:23:37+02:00

Le cocher tira sur ses guides, les chevaux piétinèrent dans la boue et la voiture s'arrêta devant une barrière à bascule. Comme l’attente se prolongeait, le voyageur passa la tête par la portière. La nuit était fraîche, humide, imprégnée d’une fade odeur de marais. Une lanterne oscillait dans le vent, au bout de sa potence, et son reflet sautait dans les flaques. De chaque côté de la route, se dressait une guérite à rayures blanches, noires et jaunes. Une file de chariots stationnait plus loin, devant la maison du poste de garde. Des agents de l’octroi vérifiaient les chargements. Le voyageur porta les mains en cornet devant sa bouche et cria :

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-08-25T23:23:24+02:00

A ce moment, un tambourinage discret retentit derrière la porte. Une servante pénétra, pieds nus, dans le salon et dit à Nicolas que la barynia désirait le voir tout de suite. Nicolas jeta à son père un regard effrayé et partit en courant. Quand sa femme l’appelait ainsi, à l’improviste, il redoutait toujours un malaise, une crise de larmes. Mais Sophie reposait, lasse et calme, dans son lit, à la lueur d'une veilleuse. Elle avait entendu l'arrivée de la voiture et voulait savoir qui était ce visiteur nocturne.

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