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Ryan gara la Toyota contre le trottoir. À peine eutil coupé le contact qu'il vit avec effroi son frère lui tendre le bébé.

—S'il pleure, glisselui l'index plié dans la bouche. Ça le calmera quelques minutes.

—Super ! Me voilà promu tétine.

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Maggie se mit à quatre pattes et, le souffle court, tenta de s'éloigner des hommes qui se battaient. Lorsqu'elle voulut se lever, ses jambes étaient si faibles qu'elle glissa le long de la paroi telle une goutte de peinture fraîche. Elle n'eut d'autre choix que de se recroqueviller dans le coin et se contorsionner d'un côté et de l'autre pour éviter les coups, la main plaquée sur la bouche pour étouffer ses cris.

Au premier regard, elle avait senti que le grand cow-boy décharné pouvait être dangereux. Elle ne s'était pas trompée. Le sauvage en lui avait repris vie ; il se déplaçait avec une rapidité et une agilité Impressionnantes pour un ivrogne. La rage crispait ses traits burinés et ses longs cheveux noirs fouettaient l'air.

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Une fois de plus, les prix horrifièrent Maggie. Comme ils sortaient d'un énième magasin, elle demanda:

- Il n'y a pas de boutiques pour bébé moins chères, dans cette ville?

- Moins chères? Ne me dis pas que si tu m'as traîné de boutique en boutique, c'était pour me faire faire de bonnes affaires!

- Très bien. Je ne te le dirai pas.

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"L'été d'avant".

Maggie s'approcha.

Quel effet cela faisait-il d'avoir sa vie coupée en deux par un drame, un « avant » et un « après » ? se demanda-t-elle.

ilovethehost.overblog.com

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Il se retourna en s'essuyant les mains. Maggie, paraissait angoissée. Soit la perspective de la conversation la mettait mal à l'aise, soit elle craignait qu'il ne profite de leur isolement pour vouloir faire l'amour.

— Maggie, ce n'est pas parce que tu as dit que l'idée de coucher avec moi ne t'effrayait plus que je vais te sauter dessus.

— J'ai dit ça ? demanda-t-elle en clignant des yeux.

— Oui, tu l'as dit. Dans la voiture. Tu as oublié ?

— J'ai dû le dire, admit-elle en tripotant fébrilement sa couverture.

— Tu regrettes cette déclaration ?

— Non. Pour ainsi dire.

— Pour ainsi dire quoi ? Tu regrettes ?

— Non, je suis pour ainsi dire prête.

Rafe s'assit sur le lit et se prit la tête dans les mains.

— D'accord. Mais, avant tout, nous devons avoir une conversation.

Elle fit oui de la tête.

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Rafe se réveilla en sursaut. Un bref instant, il crut qu'il avait sursauté dans son rêve puis, les brumes du sommeil s'éloignant, il comprit qu'il y avait autre chose. Après deux années de trimard de wagon de marchandises en wagon de marchandises, il savait dormir d'une oreille, même ivre. Quelque chose n'était pas normal.

Il n'entendait que le bruit régulier des roues et le cliquetis de la carcasse du wagon. Repoussant son Stetson, il vit que ses quatre compagnons de voyage étaient assis contre la paroi du fond, exactement comme un instant plus tôt, sauf qu'à présent tous regardaient fixement le coin gauche.

Il s'ébroua pour chasser la dernière trace de sommeil et le rêve qui l’avait hanté, et jeta un coup d'oeil dans la même direction. Puis un second coup d'oeil ébahi. Une fille ? Il n'en croyait pas ses yeux. Se poussant du talon sur le plancher, il se redressa un peu et la regarda franchement.

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Oh oui... Les souvenirs se précisèrent. Susan portait un jean délavé et un chemisier rose, et ses cheveux dorés retombaient en cascade soyeuse sur les épaules. Son rire fusa. Rafe crut sentir l'odeur de petit garçon sain de son fils. Arrivé sur le lieu du pique-nique, il avait bercé leur petite fille afin qu'elle s'endorme tandis que Susan sortait du panier les plats préparés par Becca... et voilà qu'il retrouvait la sensation du petit corps potelé dans ses bras.

Tout était trop réel pour n'être qu'un rêve. Le clapotement de l'eau, la brise qui lui caressait la peau, les galets sous la semelle de ses bottes... les rêves n'étaient pas aussi concrets.

Pouvait-il espérer un miracle? Exauçant ses prières, Dieu lui faisait-il remonter le temps, lui accordait-il une seconde chance ? Oh oui, je vous en prie... Il n'avait besoin que d'une seconde chance. Il ne la bousillerait pas. Cette fois-ci, il donnerait la priorité à sa famille. Rien n'avait jamais eu plus d'importance pour lui que sa femme et ses enfants. Rien. Mais, absorbé par les responsabilités et les obligations, il avait omis de le traduire dans ses actes.

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Rafe Kendrick s'abandonnait au rêve qui naissait dans son cerveau embrumé par l'alcool. Gagnant en netteté, les détails prenaient des apparences de réalité confondantes. Il était assis au bord du lac et regardait sa maison, un long bâtiment recouvert de lierre. La brise lui apportait de la prairie le hennissement d'un étalon.

Ce n'était qu'un rêve, il le savait vaguement, mais aussi troublant qu'un souvenir. Il se leva et marcha le long de la rive. De petits galets bien polis roulaient sous ses pieds. Il inspira à fond, retrouvant avec émotion le clapotement apaisant de l'eau et tout ce à quoi, naguère, il ne prêtait guère attention : l'odeur des sapins, des prairies, de la terre grasse que réchauffe le soleil, et l'air toujours frais, même en été, à cause de l'altitude.

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