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ABé, favoris du pernesse,
Toi ! dont les entretiens charmans
Adoucissoient les sentimens
De ma l’étargique tristesse :
Pourquoi ? N’est-tu plus près de moi,
Ou pourquoi suis-je loin de toi.
Sans t’accuser, Abé que j’aime
De ce facheux éloignement,
Je ne devrois assurément
N’en vouloir ici qu’à moi-même.
Né, pour l’aimable liberté,
Jamais, la triste dépendance,
Sous couleur de felicité
N’auroit fixé mon inconstance ;
Si j’avois connu tout le prix,
Et prêté l’oreille aux avis
De ta savante experience.
Mais peu certain de mon panchant,
Trop jeune pour être prudent,
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Trop aveuglé pour me connoître,
Conduit, jusqu’au dernier moment,
Moins par raisons, que sentimens ;
Etoit-il en moi d’être maître
D’en décider tout autrement.
Captif enfin, loin de tes yeux,
Sçais-tu encor que je respire,
Et que sous de farouches Cieux
Moitié gai, moitié malheureux,
Mon Apollon sçait encor rire,
Et sçait encor à des doux jeux
Accordez les sons de sa lire.
Pour te tracer en peu de mots ;
Le Tableau de mon Hermitage,
Je suis chez un Peuple dévot
Non loin du Belgique Rivage :
Là dans un Bois triste & affreux,
Parmi dix Moines vénérables
Dont les faces indéclinables,
N’ont qu’un aspect très-douloureux,
C’est dans ce Canton solitaire ;
Loin de tout Fardeau populaire,
Que je goute mes sentimens ;
Et dans ma sombre solitude,
Je me fais amis une étude
D’en polir les égaremens.
Là toujours pleins de tes maximes,
Amoureux du blond Dieu des vers,
J’oublis l’ennuis & l’univers,
Dès qu’il m’inspire quelques rimes.
Là, tantôt dans le fond du Bois
Aussi tendre que Philomelle,
J’y gémis Abé quelquefois
Dans le goût de la Tourterelle ;
Ne croit point que ces doux soupirs
Ont pour objet une Climene,
Non, l’inconstant Dieu des désirs,
Ne me couta jamais de peine :
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