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La voiture traversa la forêt et s’engagea sur un chemin de campagne pour rejoindre la route, roulant à vitesse modérée, paisible, pour éviter d’éveiller les soupçons. Au moment où elle se fondit dans la circulation, en direction de la ville, il chantonnait : « My funny Valentine ».
Il pensa au dernier nom qui restait sur sa liste. Il cessa de chanter pour prononcer ce nom dans un souffle, à plusieurs reprises, puis ce souffle devint murmure, et le murmure un cri qui emplit la voiture, tinta dans ses oreilles, résonna à travers la nuit glaciale…
Afficher en entierDebout devant le lit, il la regardait. Il se souvint d’une autre fois, de la première fois où il s’était tenu, comme ça, nu devant une femme. La musique. La boîte à bonbons rose en forme de cœur qu’il serrait contre sa poitrine. Ses jambes et ses bras longs, pâles, maigres, tremblant dans la pièce froide ; son esprit engourdi par le désir ; et la chose, grosse, rigide, dressée entre ses jambes au milieu d’une toison frisée. Il avait attendu ainsi dans le noir, le désir, la peur et l’avant-goût du plaisir se mélangeant dans son sang, le figeant sur place.
Puis, en un instant rapide, aveuglant, les lumières s’étaient rallumées.
Afficher en entierIl se dirigea vers la chaise sur laquelle il avait laissé ses habits, dans un coin. Il enfila sous-vêtements, chaussettes, jean, chemise, chandail, bottes, puis il mit son écharpe, ses gants, sa casquette et sa veste de cuir. Il quitta la chambre et descendit l’escalier couvert d’un tapis jusqu’au rez-de-chaussée. Il traversa le salon et la véranda, dévala les marches du perron. L’herbe gelée craquait sous ses bottes tandis qu’il marchait vers sa voiture. Il ouvrit le coffre, prit deux grands jerricanes rouges en plastique et retourna vers la maison.
Il laissa l’un des jerricanes par terre, derrière la porte d’entrée ; l’autre, il le monta dans la chambre.
Afficher en entierUne deuxième vague de plaisir, plus grande encore, le submergea, tandis qu’il scrutait dans le noir la silhouette nue sur le lit. Elle gisait sur la couverture de satin, jambes et bras étendus, son charmant visage et sa chevelure roux cuivre en partie recouverts par l’oreiller dont il s’était servi pour l’étouffer. De là où il se trouvait, on aurait pu croire qu’elle avait été décapitée. Et pourtant, non : ce n’était pas ce qu’il avait prévu pour elle. Il lui avait réservé un tout autre sort. Il avait préparé son coup longtemps à l’avance.
Afficher en entierQuand il fut certain qu’elle était morte, il se leva et s’approcha de la fenêtre. Tout nu dans l’obscurité, il regarda la cour devant la maison et, plus loin, les formes noires des grands conifères qui bordaient la propriété. L’ampoule de la véranda répandait une faible lumière jaune faisant scintiller la mince couche de givre qui recouvrait l’herbe. Il gelait dehors, mais la petite chambre à coucher était chaude et douillette. Encore plus chaude maintenant, pensa-t-il, après l’amour.
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