Extraits

Le meilleur café du monde pris en face d'un idiot est le pire jus du monde.

Par la fenêtre, deux femmes en blouse blanche fumaient leur cancer.

Bref ! Ne pas aimer le café est un tour de force qui vous condamne au thé, ou pire encore, au coca.

La réussite perturbe les bienpensants.

Contrairement à l'alcool, le café est synonyme de travail, de plein d'énergie et il s'identifie comme le combustible des grandes manœuvres, ou alors il est considéré comme le grain de folie essentiel à la sensibilité des créateurs.

Les prestigieux accouraient dans ce salon de café, on s'y régalait de chocolats, de liqueurs, de tiramisu, de café liégeois et évidemment de mille sorbets. Mais les dames ne s'y aventuraient pas, stoppaient leur carrosse devant et leurs laquais de pied leur rapportaient le précieux dans de fines tasses de porcelaine ou d'argent. Exit la turquerie, place au grand couvert, tel était le crédo de Procopio l'ingénieux qui avait vu juste.

Bien sûr c'est long, mais le résultat en vaut la chandelle. J'obtiens aussi de bons parfums avec une cafetière à piston, où les arômes s'épanouissent. Le problème de la cafetière-filtre, c'est qu'elle va souvent trop vite et que la mouture n'est pas assez humidifiée. L'expresso,lui, a tendance à concentrer le goût et les arômes dominants sans donner le bouquet et à la profondeur olfactive de l'ensemble.

- Des foutaises ! C'est fou, les croyances qui s'accrochent à vous durant des siècles. Et d'où vient le mot “kawa” ?

- Cela veut dire « celui qui ravit, ce qui incite à l'envol ». Je te lis les divers noms donnés à la fève avec l'orthographe précise : café, cavé, caffé, cavet, cahué, cavéan, chaubé, chana, cahueb, qahwah, cahuah, kaweb, qishr… et bunchun par les Abyssins. Le tout se résume par les mots « force, vitalité, revigorant, élan et bon ». Cahouah veut dire en arabe « boisson qui coupe l'appétit », et kahwa, «être rôti à la poêle».

Le vrai talent de Johanna est de transformer les heures en minutes, parfois en secondes, souvent en poésie, et tout le temps en chanson.

Ses mots sont des milliards d'aiguilles plantées dans le gosier de notre société. Comme si le magazine Causette étreignait Le Canard Enchaîné.

Elle est du genre moulin à paroles excentrique, fofolle à l'humeur contagieuse, de celle qui donne envie de chanter avec elle son vaste et délirant répertoire.

Pétillante, elle est une bulle de champagne entreprenante et attachante, une baffe et une caresse, le prototype même de la copine dont la seule présence à une soirée assurera l'ambiance.

Elle est aussi gaffeuse, acidulée, féministe, gourmande, menteuse, loufoque et généreuse, donc irrésistible.

Je suis non-voyant. Oui, un de ces types qui ne sait pas où il met ses deux pieds. Pour moi c'est un détail même si pour vous cela veut dire beaucoup de limites. Non, cela ne se voit pas, non je n'ai pas de fidèle labrador, oui mon regard est normal. Un peu fixe tout de même. Et les lunettes noires dans ma poche, c'est pour le folklore. On imagine toujours qu'un non-voyant est un condamné au cachot du château d'If de Monte-Cristo, un malade à vie avec une existence limitée à un espace confiné, et que sa destinée ne peut s'envisager sans l'aumônerie des rois voyants.

En vrai, nous sommes dans une société inadaptée à ceux qui ne sont pas valides à 100%. Quand je pense aux deux seules institutions pour cent mille aveugles en France et aux deux ans d'attente pour une place, je suis en colère.

Vivre dans le noir, galérer pour s'habiller, se laver, repérer les étages ou poser correctement sa simple tasse de café sur une soucoupe, oui, ce n'est pas simple de tâtonner et d'écouter seulement. Notre seul ennemi, c'est l'isolement et les imbéciles qui se posent la question de savoir comment on dit bonjour à un aveugle. Je déteste ce cliché. Moi, je me trouve normal, donc pas souffrant. Sauf qu'avec 0,15 sur l'œil gauche et 0,35 sur l'autre, je ne pourrai jamais être photographe ou tireur d'élite.