Extraits

Information angélique n°72 : si Abaddon ne t'intéresse pas, élimine le péché.

Information angélique n°6 : Même si les mots sont préférables, les poings sont autorisés.

Information angélique n°34 : tous les Plumables doivent gagner leurs ailes.

Information angélique n° 1000 : La taille et la brillance des ailes ne sont pas des mesures de la valeur d'un être.

Arden se glissa derrière ma soeur, qui s’était agenouillée et avait posé le dos de sa main contre le sol, une fraise dodue reposant sur sa paume. Apa s’accroupit, de sorte que le félin frémissant était au niveau des yeux de ma soeur. L’animal renifla à nouveau, plus courageux cette fois. En gardant une main sur son dos, Apa le posa à côté de celle de Lyla. La créature attrapa la fraise et la déchiqueta comme s’il s’agissait d’une proie vivante. Lyla tendit la main et caressa sa petite tête.

L’animal se figea, le jus rose s’écoulant de son museau.

— Bonjour, Nitznootz.

— Nitznootz ? répétai-je à Ama.

— Ça veut dire scintillant en angélique, murmura-t-elle.

Lyla et Tobias l’ont trouvé ensemble.

— C’est mignon.

— Je n’arrive toujours pas à croire qu’il ait réussi à piéger un haccoul. Mimi doit être tellement jalouse.

Mimi était la mère de substitution d’Ama, la Moreau originale, une âme que je n’avais pas encore rencontrée, mais que j’aimais déjà. Je ne pouvais pas l’expliquer, cependant chaque fois que je pensais à elle, comme maintenant, une odeur de cookies me parvenait.

J’avais souvent la manie d’associer des parfums à des sentiments. Le sucre et l’amour. Le vent et la liberté. La pluie et le chagrin. Même le figuier solitaire dans le coin de la cafétéria provoquait un sentiment en moi - le chagrin d’amour.

J’avais beau essayer de me rappeler l’origine de celui-ci, je n’arrivais pas à mettre le doigt sur ce qui, dans cette douceur minérale, faisait battre mon coeur. Il y avait eu une période de plusieurs semaines pendant laquelle Apa était coincé à Elysium à cause du travail quand j’avais l’âge de Lyla. Peut-être avais-je attendu trop souvent qu’il revienne sous cet arbre ?

Avant qu’il ne puisse m’aider à disséquer ce qui n’allait pas dans ma relation - Apa n’aimait rien de plus que les affaires de coeur – je lui parlai de mon pécheur actuel.

L’emploi de ce mot fit fléchir son sourire et déclencha un plaidoyer discret pour la compassion envers les humains.

— Certains humains ne méritent pas de compassion, Apa.

— Tout le monde mérite de la compassion.

— Même les Triples, Apa ?

Il resta silencieux pendant une minute entière.

— Ça dépend de leurs péchés. Mais oui, Adam, même eux méritent de la compassion.

— Et les nephilim ?

Sa gorge se noua alors qu’il levait les yeux vers la fresque qui ornait le plafond, peinte par un homme qui avait renoncé à ses ailes parce qu’Elysium n’avait pas voulu écouter sa demande d’élever des enfants au pays des anges avant la cérémonie de l’ossature d’ailes.

Ramenant son regard sur moi, Apa murmura :

— L’absence d’ailes ne signifie pas l’absence de coeur.

Mon père était compatissant à l’excès. Mes deux pères l’étaient, cependant Apa était le genre d’homme qui pardonnait avant même que l’offenseur ait commencé à formuler des excuses.

M’éloigner d’elle la nuit dernière avait été douloureux. La voir s’éloigner de moi à ce moment-là… me déchira l’âme.

Naya n’était pas belle, elle était magnifique. Et mienne.

- Je commence à me demander si tu n’as pas été faite pour moi.

Son murmure emplit mon estomac d’hirondelles et mon sang de leur chant.

- Parce qu’il n’y a aucune chose en toi que je ne trouve pas captivante.

Ce n’étaient que de jolis mots, mais par Elysium, comme ils étaient doux sur ma peau.

- Je me suis entiché de toi, Naya.

Il posa son front contre le mien.

- Depuis qu’on s’est rencontrés, je ne vois que toi. Je ne pense qu’à toi. Et ça me rend complètement fou, parce que je ne sais pas comment arrêter ça.