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Gabriel était là pour son journal. Il était venu dès l'annonce d'une grande découverte entre les pyramides de Gizeh. Des tombeaux de personnages importants et même de reines avaient été découverts. Les archéologues suisses et allemands étaient intarissables sur la signification d'une pierre, d'une suite de hiéroglyphes gravés dans les endroits les plus inattendus. Il faisait dans ces trous creusés dans le sable une épouvantable chaleur. Le reportage n'avait pas été très intéressant. Il avait tout noté de ce que disaient les chercheurs ravis de sa visite et passionnés par leur sujet. Maintenant, il se laissait emporter par la foule, prenait au hasard des ruelles étroites et souvent en contre-jour, s'arrêtait devant de minuscules échoppes ou sur le seuil de belles maisons grecques. Gabriel ne pouvait manquer le musée et sa façade de brique rose essayant de se dissimuler derrière de maigres palmiers poussiéreux. Là s'entassaient dans un étonnant désordre des figurines, des momies de toutes sortes, des outils aux manches ornés d'or témoins de civilisations singulières, lointaines certes, mais proches aussi dans leur message d'éternité. Il alla vers le centre culturel français où il était attendu.
Afficher en entierLa tramontane s'était levée dans la nuit. Le vent soufflait sur le sol dénudé par l'hiver, sifflait entre les branches et sur le rebord du toit. Ce sifflement tenait à la fois du chant secret de la terre et du hurlement des loups, de la plainte de tous les réprouvés du monde. Gabriel en avait la chair de poule. En plus, il avait froid et hésitait à quitter la protection de la couverture pour ranimer un feu anémique dans la petite cheminée.
Un coup de vent plus fort que les autres balaya le sol et entrechoqua des objets restés dehors. Cette fois, il crut entendre des claquements de dents, des ricanements, des malédictions. Ce déchaînement avait-il une raison ? Était-ce un signe pour son retour ? Il essaya de se replonger dans le sommeil. De suivre le rêve d'où il venait d'être enlevé.
Il s'y sentait bien. Il marchait tout simplement dans une rue du Caire, comme il y avait quinze jours à peine ; des hommes étaient attablés à de petites tables de fer installées sur le trottoir et regardaient les passants d'un air blasé. Lui, il était attentif à la foule bruyante, un peu folle, bienveillante, aux visages qui portaient les traces de toutes les civilisations de la Méditerranée depuis plusieurs millénaires. Il y avait des silhouettes de femmes voilées, toujours aussi cocasses dans leur étrange volonté, mais aussi de jeunes étudiantes en jean, des fonctionnaires nombreux en costumes malgré la chaleur insinuante, des touristes attentifs et plutôt indécis toujours prêts, semblait-il, à critiquer.
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