Extrait

Hilary, l’aide-soignante de sa mère, partait sauf exception à quatre heures et demie et Leslie essayait de rentrer juste après six heures. Ce soir, ce fut plutôt vers six heures vingt, à cause de la pluie battante qui l’avait ralenti sur son trajet. On était jeudi, l’une des deux soirées de sortie qu’il s’octroyait, mais si cela ne se dégageait pas, à quoi bon, se demandait-il ? Qui serait dehors, par un temps pareil ?

Il ouvrit la porte d’entrée.

Hilary laissait toujours la lumière du perron allumée pour lui, et la bouilloire pleine et prête à l’emploi. S’il voulait qu’elle s’occupe d’autre chose, lui peler des pommes de terre ou lui mettre quelque chose au four à feu doux, il lui suffisait de laisser un mot en ce sens et elle le faisait volontiers. Pourtant, il lui soumettait rarement de telles demandes. Elle était l’aide-soignante à domicile de sa mère, pas une aide ménagère. Hilary et lui ne se croisaient quasiment jamais, mais communiquaient, si besoin était, en échangeant de petits mots – les siens, toujours enjoués et ornés de visages rigolos, de petites étoiles ou de fleurs dessinées au crayon. Il avait de la chance. Il avait entendu des histoires au sujet d’une autre espèce d’aides à domicile – la secrétaire du bibliothécaire en chef avait connu quelques expériences déplaisantes avec les aides-soignantes de sa mère, des femmes qui se montraient brusques ou même carrément cruelles, et l’une d’elles était une voleuse. Hilary était de toute confiance, forte, joyeuse, fiable. Leslie savait reconnaître sa chance quand elle se présentait. Norah Blade n’était pas compliquée, mais une arthrite rhumatoïde aussi méchante que la sienne ne favorisait guère une humeur égale.