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Durant leur séjour dans le Zijincheng, la vie des dames de cour se déroulait tout entière derrière les hauts murs au crépi écarlate. Les yan, les eunuques, pouvaient, eux, être amenés par leurs maîtres à accomplir certaines missions hors du Palais impérial. Ils n’avaient toutefois pas le droit, sous peine de mort, de s’éloigner de la Capitale du Nord.
Et le souvenir du sort du castrat An Dehai aurait dissuadé quiconque aurait voulu s’aventurer plus loin. Cet eunuque avait été, jadis, l’un des serviteurs préférés de Tseu Hi. Il était de notoriété publique que An Dehai avait même aidé l’intrigante impératrice à vaincre les comploteurs qui avaient tenté de la tuer, elle et son fils, le prince impérial Tongzhi4, après la mort de son époux, l’empereur Xianfeng.
Afficher en entierSurtout, la dame d’honneur ne voulait pas quitter le jeune eunuque3 Zhaoer, Petit Brillant, le garçon qui partageait quelques doux instants avec elle depuis qu’elle avait pénétré dans la Cité pourpre. Certes, les deux jeunes gens étaient contraints de se satisfaire de caresses inabouties, car l’eunuque n’avait guère le choix de ses gestes amoureux. Mais Sourcil de paon, à cause de ses ignorances et de ses peurs, et aussi parce qu’elle aimait sincèrement le castrat, avait depuis longtemps accepté de se contenter de cette union imparfaite.
Afficher en entierMeique, Sourcil de paon, une jeune Mandchoue, était née l’année 1883, l’année guiwei, symbolisée par le mouton. Elle allait bientôt fêter son vingt-deuxième anniversaire, selon le décompte chinois. Sourcil de paon était entrée pour la première fois dans la Cité pourpre interdite à la fin de l’année 1895, l’année yiwei, dédiée au singe, huitième année1 du règne de l’empereur Guangxu2. Selon les règles en vigueur à la cour depuis le temps des empereurs Ming, la jeune fille aurait dû, quelques hivers plus tard, se séparer de sa maîtresse, Jin, la concubine de jade, et quitter à jamais le palais impérial afin de se marier. Les prétendants ne manquaient pas : officiers mandchous ou mandarins chinois se seraient empressés d’épouser la suivante, fraîche et gracieuse, désormais initiée aux raffinements inouïs dont se parait une cour décadente, obsédée par le respect du protocole.
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