Extrait

- Où est ton homme ?

Pour une fois, Jo regretta de ne pas en avoir un.

- Il n’y a pas d’homme. J’habite seule.

- Quand reviendra-t-il ?

- Il ne reviendra pas. Je vous l’ai dit, il n’y a pas d’homme ici. C’est ma propriété.

L’Indien semblait furieux.

- À toi ? Toute seule ?

Jo hocha la tête. L’Indien se retourna vers les siens et leur parla dans sa langue.

Certains sourirent, d’autres éclatèrent de rire.

- C’est amusant comme tu mens, lança-t-il à Jo. Mais pourquoi?

- Je ne mens pas. Je m’appelle Joline Masters et je me suis installée ici. C’est mon terrain. Je ne vous ai fait aucun mal, alors si vous désirez m’attaquer, vous le ferez sans honneur, à moins que votre peuple ne considère honorable d’agresser une femme seule.

Elle prit une profonde inspiration pour se donner du courage.

- Je sais comment utiliser cette arme. Je ne vous tuerai pas tous mais j’en aurai quelques-uns. Je mourrai en combattant, comme vous le feriez, vous et vos guerriers.

L’Indien était surpris. Il regarda la carabine et la taille de la jeune femme qui la pointait sur lui.

- C’est la première fois que je rencontre une femme blanche qui ne s’enfuit pas en hurlant de peur et en nous insultant.

- Pourquoi m’enfuirais-je? Vous pourriez facilement me rattraper. Je préfère ne pas mourir en lâche.

Avec un froncement de sourcils, il parla de nouveau à ses hommes. Ils la regardaient d’un drôle d’air.

- La peau d’ours, dit-il soudain. Il doit y avoir un homme ici. Quelqu’un a tué le grand ours. C’est très honorable de tuer un grizzly. Le guerrier qui le fait en tire grand respect.

Jo se redressa.

- C’est moi qui ai tué l’ours. Et quand j’ai pris sa viande, j’ai remercié son esprit.

Il dit quelque chose aux siens sans la quitter des yeux. Tous hochèrent la tête en grommelant. L’un brandit sa lance et lâcha un cri de guerre qui la fît sursauter. Elle n’avait pas compris que c’était un cri poussé en son honneur.