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Tu sais, avant, je travaillais aux urgences de l'hôpital. J'ai souvent vu arriver des femmes dont le compagnon était " assez jaloux". Toutes me racontaient un scénario identique : après des mois d'amour-passion, il commençait à leur dicter leur façon de s'habiller, vérifiait leurs allées et venues, leurs fréquentations, leur compte en banque. Ensuite, si elles ne se pliaient pas à ses exigences, elles finissaient par " tomber dans l'escalier" ou "se cogner la tête contre l'angle du buffet"
Afficher en entier— Je te parie que ça ne marche pas. Regarde, il y a écrit : Contribue à une perte de poids dans le cadre d’un régime hypocalorique. D’après toi, qu’est-ce qui fait maigrir, hormis un régime hypocalorique ?
— On se calme, les enfants, intervint Joey, qui n’était guère plus âgé qu’Emmie, cinq ans tout au plus.
D’ailleurs, aucun des salariés de l’agence ne dépassait la quarantaine. Où étaient donc passés les quinquas qui travaillaient dans la pub ?
— Bref, reprit Joey, nous avons besoin que la présence sur Internet soit la plus large possible et de toucher les réseaux sociaux qui ciblent les filles jeunes, soucieuses de leur physique. Et je veux une campagne d’influenceuses qui déchire, évidemment. Donc, on part sur la ligne : « Je me sentais trop grosse, je haïssais mon corps. Cette petite gélule a été la solution pour éliminer mes kilos en trop. Aujourd’hui, j’ai le corps et l’homme que je mérite. » Basique.
— Tu plaisantes, j’espère ? riposta Emmie. Tu veux culpabiliser encore plus des jeunes femmes qui se détestent déjà, à cause d’une image phallocratique de la beauté répandue dans les médias ?
— Désolé de t’avoir blessée, dit Joey qui lui, semblait terriblement offensé, mais c’est notre boulot, non, de mettre en lumière un problème et d’y apporter une solution ? On nous paie pour ça : vendre du rêve.
— Ce n’est pas vendre du rêve ! protesta Emmie. C’est monnayer de la honte et de la frustration. Vraiment, Joey, je me sens mal à l’aise par rapport à cette campagne.
— Emmie, soupira-t-il, pourquoi as-tu décidé de travailler dans la pub si tes principes sont à ce point rigides ? Bon, d’accord. Étant donné que je ne veux surtout pas t’entendre saouler notre meilleur client avec tes leçons de morale, tu t’occuperas de l’autre annonceur, celui qui vend du dentifrice, et Sophie te remplacera. Dieu merci, elle se montrera moins… moins…
Emmie se prépara à encaisser l’adjectif abhorré que Joey utilisait systématiquement pour mettre un terme à leurs confrontations.
— …moins chichiteuse.
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