Extraits

Le premier rayon du soleil transperça l'horizon. Il frappa la Gargouille. Dans un dernier effort pour vaincre le destin, il tendit la main vers son aimée, esquissant un cri muet. Mais ses plumes perdirent leur éclat, ses ailes se replièrent, sa main tendue se figea à quelques centimètres d’elle. Une larme de cristal coula lentement sur sa joue avant de se briser au sol en milliers d'éclats. Trop tard

Elle était consciente de sa chance d'être aussi bien entourée à une époque où la plupart des couples étaient divorcés et où le terme de famille ne signifiait plus grand chose. Mais parfois, le destin était injuste envers ceux qui avaient tout pour fonder un foyer heureux : Les Sinclair n'avaient jamais pu avoir d’enfant. Un problème médical avait rendu Marie stérile, la privant de ce bonheur. Le kiné, pour sa part, avait refusé toute solution alternative. Alors ils avaient décidé d'adopter un orphelin, sans résultats jusque-là. Avec les années Sarah avait fini par combler ce manque et ils s'étaient attachés à elle comme si elle était leur propre fille.

Sarah soupira encore, impatiente de rentrer afin de coucher sur papier les souvenirs merveilleux de sa soirée. Elle porta son regard sur son père, si concentré, si sérieux, qui conduisait tranquillement sur la route déserte en cette nuit sombre et pluvieuse. Il devait être 23h et ils rentraient tous les quatre d’une soirée à l’opéra.

— Mis à part le beau garçon, ça t’a plu, ma belle ? demanda Marie.

— Oh, oui, c’était génial ! C’est dommage qu’on ne comprenne pas ce qu’ils disent mais la musique est si parlante qu’au fond, on s’en fiche.

Marie allait répondre lorsqu’un violent crissement de pneus retentit. Le choc fut si violent qu'il pulvérisa les deux voitures et leurs passagers. Seule Sarah survécu ce soir-là.