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Avant de parler à ma mère, je n’avais pas réalisé à quel point cette éventualité était restée dans un coin de ma tête durant des mois. Ce que je veux dire, c’est que si quelqu’un m’avait demandé quelques jours plus tôt si j’avais l’intention de lui en parler, je lui aurais demandé s’il plaisantait. Pourtant, maintenant que c’était fait, je me rendais compte que je n’aurais jamais pu laisser couler. Maintenant que c’était fait, c’était comme si j’avais enfin vidé le sac que j’emportais partout avec moi.
D’un autre côté, par contre… bordel.
Je n’avais pas réalisé non plus qu’une partie de moi espérait simplement que ma mère dise : « Ne dis pas de bêtises, mon chéri, bien sûr que papa est ton père ». Parce que c’était ce que les mères font, n’est-ce pas ? Elles mettent un pansement, embrassent leur enfant et tout va mieux.
Apparemment il n’existait pas de pansement aussi grand.
Afficher en entierDave est tellement hétéro qu’on ne le qualifierait même pas de gai luron s’il était en train de danser dans une parade, et pas le genre « tapette » (ses dires) mais c’est un type bien.
Afficher en entier- Peut-être que ça n'est pas le cas. Peut-être qu'elle est seulement là pour la soutenir moralement.
- Quoi, elle ? Si Harry s'appuie sur elle, elle va se casser en deux.
- J'ai dit la soutenir moralement, pas lui servir de fichue béquille, souligna-t-il en me regardant d'un air suffisant du haut de son mètre quatre-vingt-huit. J'aurais cru que tu serais bien placé pour savoir que l'habit ne fait pas le moine. Petit ne doit pas automatiquement signifier faible.
- Ouais mais si elle pèse plus de quarante-cinq kilos toute mouillée, je suis combattant de sumo.
- Je ne te le conseillerais pas. Ces couches ne vont à personne.
Vous voyez, c'est comme ça que je savais qu'il m'aimait. Parce qu'il n'avait pas ajouté : « surtout sur un cul minuscule comme le tien ».
Afficher en entier— Mm, non, en fait, continua mon ami d’un air songeur. Je le comparerais à un liseron. Tu sais, si tu le déracines en tirant dessus n’importe comment, il prend le dessus sur tout ton jardin. Mais si tu en prends soin, il fleurit.
— Nan, il est bien, Phil, intervint Darren. Ce n’est pas parce qu’il n’est pas tactile que rien ne le touche, dit-il en m’adressant un regard dur. Il est comme une pomme. Dur à l’extérieur, il a l’air coriace mais prend facilement des coups. Il faut faire attention à ne pas lui en donner.
Afficher en entierJe m’étais toujours demandé ce qu’il faudrait à Phil pour qu’il perde son sang-froid – sauf lorsqu’il voyait que ma vie était en péril, mais traitez-moi de vaniteux, j’aime me dire que cela va sans dire. Et maintenant je le savais : c’était une femme grande et mince de soixante-dix ans environ sans une trace de maquillage, les cheveux gris stylés en boucles rigides et son gilet boutonné jusqu’au cou. Mieux connue sous le nom de maman.
Afficher en entierDave fronça les sourcils.
— Comment ça fonctionne, alors ?
Je le regardai longuement de côté.
— Bah c’est comme toi et moi. On est potes.
— Ouais, mais je ne suis pas une pédale.
— Et alors ?
Dave gigota sur le divan.
— Eh bien… c’est genre, toi et moi, OK, ça ne va jamais arriver. Pas vrai ? Parce que je suis hétéro.
— Ouais, répondis-je avec précaution.
— Mais lui et toi, c’est différent, pas vrai ? C’est toujours là. En arrière-plan.
— De quoi ?
— Bon sang, tu sais. Le sexe.
Je le dévisageai.
— Non, ça ne l’est pas.
— Arrête tes conneries. Tu es gay, il est gay. Rien ne peut vous en empêcher, pas vrai ?
Afficher en entier— Oh quoi, je suis… l’ange de la mort, c’est ça ?
Il fit la moue.
— Noooon… Tu es plutôt un héraut.
— Si tu le dis.
J’avais comme l’impression que son explication n’allait pas me plaire.
— Un messager. Un signe annonciateur de mort, précisa Gary, puis son visage s’illumina. Tu es un banshee !
— Oh. Je ne suis pas un fichu banshee. Je débarque après les faits et je trouve des choses, c’est tout. Et il n’y a pas de plaintes non plus.
Il haussa les épaules.
— Je dis seulement que tu as l’air de passer beaucoup de temps en compagnie de cadavres, voilà tout.
Afficher en entierJe me tins immobile, ouvris mes spider-sens, et écoutai.
Je manquai de tomber sous la force des vibrations qui me frappèrent à la poitrine.
Je ne pouvais pas croire que j’avais été tranquillement assis dans le bar à boire une pinte sans me douter de rien. Comment avais-je fait pour bloquer quelque chose d’aussi fort ? Il y avait de la culpabilité et de la colère… de la peur aussi.
Afficher en entierSur la plupart des photos se trouvait Carey, seul, regardant directement vers l’objectif et souriant comme s’il n’avait pas le moindre souci au monde. Il n’avait pas trop l’air de poser contrairement aux gens qui prennent ce genre de clichés, et semblait amical et détendu. Si je n’avais pas entendu Marianne nous raconter ce dont il était capable, je n’aurais jamais cru que ce type pouvait faire ce genre de choses.
Peut-être qu’il était devenu spécialiste pour pousser les gens à baisser la garde à son contact. Mais il y avait aussi une photo avec Marianne, et celle-ci était un peu plus révélatrice. J’aurais parié qu’il avait été pris par surprise. Il y avait une lueur froide dans ses yeux, et son bras autour des épaules de Marianne avait l’air d’être un peu trop serré pour être confortable.
Afficher en entierIl demanda à Marianne de lui dire tout ce dont elle se souvenait qui, en gros, se résumait à un nom : Alan Mortimer, le nom et la position approximative de l’entreprise qu’il avait gérée avant de partir en vacances forcées aux frais de Sa Majesté – ça avait à voir avec l’importation de biens électroniques, ce que Marianne pensait aussi être les affaires de Carey bien qu’elle soit un peu vague sur les détails – et quelques dates.
Elle avait seize ans lorsqu’elle avait commencé à fréquenter Carey. Seize ans, et elle habitait seule dans un taudis londonien et se tuait au travail dans un café pour boucler ses fins de mois. Doux Jésus.
La dernière chose qu’elle fit avant de partir fut de donner d’autres photos de Carey. Je ne les regardai correctement qu’une fois qu’Harry et Marianne eurent dit au revoir, eurent de nouveau serré la main – cette fois avec moi aussi, sauf pour Marianne qui me donna un baiser parfumé de son baume à lèvres à la cerise sur la joue – et partirent. Puis je m’assis sur le divan avec Phil pour bien tout décortiquer.
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