Extraits

J’étale ma mauvaise foi comme un breton du beurre salé sur sa tartine.

Je me suis forgé une carapace si épaisse que je laisse peu de gens entrer dans mon cercle de proches. Détester est tellement plus facile qu’aimer.

Je m’attarde sur mon débardeur noir échancré et mon short en jeans ras-les-fesses, sur l’encre sur ma peau. J’admets volontiers que je n’ai pas le look d’une policière.

j’ai grandi avec des parents qui pensaient qu’avoir un couteau sur soi est toujours utile. Le mien sert plus souvent à couper des personnes que des aliments, certes, mais je ne suis pas épicière, moi.

On s’y fait : à partir du moment où on accepte que les lois, ici, ça s’apparente au code des Pirates. Elles sont plus considérées comme de vagues recommandations que de véritables obligations.

— [...] On sera plus efficaces si on se sépare et je serai plus discrète, toi tu attires trop les regards.

— Tu portes une robe rose pétard et c’est moi qui suis pas discrète ? je m’indigne.

— Ça n’a rien à voir. Je t’assure que je suis la fille banale dont tout le monde oublie la présence, robe rose ou pas.

Je ne suis pas convaincue, je n’ai jamais rien remarqué d’exceptionnel chez moi, à part mon mauvais caractère.

— J’ai faim.

— Est-ce qu’il t’arrive de ne pas avoir faim ?

Je regarde Lepinay comme si elle était demeurée.

— Ben oui, quand j’ai mangé !

— Putain, t’as vu l’heure ? ronchonne mon téléphone.

— Nope ! Vu la couleur du ciel, je dirais un truc entre 10 heures du soir et 6 heures du matin ?

— C’est 2 heures du matin, Lilith ! 2 heures !

J’éloigne un peu l’appareil de mon oreille pour m’éviter une perte d’audition.

— O.K., désolée, je raccroche.

Un grognement plus profond que les précédents, preuve de l’agacement renonciateur de Gàrri, retentit.

— Maintenant que tu m’as réveillé, t’as intérêt à me dire pourquoi si tu veux pas que je t’étrangle !

Je choisis de ne pas lui faire remarquer qu’il ne peut pas étrangler à travers un téléphone. Ce ne serait pas mon genre d’abuser de la patience des autres, quand même.

— Ils étaient normaux.

Normaux ? Super description ! À ce stade, j’aurais trouvé plus utile qu’elle me dise que c’était des extraterrestres.

— Pas comme toi, comme lui.

Elle penche la tête vers Rachid. Je décide d’ignorer le fait que je ne suis pas normale d’après elle.