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Je suis sortie de l'hiver de ma mémoire. Je ne repousse plus ma mémoire brûlée. Je la laisse venir à moi. Ecrire, c'est puiser dans la mémoire de mon coeur.
Afficher en entierJe me souviens de ces minuscules bestioles insinuantes et tenaces qui m'ont taquinée, grignotée, dévorée durant de long mois.
Elles sont de tailles, de couleurs, de familles différentes. Il y en a de noires, bien dodues, qui se déplacent paresseusement mais qui ne s'arrêtent que pour donner un coup de pince en des endroits de choix. Les blanches, transparentes et menues, se groupent dans les coutures de nos vêtements. Tête blonde et ventre noir, voraces et agiles, d'autres se prélassent dans nos plaies et se régalent sans se préoccuper de nous.
Afficher en entier"Il est évident pour moi qu'il fallait transformer cette mémoire de mort en appel à la vie. J'ai compris que la paix ne peut se construire que si chacun de nous trouve ou retrouve le goût à sa vie." (p.70)
Afficher en entier"J'ai connu des êtres qui ont supporté ce dénuement avec grandeur. Ils ont su garder un coeur généreux et des yeux lumineux et attentifs. Dans cet extrême dépouillement, dans cette inexistence où aujourd'hui, hier et demain étaient des abstractions, leur témoignage rend à l'homme ses dimensions et, pour nous qui avons eu la chance de les connaître à ce moment, a fait renaître le goût de vivre et d'espérer" (p.30)
Afficher en entier"Le soleil devait frissonner devant ce spectable. Ce-jour là, j'ai juré de vouloir rester en vie. Pour dire aux hommes qui oublient de rester vigilants".
Afficher en entierEn exterminant les juifs, les nazis voulaient tuer l'étincelle de Dieu en eux pour se l'approprier, afin de prendre la place de Dieu. Pour y parvenir ils comptaient sur l'inimaginable, sur la faculté d'oubli des êtres humains et sur l'incrédulité du monde.
Afficher en entierL'ATTENTE :
C'est long l'attente
Dans le coeur de l'hiver
La touffeur de l'été
Pleine d'inconnu, menaçante
Nous attendons
Durant des secondes usées
Des minutes broyées
Des heures sans fin
le pain
la soupe grise
le jour
la nuit
Nous attendons
Avec les yeux
qui défient
supplient
se résignent
s'éteignent
Nous attendons silencieux
Avec les mains prêtes à prendre
à se tendre
à serrer
à s'abandonner
Nous attendons la fin
D'un travail harassant
Avec des jambes enflées
crispées
pesantes
douloureuses
Des marches forcées
Des appels prolongés à plaisir
Nous attendons
Dans les fils barbelés
Avec un coeur plein à craquer
Essoufflé d'impatience
Battu de rage et d'impuissance
De haine et d'angoisse
Nous attendons
Avec une lueur d'espoir
Afficher en entierLe désespoir a laissé la place au vide. Une fatigue inhumaine a pris possession de moi ; elle m'a fait perdre jusqu'à la mémoire. Une journée, une semaine, une nuit, une longue éternité se sont brouillées dans mon cerveau. J'étais seule ; je n'étais plus rien. D'où venaient ces larmes ? Étaient-elles encore les miennes ? Étrange sensation de ne pas s'appartenir : la réalité, le rêve, le désespoir se chevauchent. Comme il aurait été facile de s'abandonner, de se laisser aller au vertige de la mort.
Afficher en entierJ'étais trop jeune, et je n'ai pas compris pourquoi nous étions condamnés à mort.
De quoi étions-nous coupables ?
Je n'ai pas compris la métamorphose des gens ; les uns transformés en bourreaux, d'autres en victimes.
Comment cela a-t-il été possible ?
Comment sommes-nous devenus des oubliés de l'humanité ? Comment se fait-il que personne ne s'intéressait à nous en dehors de nos tortionnaires ?
Comment se fait-il que nous n'ayons jamais rien reçu ?
Comment cela a-t-il été possible ?
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