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Voici que revient l’heure de pleurer les morts […]
Il est pour elles ce dais immense que j’ai tissé […]
Pour toujours et partout, elles sont à mes côtés, elles seront avec moi, quoiqu’il puisse arriver.
Et si l’on veut fermer ma bouche torturée par laquelle hurle un peuple de cent millions d’âmes,
Que ce soient elles alors qui évoquent mon nom,
Quand on célébrera l’office des morts.
Et si quelqu’un, un jour songe dans ce pays,
A élever un monument à ma mémoire,
Je donne mon accord, mais à une condition, une seule: c’est qu’il soit dressé […]
Mais ici même où j’ai attendu 300 heures,
Ou les verrous pour moi ne se sont pas ouverts.
Car j’ai peur, dans la paix bienheureuse de la mort, d’oublier le grondement des fourgons noirs.
Afficher en entierEt si je prie, ce n’est pas pour moi seule ,
C’est aussi pour toutes celles qui étaient avec moi,
Dans le froid sans pitié, dans la chaleur torride,
Au pied du mur aveugle et rouge.
Afficher en entierLe chœur des anges glorifiait l’heure suprême,
Et les cieux fondaient en pluie de feu.
A son père, il dit : «Pourquoi m’a tu abandonné?»
Et à sa mère: «Ne pleure pas sur moi.»
Afficher en entierNe pleure pas sur moi, Mère je suis dans la tombe.
Afficher en entierC’était au temps où seuls souriaient
Les morts, contents d’avoir trouvé la paix,
Et Léningrad, appendice inutile,
Ballottait auprès de ses prisons.
C’était au temps où rendus fous par la torture
S’avançaient les bataillons des condamnés,
Et les sifflets des locomotives chantaient
La brève chanson des déchirures.
Là-haut brillaient les étoiles de la mort,
Et la Russie se tordait, innocente,
Sous des bottes ensanglantées,
Et sous les pneus des fourgons noirs.
Afficher en entierNous nous retrouvions là, plus glacées que des mortes,
Et le soleil descend, et la Neva s’embrume,
Mais l’espoir chante toujours au loin.
La sentence… et les larmes jaillissent,
La voilà maintenant coupée du monde entier,
Comme si la douleur lui arrachait le cœur,
Qu’on l’avait fait soudain tomber à la renverse.
Et pourtant, Elle avance, elle titube…Seule…
Où sont donc aujourd’hui celles qui furent mes compagnes
Durant ces deux années d’infernales folie?
Quelles visions les hantent dans les neiges de Sibérie
Que croient-elles voir dans le halo de la lune?
C’est à elles que j’adresse mon dernier adieu.
Afficher en entierAu cours des années terribles du règne de Iéjov, j’ai passé 17 mois à faire la queue devant les prisons de Léningrad. Une fois, quelqu’un m’a pour ainsi dire «reconnue» . Ce jour là, une femme qui attendait derrière moi, une femme aux lèvres bleuies qui n’avait bien sûr jamais entendu mon nom, a soudain émergé de cette torpeur dont nous étions tous la proie et m’a demandé à l’oreille ( là-bas tout le monde parlait à voix basse):
- Et ça vous pouvez le décrire?
Je peux.
Alors un semblant de sourire a Effleuré son visage
Afficher en entierNon je n’étais pas sous un ciel étranger,
Ni réfugiée sous une aile étrangère,
J’étais alors aux côtés de mon peuple,
Là où pour son malheur mon peuple se trouvait
Afficher en entierC'est à l'aube qu'on est venu t'emmener.
Comme à la levée d'un corps, je te suivais.
Dans la chambre obscure, les enfants sanglotaient.
Dans le coin des icones le cierge a coulé.
Sur tes lèvres, le froid d'une médaille.
Sur ton front, la sueur d'agonie. Ne pas l'oublier.
J'irai moi, comme les femmes des streltsys,
Hurler sous les tours du Kremlin.
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