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J'ai commencé dans la pauvreté totale et j'en suis arrivé là; vous autres,vous commencez ici et nous allons bien voir jusqu'où vous irez.
Afficher en entierVivre sa vie, pour lui, c'était la peindre.
Afficher en entierSalvatierra voulait donner l'impression qu'une créature,une fois entrée dans sa peinture ne pouvait traverser l'espace peint,avancer sur la toile et réapparaître.Personne n'est à l'abri.
Afficher en entierJ'ai senti qu'il me parlait avec son tableau et qu'il franchissait enfin le siilence immense qui existait entre nous deux.
Afficher en entierCe qui arrive aux gens pendant leur temps de vie leur appartient;il ne faut pas le déterrer.Ce n'est pas pour rien que c'est oublié.Il faut vivre sa vie et laisser les morts tranquilles.
Afficher en entierC’était quoi, ce tissage de vies, de gens, d’animaux, de jours, de nuits, de catastrophes ? Que signifiait-il ? C’était quoi la vie de mon père ? Pourquoi avait-il eu besoin de se lancer dans un travail pareil ? Que nous était-il arrivé, à Luis et à moi, qui nous retrouvions avec des vies tellement grises dans la grande ville, comme si Salvatierra avait accaparé toute la couleur disponible ? Nous avions l’air plus vivants dans la lumière de sa peinture, sur les portraits qu’il avait faits de nous à dix ans, en train de manger des poires vertes, qu’aujourd’hui avec nos vies d’études de notaire et de contrats de location. C’était comme si la peinture nous avait tous dévorés, nous deux, Estela, maman. Toute l’époque lumineuse du village avait été absorbée par sa toile. Il y avait quelque chose de surhumain dans l’œuvre de Salvatierra, c’était trop. Moi, j’ai toujours eu du mal à entreprendre la moindre tâche, y compris la plus simple, comme de me lever le matin. J’ai cru que je devais tout faire en grand, en géant, comme mon père, ou ne rien faire du tout. Et j’avoue que j’ai souvent choisi de ne rien faire, d’où ce sentiment que j’ai toujours eu de n’être personne.
Afficher en entierIl y a longtemps, j’ai lu cette phrase : « La page est le seul lieu de l’univers que Dieu m’ait laissé en blanc. » Je ne me rappelle pas où je l’ai lue. Elle m’a frappé parce que c’est ce que j’ai éprouvé avec mon père. Je n’ai jamais été très croyant car je trouvais écrasante l’idée d’ajouter un père spirituel au père biologique que j’avais déjà. Pour moi, cette phrase devenait : « La page est le seul lieu de l’univers que papa m’ait laissé en blanc. » Chacun occupe les lieux que son père lui laisse en blanc. Salavatierra avait occupé une marge éloignée des attentes de mon grand-père, qui le voulait éleveur de bétail. Il s’est emparé de la représentation, de l’image. A moi, il m’est resté les mots que le silence de Salavatierra avait rendus disponibles.
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