Extraits

– Je t'aime.

Une sensation de chaleur s'épanouit dans la poitrine du garçon, qui se propagea bientôt à son amie par le biais de leur connexion.

– Je ne me lasse jamais de l'entendre, souffla-t-il. Dis-le-moi encore.

– Je t'aime, répéta-t-elle en souriant.

Ni une ni deux, il se fit servir à son tour plus de nourriture qu'il ne pourrait jamais en avaler, la vieille femme se désolant encore et toujours de sa maigreur.

– Qui aurait cru que les grands-mères étaient des tyrans pareils ? marmonna Sev.

Un bol plein à la main, lui aussi se retrouvait sans conteste victime des initiatives zélées d'Agneta.

Destinées à nous affronter comme nos mères avant nous.

Vouées à nous détruire l'une l'autre.

p.117

Tristan vient se poser près de son amie pour lui apporter son soutien.

— Vous la sous-estimez. Si elle se bat, ce n’est pas parce qu’elle s’y sent obligée. (Il coula vers la jeune fille un regard débordant de fierté.) Elle avait déjà l’âme d’une guerrière bien avant de devenir une Dresseuse de phénix, une Pyromaque ou l’héritière du trône. La force de lutter, elle la puise dans sa nature. Jamais elle ne restera les bras croisés alors qu’on s’en prend à ceux qu’elle aime.

En entendant ces louanges, Véronyka sentit sa poitrine se gonfler d’orgueil. Le fils du commandant la connaissait mieux que quiconque. Sa manière de la décrire la touchait au plus haut point.

Un par un, Dresseurs et soldats s'agenouillèrent, une main posée sur la poitrine, les yeux rivés sur Veronyka Pyracoeur, la Reine couronnée de flammes.

Le bras de Kade en travers du ventre et le torse de l'ancien esclave pressé contre son dos, Sev se réveilla le corps et le cœur réchauffés. Il devait faire encore nuit. A moins que ce ne soit l'obscurité de la caverne qui lui donne cette impression - ou sa réticence à ouvrir les yeux. Il se retourna sur sa paillasse pour blottir son nez au creux du cou exposé de son camarade. Kade inspira brusquement. Tout son corps se contracta.

- Sev…murmura-t-il d'une voix endormie.

Il se détendit un tant soit peu, mais la tension, dans ses muscles ne tarda pas à revenir. Sa surprise laissa peu à peu la place à ce qui ressemblait davantage à de l'impatience. Le bras qui, quelques secondes plus tôt, reposait amorphe sur la taille de Sev se plaqua contre son dos.

- Qui d'autre ? demanda l'espion évadé, la bouche contre la peau de son ami.

- Personne…

Kade s'interrompit, Sev vit sa pomme d'Adam tressauter. Le cœur de l'apprenti Dresseur battait à toute vitesse.

- Personne d'autre, ajouta-t-il.

Cette réponse ravit l'agent de Cassian, dont les lèvres s'étirèrent en un sourire. Il les sentit frotter contre la barbe naissante de l'ancien serf. Suivant le tracé de sa gorge, Sev descendit, un baiser après l'autre, jusqu'à la clavicule de Kade. La main posé dans le dos de l'informateur tressaillit, puis l'apprenti attira un instant vers lui son partenaire...avant de lui agripper la tunique.

- On...euh...(l'ancien esclave semblait presque à bout de souffle.) On devrait se mettre en route. Avant le lever du soleil.

- Oui, oui…

Mais Sev n'avait aucune envie de mettre fin à cette étreinte. Il glissa les mains entre eux deux puis, malgré la maladresse de ses doigts saucissonnés de bandages, parvient à trouver les cordons de la tunique de l'apprenti, qu'il se mit à tirer.

- Dans deux minutes, promit-il, Il fait encore…

En se tordant le cou pour regarder vers l'entrée de la grotte, il s'était soudain retrouvé nez à nez avec une paire d'immense yeux ronds et noirs comme la nuit, qui le scrutaient dans la pénombre s'une manière plutôt inquiétante. Pris au dépourvu, il glapit, se leva d'un bond, mais ne parvint qu'à s'emmêler les chevilles dans les couvertures avant de trébucher. La bête évidemment, poussa un cri terrorisé.

Jinx…Sev avait complètement oublié l'âme sœur de son compagnon. Comment avait-elle pu lui sortir de la tête ?

Elle avait passé la nuit penchée sur eux, les ailes déployées, pour les envelopper dans un cocon de chaleur. A présent que l'espion avait déserté la protection de cet abri, la température de l'air autour de lui chuta si vite qu'il en eut la chair de poule et se mit à expirer des nuages de buée.

La mine ahurie, les cheveux en bataille et les paupières encore lourdes, Kade s'était redressé d'un seul coup. Désormais en position assise, il faisait face à son camarade qui restait planté là, les bras croisés et les pieds campés dans le sol de pierre glacé.

- Jinx, qu'est-ce que tu… Va-t'en de là, finit par grommeler son maître quand il comprit ce qui s'était passé.

Un agacement qui n'avait rien de bien méchant. La créature inclina la tête sur le côté dans une attitude de perplexité naïve, avant de s'en aller voleter hors de la tanière.

- Désolé… s'excusa Kade d'une voix dépitée. Sa curiosité à tendance à se retourner contre elle… ou contre moi devrais-je dire.

p.288

Sev s’éveilla de bonne heure dans le dortoir des apprentis. Il en profita pour se prélasser quelques instants, bercé par son hamac qui se balançait doucement et par le souffle régulier de ses camarades de chambrée.

Après avoir rêvé qu’il volait, il s’était réveillé, le sourire aux lèvres......avec un jeune phénix perché sur la poitrine. Félix émit un croassement. Aussitôt, son maître se redressa d’un bond en faisant tanguer son hamac en tous sens.

Des jurons et des grognements fusèrent dans le dortoir, résignés, pour la plupart. L’oisillon baissa la tête, honteux d’avoir, une fois de plus, troublé le repos des apprentis. Ersken allait l’étrangler.

Félix était censé dormir à l’intérieur du cratère du Nid d’Azurec avec les autres montures des apprentis, mais il refusait catégoriquement de suivre le règlement. Quel que soit l’endroit où se trouvait Sev ou la tâche qui l’occupait, qu’il veille dans le réfectoire, passe du temps avec Kade, Véronyka ou Tristan, effectue des corvées telles que la réparation de sa tenue ou le récurage de sa selle, ou même s’il était simplement installé dans la bibliothèque pour réviser ses leçons de pyraéen, le jeune phénix finissait toujours par le trouver. L’oisillon précoce fit même une fois une apparition à l’heure du bain, ce qui se traduisit par des apprentis en colère et une véritable inondation. Sev, vêtu en tout et pour tout d’une serviette, avait dû ramener auprès d’Ersken un Félix trempé du bec aux pattes, mais visiblement ravi. La situation finit par devenir si incontrôlable que l’ancien fauconnier dut prendre la décision d’enfermer le jeune fauteur de troubles dans son bureau après la tombée de la nuit. Là encore, l’impertinent oisillon avait trouvé le moyen de s’échapper. Son maître aurait dû le sermonner, mais chaque fois qu’il contemplait cette petite tête triomphante et ces yeux brillants, c’était comme si le lien avec son âme sœur se formait pour la première fois.

Dans le hamac en dessous du sien, Kade soupira.

- On dirait qu’il est encore plus doué que toi pour crocheter les serrures.

Sev glissa la tête sur le côté de son couchage pour lui lancer un sourire éclatant.

- C’est plutôt qu’il a de meilleurs amis, oui.

p.742-743

Nombreux sont ceux qui pensent que l'histoire des trois sœurs Axura, Nox et Xenith - le soleil, la lune et les étoiles - est un bien triste conte. C'est simplement qu'ils ignorent le dénouement.

En effet, que devient le jour sans nuit, l'obscurité sans la lumière ? Et que serait un ciel sans étoiles ?

Même séparées, elles sont unies, et ce, pour l'éternité, car elles ne sont rien les unes sans les autres.

"Le soleil, la lune et les étoiles", extrait des Epopées pyraénnes, volume II, vers 460 av.E.

p.756

Être une apex, c’est se confronter à la gloire et à la culpabilité. C’est être fautive. C’est être la première et la dernière défense.