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Un claquement de langue s’élève, signifiant le mécontentement de mon père.
— Il est déjà invité. Cesse ce comportement enfantin. Qu’il ait de la compagnie est une bonne chose. Au vu de ta condescendance, je devine que votre relation n’est pas apaisée. Cela sera le moment pour stopper votre guerre de pacotille. J’ai donc pris la liberté d’accepter. Bonne journée.
Il raccroche sans me laisser le temps de réagir. Quelle enflure ! Il répond à ma place. Si c’était sa fête, je comprendrais. Or, je suis l’hôte. C’est donc à moi de décider. Chose que mon père ne comprend pas. Il a toujours besoin de contrôler un bout de ma vie.
Des images de la fête s’insinuent dans ma tête. Je ne me sens pas de passer la soirée ainsi. J’envisage même d’annuler. Ils fêteront donc tous le réveillon chez eux et je serai tranquille.
Cette idée est ridicule. À dix jours, il est trop tard pour prévenir que je ne suis pas apte à faire une soirée. Que va-t-on dire de moi ? Que je suis une incapable ?
Non. Je vais tenir mon rôle et tout se passera bien. Il n’y aura aucun souci et le réveillon sera parfait.
Afficher en entierIl me saisit brutalement par le bras. Je suis tirée en arrière. Bien vite, je me retrouve face à sa colère. La pression sur mon bras est forte. Il ne maîtrise pas sa force.
— Nous en reparlerons quand tu seras calme, soufflé-je en me libérant de son emprise.
— Mais je ne vais pas te laisser filer ! Je t’aime, Ruby, putain. Tu comprends ça ? Tu es à moi, chérie. Tu ne peux pas me quitter pour des conneries pareilles !
Je suis outrée. Ma mâchoire est décrochée. Je peine à contenir mon sang-froid.
— Des conneries ? Ma santé est une connerie pour toi ? Mon bien-être aussi ?
Je m’époumone, les yeux humides et les joues trempées.
— Si tes sentiments étaient forts, tu ne te soucierais même pas de ça !
La conclusion de ses mots m’outre de plus belle. Est-il en train de prétendre que les sentiments sont plus importants que sa propre santé ? Que par amour, on doit se mettre de côté ? Accepter d’être mal ?
— T’as tout compris ! sifflé-je avec énervement. Je ne sais pas comment ni quand c’est arrivé, mais mes sentiments… ils ne sont plus là. Je m’en suis…
— C’est ce que tu penses, Ruby, me coupe-t-il sur un ton sec. Tu vas tout avoir en te mariant avec moi. Une maison, un jardin, des enfants. Quand ce sera le cas, tu seras de nouveau heureuse.
Je ne peux même pas m’exprimer. Lui dire ce que j’ai sur le cœur. Il préfère me couper la parole pour débiter des conneries.
— On n’a pas besoin de ça pour être heureux, rétorqué-je sur un ton plus bas. Je devrais avoir besoin que de toi. Et…
— Ce n’est pas le cas, c’est ça, termine-t-il en serrant ses poings.
Je ne sais pas quoi répondre à part désolée. Je me sens si mal de lui infliger ça.
Quand ai-je commencé à douter de nous ? De moi ? Je ne saurais dire. Ce foutu déclic a mis un merdier dans ma tête. Ai-je eu raison d’y faire attention ? N’aurais-je pas dû l’ignorer ?
Tout au fond, je sais que j’ai eu raison. L’ignorer aurait été pire. Dans une poignée d’années, j’aurais fini par regretter. Du moins, j’essaie de m’en convaincre.
Kallen étouffe un rire nerveux. Il m’indique de la main la porte d’entrée.
— Pars, me somme-t-il.
Je n’ose pas bouger. J’ai peur de sa réaction. J’aimerais tellement qu’on en parle tous les deux. Qu’on soulève la question, qu’on tente encore une fois de se faire des promesses.
Promesses qui ne seront pas tenues, bien sûr, comme toujours.
J’aimerais qu’il me retienne, décide une bonne fois pour toutes de m’écouter. Nous avions besoin de ça. Une conversation profonde et sincère.
— Allez, casse-toi, putain ! Je veux plus voir ta gueule !
En peu de temps, je déverrouille la porte et fuis. Sans me retourner. En ignorant ses sanglots qui naissent et qui disparaissent au fur et à mesure que je dévale les escaliers.
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