Extrait

Dès qu’ils eurent regagné l’appartement de Nic, Rowan se laissa tomber sur l’un des sofas, pressée d’ôter ses bottes. Du coin de l’œil, elle vit Nic se débarrasser rapidement de sa veste et se diriger vers le bar. Il emplit deux verres d’un liquide ambré. Lorsqu’il lui en tendit un, elle le prit et le posa sur la table basse.

Il la regarda en soupirant.

— Ne m’en veux pas, Nic. Je ne peux rien avaler.

— Je ne t’en veux pas. Mais nous devons parler.

— Pas maintenant, je suis trop fatiguée. Je vais me coucher.

Nic la regarda s’éloigner en se demandant s’il devait la suivre. Mais elle avait raison : mieux valait se reposer pour l’instant. Ils en avaient besoin tous les deux.

Toutefois, vu l’agitation régnant dans son esprit, il doutait fort d’arriver à trouver le sommeil. Emportant son cognac, il se dirigea vers l’escalier en desserrant sa cravate. Lorsqu’il passa devant la porte de la chambre où il avait installé Rowan, il s’arrêta brusquement en entendant un bruit de sanglots profonds et déchirants.

Le coeur battant, il poussa lentement la porte.

Rowan était assise sur le lit, un bras dégagé de son haut, le tissu entortillé autour de son buste tandis qu’elle pleurait, le visage enfoui dans ses mains fines et blanches.

La tension qui lui étreignait la poitrine depuis des heures enfla, envahissant toute sa cage thoracique. Sans réfléchir, Nic s’avança lentement dans la pièce et posa son verre sur la table de nuit.

— Rowan, ne pleure pas, dit-il en lui posant la main sur le bras.

Elle releva la tête, les joues souillées de traces de mascara grisâtres.

— J’essaie de m’arrêter, murmura-t-elle. Mais je n’y arrive pas : rien ne sera plus jamais comme avant…

Sa détresse l’ébranla, menaçant de détruire le peu de maîtrise qu’il lui restait encore. Il aurait dû s’enfuir avant que ses dernières défenses ne cèdent, mais il ne pouvait pas la laisser comme ça. Elle lui faisait penser à une enfant essayant d’assumer des responsabilités trop lourdes pour elle.

En couchant avec Rowan, il avait profité d’elle, réalisa-t-il soudain. Elle traversait une période très difficile et s’était donnée à lui dans un moment de faiblesse.

— Ne t’en fais pas, dit-il en refoulant les remords qui le submergeaient. Tout ira bien et tu vas t’en sortir.

Doucement, il acheva de la déshabiller — lui laissant ses sous-vêtements —, puis la força à s’allonger sous le drap.

Demain, ils parleraient. Pour l’instant, il avait besoin de temps pour réfléchir aux dispositions à prendre. Surtout s’il l’avait mise enceinte…

— S’il te plaît, ne t’en va pas, Nic, murmura-t-elle en s’agrippant à sa main.

Et quand elle la souleva et la posa sur sa joue mouillée de pleurs, Nic tressaillit : son visage était glacé. Cédant à un réflexe sur lequel il refusa de s’interroger, il ôta ses chaussures et déboucla sa ceinture, avant de la faire glisser dans les passants et de la laisser tomber sur le tapis.

Ensuite, il se glissa tout habillé sous le drap et serra Rowan contre lui en essayant de lui communiquer un peu de sa chaleur.

— Seulement jusqu’à ce que je m’endorme, chuchota-t-elle. Ensuite, tu pourras t’en aller. Excuse-moi…

— Non, c’est à moi de m’excuser, dit-il d’une voix rauque. Et maintenant ne dis plus rien. Dors. Tout ira bien.

En réalité, l’avenir lui paraissait des plus sombres. Parce que si jamais elle était enceinte, non, tout n’irait pas bien du tout.