Extraits

Si Hilda avait repoussé ses avances, il l’aurait violée. L’envoyer loin d’ici n’avait pas été possible tant qu’Egbert était en vie. Et voilà que les Vikings étaient devant sa porte…

— Je ferai serment d’allégeance, s’il le faut, assura Edith de sa voix la plus ferme. Tu verras, Hilda, tout se passera bien dès que je l’aurai déclaré.

— Toi ? s’exclama Hilda en portant la main à sa gorge, son agitation soudain calmée. Mais ce jaarl scandinave se fiera-t-il à ta parole ?

Edith serra les poings. Il fallait que Hilda lui fasse confiance. Ne s’était-elle pas occupée du domaine, veillant à ce qu’il prospère, tandis qu’Egbert se livrait à ses passions pour la chasse et la chair ?

— Il le devra. Cette terre appartient à notre famille depuis la nuit des temps. Je ne serai pas celle qui la perdra.

— Tu veux dire que tu t’attends à ce qu’il t’épouse, répliqua Hilda en se tapotant le nez. C’est malin. J’aimerais disposer d’une dot pareille plutôt que de ma seule apparence… Tu seras parée de soie et de rubans, et tu nous oublieras.

— Je n’attends rien, répondit Edith avec prudence.

Se marier avec un Viking était la solution logique, même si elle abhorrait l’idée de se remarier. Une veuve propriétaire d’un vaste domaine était une belle prise potentielle.

— Mais tu as tort de croire que je pourrais oublier ce domaine et ses habitants. Ce sont mes gens, chacun d’entre eux.

Chapitre 1

Début mars 876, nord du Yorkshire

Sa terre. La sienne, et celle de personne d’autre. Gagnée à la force de l’épée, attribuée par la grâce de son roi.

Brand Bjornson s’agenouilla sur la terre brune et en soupesa une poignée chauffée par le soleil. Il la serra entre ses doigts pour en éprouver la richesse. Après plus d’une décennie de guerres et de batailles, c’était là tout ce dont il rêvait : une terre où prendre racine et créer son propre paradis.

Enfin ! Finie, la vie le mercenaire sans foyer avec une mort prématurée pour seule perspective. Il était désormais un jaarl, un chef, avec un grand domaine qui le prouvait. Halfdan, le chef du felag, le groupe de Vikings lancé à la conquête de la Northumbrie, était aujourd’hui sur le trône et avait tenu parole en lui octroyant de belles terres, l’un des plus beaux domaines de toute la contrée.

Brand eut un sourire désabusé quand la terre lui macula la main. Honorer une promesse ancienne était chose rare en matière de politique viking, où allégeances et alliances se nouaient et se défaisaient à la pointe d’une épée ou par le biais d’une bourse bien pleine.