Commentaire de Moridiin

Un échec pour moi. Je m'attendais à aimer un polar, je me retrouve à ne pas apprécier un roman noir. Et c'est le principal problème en fait : pendant toute une première grosse partie (un bon tiers qui tire vers la petite moitié selon si vous voyez le verre à moitié plein ou à moitié vide), l'enquête piétine. Par contre, on a le droit à une débauche extraordinaire de violence, souvent gratuite d'ailleurs, parfois au sein de cette frange de la population chassée des steppes puisque attirée par la promesse d'une vie facile à la capitale et qui finalement croupit dans la misère la plus totale et une désillusion qui l'est au moins autant, mais aussi parfois de Yeruldelgger envers les autres. C'est une des raisons pour lesquelles je n'ai pas apprécié ce personnage (dommage, c'est le commissaire principal !). J'ai trouvé que l'auteur a trop forcé sur son image de flic brisé, ce qui fait qu'il en devient presque aussi mauvais que ceux qu'il cherchent à faire tomber puisqu'il en vient à prendre les mêmes méthodes qu'eux, et il n'a pas réussi à retrouver un peu d'honorabilité à mes yeux, y compris à la fin, malgré l'amélioration liée à son passage chez le Nerguii (passage qui m'a déçu d'ailleurs parce que clairement sous-exploité ...)

Il y a aussi une hyper sexualité dans la première partie du roman qui m'a un peu abasourdie d'entrée de jeu (la scène entre Saraa et les inspecteurs, dont son père, dans la salle d'interrogatoire, j'en reste encore estomaquée ...).

Un roman qui partait mal donc. J'ai sérieusement failli abandonner, ce qui ne m'arrive quasiment jamais.

Et puis l'enquête décolle. Merci Oyun et Gantulga. Ce sont les personnages que j'ai préféré, l'une parce qu'elle est vraiment ce modèle de flic intègre et pugnace que j'apprécie et l'autre parce qu'il est malin et débrouillard et forme vraiment un bon duo avec la première.

J'ai à nouveau eu un coup de mou quand Yeruldelgger refait son retour au premier plan (au passage, ce qui arrive à Oyun est affreusement téléphoné et se voit comme le nez au milieu du visage vu le peu d'émotion que montre Yeruldelgger).

Globalement, sur la fin, l'enquête traînasse (pas besoin de beaucoup de jugeote pour trouver la raison des crimes une fois qu'on a lu le rêve du commissaire ...).

La fin présente un épilogue appréciable pour ceux qui, comme moi, vont s'arrêter là dans la série, tout en laissant la porte suffisamment ouverte pour qu'on se rende bien compte que tout n'est pas encore réglé dans cette affaire ... La preuve qu'on est jamais mieux servi que par soi-même ...

Bref, un roman qui ne m'a pas conquise du tout, avec une enquête avec une base intéressante mais qui s'étire trop en longueur, une violence souvent presque bestiale et une hyper-sexualité qui m'ont refroidi (ça cogne, ça tabasse, ça zigouille et ça viole à tour de pages, soyez prévenus) mais il est vrai que les traditions et les paysages de Mongolie sont bien décrits. A travers Yeruldelgger, on sent toute la nostalgie et la mélancolie de l'auteur devant ce pays qui au fur et à mesure des invasions, a dû abandonner de force une grande partie de son identité, de sa culture et de ses traditions et qui, aujourd'hui que c'est un pays indépendant, le fait de manière volontaire pour les sacrifier sur l'autel du développement économique avec pour but l'atteinte de cette pseudo-conformité occidentale dont ils sont abreuvés à cause de la mondialisation. On sent aussi l'espoir qu'ils finissent par arriver à concilier les deux.

Malheureusement, ce volet plus onirique et bucolique des steppes est fortement masqué par la jungle survivaliste de la capitale ou l'invulnérabilité des avides cupides bien placés. Ce qui m'attriste le plus, c'est que j'ai découvert ce livre lors d'un voyage en Mongolie et la guide qui nous accompagnait et qui l'avait lu, l'avait pudiquement qualifié de "très vrai" ... Un bien triste sort réservé à beaucoup de Mongols (et surtout de Mongoles) alors ...