Ajouter un extrait
Liste des extraits
Il est treize heures, et me voilà seule. Seule comme tous les autres jours, sauf qu’aujourd’hui tout est différent. J’aimerais que Raf’ soit ici, à mes côtés, et non entre la vie et la mort.
Triste ironie.
J’ai passé tellement de temps à l’éloigner de moi, à le faire fuir, qu’à cet instant, je regrette chaque mot, chaque parole blessante que j’ai pu avoir à son encontre. Je me déteste encore plus face à mon comportement d’hier. Certes, il a des secrets envers moi, et comme me l’a si bien fait remarquer Vic’, c’est à moi et à moi seule de lui ouvrir la voie. Il doit pouvoir me raconter toute l’histoire sans que je n’en devienne hystérique.
Je dois évoluer, faire des efforts.
Afficher en entier— Vous savez que ce n’est pas le cas. Vos enfants doivent être fiers de vous.
Elle me sourit, et essuie ses larmes.
— Je n’en ai pas eu. Je suis seule. Je n’ai jamais pu me résoudre à en avoir. Voir tous ces bébés malades… Je ne pouvais pas… Si c’était le mien… Je n’aurais pas survécu… Comme ta mère.
Chamboulée par ce trop-plein d’émotion, je me lève, et vais la prendre dans mes bras. Je la console comme elle a dû le faire, il y a des années.
— Je te remercie Valérie. Pardonne-moi mon attitude.
Afficher en entierRafael
— Nous y sommes ma chérie.
Je sais qu’elle déteste que je l’appelle ainsi, c’est bien pour cela que je n’ai aucune réponse. Je la regarde alors dans le rétroviseur de ma Peugeot 206. Ma fille dort profondément allongée comme elle le peut. Elen vient d’avoir seize ans, l’âge où comme tout parent, je devrais m’inquiéter de ses fréquentations, et même lui intimer un couvre-feu, mais pas avec elle non. Elle, elle est différente. Je le sais, elle le sait, tout le monde le sait, même si on aimerait tous pouvoir passer outre. J’espère que cette fois-ci avec ce nouveau départ, tout ira enfin pour le mieux.
Je détourne mon attention pour me focaliser sur notre nouveau « chez nous ». Cette maison de cent vingt mètres carrés se situe dans un cul-de-sac au bout d’une ruelle non goudronnée, et parsemée de trous en tous genres, plus miteuse que dans mes souvenirs. Nous voici arrivés en pleine campagne marnaise, au carrefour de trois grandes villes importantes. Ici, ne vivent guère plus de trois cents âmes, autant dire que nous sommes loin de tout, et que l’offre de services y est assez réduite.
Afficher en entier— Explique-moi pourquoi.
— Un jour, mais pas aujourd’hui.
— Super réponse… vraiment super.
Elen sort une cigarette de sa poche, et l’allume.
— Veux-tu bien arrêter ?
Je la lui arrache et la jette.
Nouveau haussement d’épaules. Nouvelle cigarette.
— C’est toi qui payes. Si tu aimes gaspiller ton fric…
— Elen, soufflé-je excédé.
— Raf’.
— Profites-en, c’est le dernier paquet que je t’achète.
— Hé bien, tu les as retrouvées tes cojones. Première fois depuis des années, peut-être même depuis ma naissance, que tu m’interdis quelque chose.
Afficher en entier