Extraits

«Ecoutez moi bien: un héros se sacrifie pour le bien supérieur. Un héros ou une héroïne est fidèle à sa conscience. En bref, l'héroïsme signifie faire la chose juste quelles que soient les conséquences. Même si n'importe qui pourrait correspondre à cette description, très peu le font. Choisissez ce jour pour être l'un deux.»

- Vous venez de Beyond. Pourquoi vous souciez-vous d'arrêter Maldor, pour commencer ?

Jason haussa les épaules.

- Ça paraissait amusant.

- Sois sérieux.

Jason réfléchit.

- Je ne sais pas. Je suis arrivé à Lyran par accident. J'ai trouvé ce livre stupide par accident. Puis j'ai rencontré Galloran, qui m'a expliqué au sujet de Maldor. Même après l'avoir quitté, ce qui m'intéressait surtout était de rentrer chez moi.

- Pourquoi ne pas en faire votre but ? demanda Ferrin d'un ton encourageant. Ceci n'est pas votre monde. Ce n'est pas votre combat.

Jason fronça les sourcils.

- Ça devient ma bataille. Ce monde n'est peut-être pas le mien, mais c'est un monde. Un monde entier. Avec des gens innocents qui vivent dans la peur et à qui il arrive des choses terribles sans raison. Aster a été tué et Franny a eu sa vie dévastée, juste parce qu'ils avaient été gentils avec moi. Norval a donné sa vie pour moi. Plus j'observe ceux qui travaillent pour Maldor, et plus je rencontre ceux qui essaient de s'opposer à lui, plus je me dis que c'est le combat du Bien contre le Mal. Et le Bien perd. Or nous pouvons peut-être changer ça.

- Nous devons essayer, renchérit fermement Rachel.

- Peut-être êtes vous malins, dit Ferrin pensif.

- Ben oui mais tu t'es moquée de mes cheveux ! Moi je les aime comme ils sont : courts et coiffés simplement.

- Courts, ça ne me dérange pas. La preuve, les miens aussi courts.

- Alors qu'est-ce qui ne va pas avec les mens ?

- On devrait peut-être parler d'autre chose.

- Tu veux dire du type à cheval qui veut nous tuer ?

- Il leur faudrait plus de style, marmonna-t-elle.

- Au type et son cheval ?

- A tes cheveux.

- J'ai oublié d'emporter du gel quand j'ai été avalé par l'hippopotame.

La porte s’ouvrit et Dorsio introduisit une fille dans la pièce. Elle avait presque une tête de moins que Jason et ne paraissait pas beaucoup plus âgée que lui. Ses cheveux châtains, courts, étaient bien coupés, elle avait des yeux marron foncé et des taches de rousseur sur le nez et les joues. Ses habits semblaient faits main et ne lui allaient pas très bien : sa chemise jaune pendait sur les épaules et son grossier pantalon marron, trop large à la taille, était maintenu par une ceinture. Le Roi aveugle se leva poliment tandis que Jason l’imitait avec maladresse.

Dorsio sortit sans bruit quand la fille s’approcha de la table.

– Merci de te joindre à nous, dit le roi en souriant et en désignant une chaise.

La fille s’assit, regardant Jason avec intérêt.

– Alors c’est toi le mystérieux visiteur.

– Mon nom est Jason. Je ne suis pas ici pour causer des ennuis à qui que ce soit. Dès que j’ai trouvé le Roi aveugle, je file. J’ai assez de problèmes comme ça.

Aster hocha brièvement la tête.

– Je veux bien te croire.

– Vous comptez voler les gens de cette maison ?

Le visage d’Aster se fendit d’un sourire rusé.

– Y a des chances. Note bien qu’il ne s’agit pas du tout de faire du mal à la propriétaire, juste de piquer une tourte ou deux.

Jason constata que la couverture charnue avait de minuscules pores, des poils fins comme ceux de ses bras et des veines bleu clair visibles sous la surface.

Épouvanté, il toucha cette surface avec hésitation et retira aussitôt son doigt. Elle était chaude au toucher, et la texture souple suggérait plus d’épaisseur qu’il ne s’y attendait. Elle paraissait vivante.

Une fascination morbide le cloua sur place. Un livre relié de chair vivante ! Aucune mention sur la peau n’indiquait un titre ou un auteur. Apparemment, l’éditeur n’avait pas de matériel de tatouage.

En se frottant la nuque, Jason se rendit compte que ses cheveux s’étaient dressés. Il jeta un coup d’œil aux étagères sombres à la limite de la lumière de la bougie. Au-delà, la noirceur et le silence paraissaient plus oppressants que jamais.

La surface du piédestal était inclinée pour que le livre soit relevé. Jason glissa un doigt sous un coin de la couverture et ouvrit le volume à une page de titre calligraphiée d’une écriture extravagante. L’encre était marron foncé.

Le livre de Salzared, relié de sa peau, écrit de son sang.

Il tourna la page.

Sois prévenu, lecteur. Certaines connaissances ne peuvent jamais être oubliées. Tel est le secret contenu dans cet ouvrage. Grave cet avertissement dans ton esprit, car les mots terribles qui suivent t’opposeront à jamais à Maldor.

Jason resta bouche bée. Que pouvait-il y avoir de si important là-dedans ? Et comment ce Maldor pourrait-il jamais savoir qu’il avait lu ce livre ?

Comment apprendrez-vous à voler à vos enfants ? ai-je demandé à la mère. Je ne vois pas comment vous pourrez les inciter à se lancer dans les airs.

– Tu ne comprends pas parce que tu es un humain. Apprendre à voler à un oiseau ressemble à apprendre à nager à un homme. Tu sais nager ?

– Oui.

– As-tu eu peur quand tu as appris ? Peur de couler ?

– Bien sûr.

– C’est pareil pour apprendre aux oiseaux à voler. Sauf que nous volons mieux que vous ne nagez. L’air est notre élément. Nous sommes aussi gauches quand nous marchons que vous l’êtes en nageant dans l’eau.

"Jason traversa la cellule pour examiner le trou dans le mur. Aucune lumière n'en venait. Il voyait qu'il bifurquait vers le haut, mais il ne pouvait pas tout à fait enfiler sa main dedans.

Il se demanda s'il permettait à ses geôliers d'entendre tout ce qu'il faisait. Il en approcha sa bouche.

- Un cheeseburger avec des frites et un grand coca, s'il vous plaît."

"Trompe-moi une fois, honte à toi; trompe-moi deux fois, honte à moi."

Il saisit la poignée en cuivre et poussa la lourde porte, soulagé de voir qu'elle n'était pas fermée à clé. En même temps, pourquoi l'aurait-elle été ? Il l'ouvrit en grand.

Lorsqu'il la franchit, un vieil homme portant un chapeau violet en forme e champignon leva les yeux d'un grand bureau en bois. Une grande paire de lunettes à monture métallique, avec des verres à double foyer, reposait sur son verre osseux. Il pencha la tête en arrière et fixa Jason de ses iris grossis. Sous ses yeux, des cernes pendaient en rides concentriques.

- Grande Mère du savoir, murmura-t-il.

- Bonjour, dit Jason, soulagé de rencontrer quelqu'un qui n'avait pas l'air furieux.

L'homme se leva et contourna le bureau. Ses culottes assorties à son chapeau bouffaient autour de ses cuisses. Des boucles brillantes étincelaient sur ses chaussures.

- Bienvenue, Chercheur du Savoir, entonna-t-il d'un air important. Tu as sûrement fait un long voyage et enduré beaucoup d'épreuves pour gagner le droit d'étudier dans la Bibliothèque du Savoir. Rares sont ceux qui ont le courage de venir jusqu'ici, et l'habileté de trouver ce remarquable édifice.