Extraits

j’ai appris tient en quelques mots : que le but de la Hush Race est de gagner du fric en poussant l’adrénaline à son paroxysme et que personne ne connaît l’identité des commanditaires ou des coureurs. Enfin, en théorie. Je doute d’en apprendre plus ce soir, mais au moins, j’ai un putain de pied dans la place.

En revanche, mon oncle Alfie est là, lui. Massif, il impose son immense carrure et son aura écrasante dans la petite pièce. Assis devant une tasse de thé et ses lunettes sur le nez, il semble totalement absorbé par sa lecture de son journal. Pourtant, je sais qu’il ne manque aucun de mes gestes.

Chapitre 7 :

Mara

«…– Depuis ce matin ! Depuis ce matin, j’essaie de te dire un truc. Sauf que tu ne m’écoutes pas, répète-t-elle sur un ton mi-amusé, mi-tendu.

Je me dégage de sa poigne, agacée.

– Et bien maintenant, je suis tout ouïe. Vas-y, crache-la, ta pilule.

– Ce mec, tu ne le reconnais pas, hein ? Ça n’a rien d’étonnant. T’étais sévèrement décalquée.

Elle m’a eue dans ses filets. Décontenancée, je pivote vers elle, abandonnant mon poste d’observation. Mes sourcils se froncent.

– De quoi tu parles ?

Elle souffle, ne retient pas le soupir d’exaspération bloqué dans sa trachée. Asa s’incline vers moi, quelques-uns de ses cheveux blonds chatouillent la peau fine de ma gorge.

– Ce type. Il empêche tes neurones de fonctionner correctement.

– Je n’aime pas être prise au dépourvu, voilà tout. Le contrôle, c’est le pouvoir.

Un sourire angélique et d’une indifférence totale se peint sur mes lèvres. Je lisse ma queue-de-cheval haute, la ramène sur mon épaule, puis reporte mon attention sur mon amie tout sauf crédule.

– Et donc ?

– Et donc… On l’a déjà rencontré, elle débite rapidement en apercevant le Traveller se rapprocher de nous. C’est lui ! Le mec de ta vie !

Cette fois, je suis vraiment paumée. Pas besoin de simuler un manque de compréhension parce que là, elle m’a perdue.

– À l’hosto cet été ! Celui que tu voulais épouser quand tu étais stone, expose Asa. Le brancardier que tu voulais absolument baiser dans tous les coins. C’est bon ? Tu percutes ?

Des bribes me percutent. Des filaments d’images, des sons… Un parfum. Sauvage et primaire. Aussitôt le nœud s’emmêle encore plus durement mon abdomen. Si je ne me rappelle plus franchement cette nuit-là, les détails que m’a fournis Asa par la suite m’ont suffi. Et très largement.

Merde.

À voir l’immense sourire canaille accroché à ses lèvres, je saisis que lui m’a parfaitement remise.

Merde. Merde. Et merde. …»

Chapitre 2 :

Sélian

«… – Redis-le, j’exige, fermé.

Elle ignore sciemment mon ton désagréable, prend sur elle, puis répète ce que je sais déjà.

– Pour la deuxième ou millième fois, l’hôpital nous a appelés. Les pompiers venaient de leur amener ton frère. Oren a été retrouvé au pied de la piste d’entraînement, en dehors des horaires d’ouverture.

Tante Maovi inspire, joue avec un fil de laine de son châle afin de dissimuler combien elle est bouleversée.

– Quasiment désarticulé, elle souffle, un soupçon de douleur transperçant sa voix cassée. D’après eux, Oren n’a pas suivi le protocole en se lançant sur la glace seul et sans tenue.

– Conneries.

– Ça, tu l’as déjà dit. Es-tu vraiment sûr et certain que pour impressionner ces nouveaux amis, il n’a pas voulu tenter sa chance et qu’il en paie le prix ?

Je secoue la tête, refusant catégoriquement cette idée.

– Non, ce n’est pas crédible. Surtout s’il était seul. Il y a forcément autre chose. Quelqu’un doit être au courant d’un détail, d’une info. ...»

Au moment où elle passe à côté de moi, je la stoppe, mes doigts enroulés autour de son biceps. Sans chercher à se défaire de ma prise, elle relève la tête et arrime son regard couleur poison au mien. Un frémissement drape sa peau. Se propage à mon propre épiderme. Nous sommes si proches que son souffle effleure mes lèvres pendant que je mate les siennes. Putain… J’ai envie de les mordre. De les sentir autour de ma queue… Stop.

– Perso, c’est toi qui m’intrigues, Wagner.

D’une pression sur son bras, je la force à me faire face. L’index replié, je frôle le fil de sa mâchoire délicate, songeur.

– Qui es-tu ? Une gentille petite étudiante ? Une nana vicieuse sans scrupule qui n’hésite pas à se taper le mec de sa sœur ? Sauvage ou tout simplement une miss-je-sais-tout qui, en réalité, ne connaît rien à la vie ? Parce que pour me conseiller de rentrer chez moi, tu dois vivre dans un cocon tissé de déni…

Je me penche vers elle et, mon front contre le sien, bouge à peine.

– Tu sais quoi ?

Juste assez pour que la commissure de ma bouche caresse la soie de sa pommette.

– Finalement, ne réponds pas. Je trouverai moi-même la réponse. Et ce jour-là…

Ce jour-là, on saura, entre le feu et la glace, lequel a le dessus sur l’autre.