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Extrait ajouté par Lemonnier-1 2018-11-28T16:52:50+01:00

Chapitre I

Il était encore si loin dans la rue, à peine comme un souffle sur ses lèvres.

Ce sourire, cette bouche, sans rides, si parfaite, l'éprouvèrent tant, qu'il souffrit cette brève douleur dans la poitrine.

Il murmura alors cette longue prière censée l'éloigner des shaîtans, puis la sourate Al-Fatiha_ ça peut toujours fonctionner. Cependant ce visage si blond, cette douceur, oui ce si doux duvet blond et surtout ces yeux grand ouverts jouant l'étonné, le sourcil haut sur le front, l'attirèrent avec une telle intensité.

Il marcha plus lentement, s'imposant une longue respiration. Non, il ne devait pas succomber. Le garçon venait à lui tout sourire, comme s'il le connaissait, pressentait cette fêlure si évidente.

Mohamed tenta à grand-peine de s'isoler derrière un mur qu'il jugea infranchissable : ses lèvres se pincèrent, son regard se fit dur. Il serra même les poings, comme se contenant.

Le garçon se planta soudain devant lui :

— Bonjour ! Vous cherchez une adresse, je vois que vous êtes perdu.

Le visage de Mohamed s'illumina malgré lui :

— Non, j'attends quelqu'un, j'ai perdu mes clefs.

— Ah ! Eh bien, vous pouvez rentrer avec moi, j'habite aussi ici, dans cet immeuble, je m'appelle Julien.

Il tendit une main franche et légère. Mohamed la serra comme s'il lui offrait le plus tendre des cadeaux.

— Venez, je vous prie, j'habite au rez-de-chaussée, le studio d'étudiant à

côté du concierge, vous savez ? Si vous voulez, je vous tiens compagnie…

Le temps que votre ami arrive. Je vis seul. Parfois c'est difficile, seul dans cette si grande ville, sans les parents ou une tête connue. Je suis arrivé, il n'y a pas si longtemps, je viens de Reims, vous savez, au Nord Est de Paris…

Le champagne ? Enfin, c'est bien d'être seul aussi, on est plus libre…

Mohamed le laissait parler, et suivait avec avidité ses gestes, lorsqu'il inséra la clé dans la porte de son studio, acquiesçait parfois, et comme s’il craignait d’être aperçu, entra vivement dans le studio où l'accueillit un grand canapé. Il entendait déjà les critiques, nombreuses : « tu dois rester discret.

Il n'est pas des nôtres. Tu ne peux te mélanger à eux. Et puis que faisais-tu avec ce gars ? C'est bizarre. Ça ne te ressemble pas. »

« C'est bizarre » : combien de fois avait-il pu l'entendre cette expression chez sa tante, lorsque adolescent, il ramenait un blondinet à la maison ?

Il avait pourtant toujours su se contenir. Ne rien laisser paraître, oui, comme il contenait ce tremblement intempestif, cette envie irrépressible d'embrasser ce sourire.

— Vous tremblez ? Oui, il fait froid dans cette ville. Un thé peut être, ça vous réchauffera.

Il acquiesça sourire aux lèvres.

— Vous ne parlez pas beaucoup, vous ! C'est vrai que moi, je n'ai pas la langue dans ma poche, et puis le plaisir de parler à un inconnu, de m’épandre, oui, je dis bien de m'épandre, ça doit vous déranger, non ?

— Non. Non pas du tout. C'est que je suis un peu réservé. Et je ne suis pas habitué non plus, qu'en France, un inconnu m'aborde comme ça, en toute confiance avec ma tête de basané en plus.

— Ah non ! Moi vous savez, je ne fais pas la différence. Et puis c'est un plaisir au contraire de pouvoir parler à un inconnu… Comme vous. Un jeune comme moi. Qui plus est étranger, j'aimerais tant visiter votre pays.

Vous êtes marocain, c'est ça ?

Il acquiesça une fois de plus. Décidément ce petit français le surprenait.

Et quelle audace.

— Oui, c'est votre accent et ce je-ne-sais-quoi dans vos yeux, cette fièvre.

J'avais un ami de la même origine : les mêmes yeux que les vôtres.

Ténébreux, oui, c'est ça, ténébreux.

Le garçon se tut un instant :

— Ça ne vous gêne pas que je dise ça.

— Non, non.

Il voulait tant lui dire : « au contraire ! »

Mais préféra croiser les jambes. Assis sur le fauteuil, il leva les yeux, presque suppliant. L'autre sourit face à lui :

— Allez, je vais faire du thé. Je peux même sortir la théière de ma grandmère, si vous voulez ! Une théière en argent, à la forme orientale mais je n'ai ni menthe ni pignon !

— Sans menthe, ça ira.

Mohamed sentit la chaleur de son bras irradier, lorsque Julien versa le thé

dans son verre. Son désir était maintenant si proche, oui et il se sentait en même temps si léger comme s'il oubliait soudain la force des interdits, cette prégnance qui souvent le bloquait à l'intérieur de ses retranchements. Il se délectait de ces gestes, cette peau presque mate, imberbe sur ses bras, traversés de veines épaisses, et la douceur de ses yeux verts, tournant au brun, et ce sourire chaleureux et moqueur. Ô comme il était éprouvé ! Ô

comme il ne pouvait se refréner, comme si ce thé contenait quelque aphrodisiaque. Il se rappela un instant l'origine de cet aveuglement. Il se souvint de ce rêve éveillé, de ce garçon lorsqu'il était encore élève, quel âge avait-il déjà ? C'était au jardin d'enfants, c'est ça : si jeune. Comment ça pouvait-il surgir ainsi de sa mémoire ? Une subreptice étincelle, et il se voyait courir en farandole, il contemplait son dos d'enfant et déjà sa force, et ce si doux visage semblant plus âgé, il se voyait se rapprocher de son camarade comme voulant puiser l'amitié, la plus absolue, déjà à son âge, que du sérieux, le sérieux de l’amour !

Et ce Julien lui ressemblait tant !

Son portable vibra.

Julien fit silence puis :

— Vous pouvez répondre, ça ne me gêne pas.

— Non, non, c'est simplement un message… Ils m'attendent au cinquième. Je dois vous laisser, ce sont mes cousins.

— Ils peuvent bien attendre que vous finissiez votre thé, vos cousins

Il contempla un instant la tasse à demi pleine, sourit tristement.

— Oui, oui certainement.

Il n'était pas sûr. Il but le liquide d'un trait.

— Vous repasserez alors ? On n'a même pas eu le temps de se connaître.

Mohamed acquiesça une fois de plus et ferma lourdement la porte.

Il prit l'ascenseur, ferma un instant les yeux. Où était cette puissance infinie, oui celle qui permettait d'accomplir des miracles, celle qui lui permettait de n'être qu'un avec Dieu dans la prière ? Ô Allah ! Pouvait-il tant souffrir, pouvait-il être tant mal-aimé de Dieu, pourquoi ce si lourd fardeau sur ses épaules ? Pourquoi pas simplement le vol, ou la malhonnêteté ?

Pourquoi de ce péché particulièrement devait-il souffrir ?

Et lorsqu'ils lui disaient, un éclair de convoitise dans l'oeil sous les jupes de telle ou telle demoiselle : t'inquiète tout ça, ça sera à toi ! 72 vierges. Il n'en avait cure ! Lui, il préférait juste que son sacrifice le purifie.

Alors après tout, il pourrait revenir visiter Julien, et commettre le péché

car tout serait effacé ! Oui explosé ! Il s'esclaffa.

L'appartement était sombre. Ils l'attendaient dans la chambre du cheikh. Il pouvait entendre le Tannhäuser du corridor ! Une réunion. Le cheikh aimait

à jouer son mélomane pour, disait-il, tromper l'ennemi, et couvrir les disputes sur les ordres et la stratégie : parfois, il choisissait le dernier mouvement de la 9e symphonie de Beethoven, parfois avec ce sourire espiègle, les Kindertöten lieder : « le compositeur est un juif converti au catholicisme, deux fois notre ennemi donc, ils peuvent deux fois moins soupçonner notre haine, ces ignorants ! »

Le cheikh ne portait pas la barbe, et parlait un français sans aucune inflexion étrangère. Rarement, il utilisait des termes arabes et préférait toujours une longue métaphore ou comparaison, car on ne sait jamais qui pouvait écouter.

Wagner sonnait bien la réunion surprise. C'est sûr, il était attendu. Que lui reprochait-on encore ? Pourtant il pensait avoir conforté leur confiance.

— Oui ! S’était-il exclamé, en jurant sur le Coran, et dans le même temps, en priant qu’Allah lui accorda son Pardon, je le ferai, oui juste en face du stade de France.

De toute façon, il n'avait jamais aimé le foot.

— Nous t'attendions, Mohamed. Nous avons reçu un message du

Royaume.

Le cheikh assis en tailleur sur la moquette, chuchotait ainsi d'une voix profonde. Abdel et Karim l'entouraient avec déférence.

— Il nous demande de précipiter notre voyage. Oui de choisir un jour plus proche, en fonction des fêtes occidentales. Il nous demande bien sûr de choisir l'embarquement le plus sûr, qui atteindra le plus sûrement, et le plus durablement.

Il fit une pause, regardant tour à tour, Abdel et Karim.

— Vous connaissez déjà votre grand rôle. Je serai votre lampadophore.

Toi, Mohamed, c'est bien différent, car il te faudra agir seul, mais tu partiras avec tellement d'âmes, oui, dit-il, avec un sourire s'élargissant sur des canines blanches et pointues, je suis presque jaloux ! Pour cela, il te faudra agir de l'intérieur. Nous avons déjà pu soudoyer les deux agents de sécurité qui seront positionnés à la porte ouest. Ils te laisseront passer sans encombre et n'effectueront qu'une fouille légère, sans insistance. Tu vois que

ça sert nos accointances en banlieue.

Oui Mohamed voyait surtout, que, dans l’hypothèse, il lui restait moins longtemps à vivre. Il se sentit faible soudain, oui si faible devant la grande puissance du destin car pouvait-il maintenant faire mine de refuser ? Non, pour sûr, ils le tortureraient, le tueraient, et l'enterreraient à la verticale sans même effectuer quelque bain ou lavement. Oui il subirait le pire sort et sa mort le plongerait directement aux enfers. Après tout, n'était ce pas un simple mythe que cette verticalité, la tête la première dans le trou, comme si, l'enfer se trouvait sous terre, comme un relent de la mythologie grecque. Ils l'enterreraient comme le pire des lâches, le sodomite qu'il était. C'était sûr, le cheikh le soupçonnait, il s'était étonné qu’il ne fût pas marié, ou qu’il n’ait pas d'envie filiale, de prolongation, contrairement à ses coreligionnaires.

« C'est que je n'ai pas encore trouvé la perle rare. » Et il s'esclaffait. « Ou plutôt, que je préfère ne pas partager mes aventures, ça serait comme te prendre à témoin et cela engagerait ta responsabilité le jour du jugement. »

Oui, maintenant, ça semblait là, tout près, cette mort insidieuse, et il pouvait comme un songe sentir la dislocation, les chairs éparses comme des mousses gluantes lécher le goudron et les estrades, les morceaux de coeurs brûler comme du soufre incandescent. Renaîtrait-il vraiment purifié, sans plus aucune aspérité, sans plus aucune faille, pur, entier ? Accéderait-il vraiment au paradis ?

— Allah Akbar !

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