Ajouter un extrait
Liste des extraits
Noah
Un sanglot me noue la gorge, mes yeux me brûlent. J’enfonce mon poing dans ma bouche et le mords pour éviter de me laisser submerger par ma douleur. Douleur et colère. Rage et désespoir. Une larme coule, malgré tout, sur ma joue. Je la chasse d’un geste vif avant qu’elle ne tombe sur mon paquet de copies, attrape mon stylo rouge et commence mes corrections. Je dois à tout prix me noyer dans ces essais, m’y perdre jusqu’à ne plus pouvoir garder les yeux ouverts… Jusqu’à m’endormir sur ces pages remplies à l’encre bleue. Et c’est ce que je fais, durant des heures et des heures, ne prêtant aucune attention aux grognements de mon estomac. La faim est le cadet de mes soucis. Je me nourrirai quand le seul membre de ma famille sera de retour. Du moins, c’est ce que je croyais jusqu’à ce que Todd pénètre dans la pièce, tout juste éclairée par ma lampe de bureau.
— Je me doutais que je te trouverais ici, s’annonce-t-il.
Mon bel informaticien ne s’attend pas à ce que je lui réponde, ni même à ce que je lève les yeux vers lui. Il a bien compris que je n’avais plus rien à lui apporter actuellement, notre relation a été mise entre parenthèses depuis que je me suis retrouvé sans famille. Cela dit, il continue à se montrer présent tous les jours, à me soutenir, à me couver de tout son amour. Au fond de moi, je suis conscient que je le blesse, mais comment faire autrement lorsque tout me paraît sans saveur ?
Afficher en entierJared
— Je te présente America Montgomery, sur le point de fêter ses vingt ans. Étudiante sans problème à l’université de Billings où son frère enseigne.
Je fronce les sourcils devant cette identité qui me rappelle des souvenirs que j’aurais préféré garder enfermés à triple tour dans les confins de ma mémoire. Toutefois, la petite fille que j’ai connue, il y a un bail, ne doit pas être la seule à porter ce patronyme sur le territoire.
— Hormis lui, elle n’a plus aucune famille proche. Sa mère est décédée peu de temps après sa naissance et son père est mort dans un accident de la route, il y a sept ans, poursuit Paola sans prêter attention à mon questionnement interne.
Ce second point me coupe la respiration. Celle avec qui j’ai cohabité durant une année, à la fin de mon adolescence, a perdu son père dans les mêmes conditions, sept ans plus tôt également. Quant à sa mère, elle n’avait que quelques mois lorsqu’une tumeur du cerveau la lui a enlevée.
Un violent tsunami se dresse devant moi, prêt à me terrasser. Faut que je cesse de m’attarder sur ces points un peu trop identiques, hors de question de permettre aux fantômes du passé de me rattraper.
Afficher en entier