Extraits

Notre Premier ministre a proclamé qu'il y aurait du sang et des larmes, mais qu'à la fin, nous serions vainqueurs.

Les plus belles amours sont les plus improbables. Cela ne me laisse pas beaucoup de chances.

- Recovery est une des pierres d'angle d'un édifice que nous construisons en vue de la victoire finale. Que savez-vous de la grippe espagnole ?

Alex fut surpris par la question.

- La grippe ?

- Vous avez certaines compétences sur le sujet, n'est-ce pas ?

- Quand mon père a écrit son livre, Lady Flu, j'étais étudiant et je l'ai aidé à réunir sa documentation. Cela m'a servi plus tard, pour ma thèse. Mais, comparé à lui, je suis un ignorant. Il travaillait sur le sujet depuis la pandémie de 1918.

- Votre père était incontestablement le plus grand spécialiste mondial du virus de la grippe. Malheureusement, il n'est plus là, dit sobrement Wake. C'est pourquoi nous faisons appel à vous. Continuez, Wilne.

- En 1917, les services de contre-espionnage américains et anglais furent avertis que les Allemands préparaient en grand secret une arme biologique. Ils crurent à un coup de bluff et personne ne donna suite à l'information. Moins d'un an après, la grippe espagnole ravageait le monde. Des dizaines de millions de victimes. Plus que la guerre elle-même. Mais l'époque était à la reconstruction et tout le monde finit par oublier cet événement. Nous avons retrouvé, dans les archives du MI-6, le document de nos agents qui mettait en garde contre l'éventualité d'une telle arme. Or, il y a quelques semaines, une rumeur identique nous est parvenue d'Allemagne.

Wilne fit une pause, lança un regard appuyé à Alex, et reprit :

- Actuellement, il est difficile de faire la part du vrai, car l'Abwehr vient de procéder à une grande campagne de désinformation. Votre mission consiste à prouver que la grippe espagnole était en fait une arme bactériologique fabriquée par les Allemands à la fin de la Première Guerre mondiale.

Wake ouvrit un dossier et lut :

- Alexandre Beaumont. Vous êtes né à New York en 1919, mais vous résidez en Angleterre depuis votre enfance. Vous possédez d'ailleurs les deux nationalités. Vous parlez quatre langues, dont le mandarin. C'est plutôt inhabituel comme choix, non ?

- C'est celui de mon père. Il s'intéressait beaucoup à la médecine traditionnelle chinoise. Il pouvait lire et écrire le mandarin. Moi, j'en suis resté aux rudiments.

- Vous êtes champion universitaire de rugby et avez de nombreux titres à votre actif. Vos études de médecine ont été correctes sans être brillantes. Pas d'erreur ?

- Non, c'est exact. Votre service est vraiment très bien renseigné, persifla Alex, dont la remarque ironique se perdit dans l'indifférence des participants.

- En revanche, vous vous révélez très vite un excellent chirurgien, continua Wake.

- J'ai toujours été un manuel, confirma Alex.

- Vos voisins et vos proches vous décrivent comme une personne facile à vivre, sachant prendre l'initiative. Ils vous considèrent comme le chef de bande. Plutôt engageant, je dois le reconnaître. Seul point noir, mais il est de taille : vous avez un problème avec l'autorité et avez tendance à la désobéissance et à la provocation. Autant dire qu'après notre enquête, tous n'étaient pas enthousiastes à l'idée de vous choisir.

De l'autre côté de la Manche, le joug du IIIème Reich. A Londres, le ciel qui crachait la mort. L'île semblait si préservée. Image d'un paradis trompeur. Dès le mois d'août 1940, les Allemands avaient commencé à bombarder Wight en raison de sa position stratégique dans leur plan d'invasion de l'Angleterre. La côte sud-est faisait partie de leurs cibles privilégiées, de par la présence d'un centre radar à St Boniface Down, sur les hauteurs de Ventnor, situé à cinq kilomètres de Shanklin. Huit pylônes gigantesques, dont deux avaient déjà été détruits par la Luftwaffe, se dressaient face à la mer comme un immense jeu de quilles. Les sirènes retentissaient plusieurs fois par semaine et aucun village, même le plus reculé, n'était à l'abri.

"Il la regarda enfin et sentit à son air interrogateur qu'il venait de faire un incompréhensible compte-rendu anatomo-pathologique"