Extraits

D’un geste, la directrice l’invite à s’exprimer. Dolorès sort un feuillet de sa poche. Il est en piteux état, comme si elle l’avait trituré pendant des heures. Après l’avoir déplié d’une main tremblante, elle s’éclaircit la voix, nous jette un regard anxieux, puis se lance :

— Pour satisfaire mon tourmenteur, je me dissous dans l’ombre de moi-même : les mots qui sortent de ma bouche ne m’appartiennent pas, mes mains accomplissent des gestes inconnus et mon cerveau m’impose des pensées qui me sont étrangères. Mais, même ainsi, c’est loin d’être suffisant ; alors je m’efface, je m’estompe, je gomme tout ce qui faisait ma personnalité, je deviens un fantôme. Un jour, mon corps évanescent s’évaporera, un souffle d’air m’emportera et je disparaîtrai. De moi, il ne restera que l’écho de mes sanglots. Et lui aussi finira par se taire.

Ces derniers temps, j’apprenais à lutter contre la peur, cela n’est pas suffisant, j’en prends conscience aujourd’hui. Maintenant, il faut que je combatte aussi la morosité et la tristesse, que je ne voie plus que le verre à moitié plein !