Extraits

Elle s’interrompit avant de dire « je t’aime », mais il lui sembla qu’il l’entendait quand même.

Il roula sur le dos et attira sa gorge vers ses lèvres. Terri sentit la caresse de sa langue fraîche puis, quelques instants plus tard, une pâle copie du même plaisir que la première fois. Il était faible et gravement brûlé. Peut-être ne pouvait-il pas lui communiquer autant de passion…

Mais cela n’avait aucune importance. Elle lui rendait la vie ; rien d’autre ne comptait.

- À l'époque où j'étais humain, les femmes obéissaient aux hommes, grommela-t-il.

- À l'époque où tu étais humain, les femmes vous manipulaient plus subtilement, c'est tout.

— Voilà comment les choses vont se passer : s’il s’empare de toi et que j’échoue à t’exorciser, je l’inviterai à me posséder. Dans ce cas, tu reprendras conscience en plein milieu des événements, parce que tu n’auras aucun souvenir de ce qui se sera passé pendant que tu étais sous son contrôle. Si tu as l’impression soudaine que quelque chose a changé, tu dois partir du principe que je suis possédé. Quoi que je dise, tu ne devras surtout pas me faire confiance. Je vais tracer un cercle protecteur que je ne pourrai pas franchir tant que le démon sera en moi.

Elle plongea son regard dans le sien et il sentit le parfum du désir naissant se mêler à celui de son sang. Elle voulait s’inviter dans son lit… Il lui restait si peu de temps qu’il estima ne pas courir grand risque à lui donner ce qu’elle voulait.

A vrai dire, il ne demandait pas mieux, ne serait-ce que pour se prouver qu’elle ne le rejetait pas. La douleur que cette crainte lui avait causée le stupéfiait…

En général, il se souciait peu de ce que les gens pensaient de lui. Sa propre opinion — qui n’était guère flatteuse — lui suffisait.

— Peut-être. Je ne sais pas si ceux qui prétendent avoir des pouvoirs psychiques voient la même chose que moi. Je sais seulement que ce que je vois est magnifique. J’entends chaque nuance du son de ta voix… et tu as la plus jolie voix que j’ai entendue depuis deux siècles. Quand je te regarde marcher, la grâce de tes mouvements me transporte… Je suis frappé par des choses que j’aurais à peine remarquées quand j’étais humain. Ton odeur, par exemple… Aucun humain ne peut comprendre à quel point elle est enivrante.

Comme toujours, il revint à la vie en sursaut. La douleur de la renaissance était si grande qu’il devait réprimer le cri qui lui venait instinctivement. Il avait presque oublié ce qu’un humain éprouvait en se réveillant. Sa résurrection s’opérait en un instant de pure souffrance. Il n’avait pas la moindre idée du temps qui avait pu s’écouler et reprenait le fil de son existence à l’endroit précis où il l’avait laissé.

Elle plaisantait pour essayer de détendre l’atmosphère… Il n’eut pas la force d’en faire autant. Que devait-il lui dire et comment allait-il faire pour la protéger ?

Il décida subitement de ne rien lui cacher. Elle devait avoir conscience du danger pour être sur ses gardes. Face à ce genre d’ennemi, l’ignorance risquait de lui être fatale.

Leur visiteur était un bel homme aux cheveux roux, un peu plus grand que Jude, qui semblait avoir dans les trente-cinq ans. Lui aussi était vêtu de noir, sans doute parce qu’ainsi vêtu, il pouvait plus facilement passer inaperçu.

Terri éprouva tout d’abord un vif soulagement. Cet homme ne l’attirait pas. Par conséquent, ce qu’elle éprouvait pour Jude n’était pas de la simple fascination. Bien sûr, le seul fait d’être attirée par un vampire aurait dû l’inquiéter…

Apparemment, Jude possédait plusieurs vestes en cuir noir. Il ressortit de son bureau vêtu d’une veste propre parfaitement identique à l’autre et rangea dans ses poches les objets qui se trouvaient toujours sur le bureau de Chloé.

— Je ne suis pas encore tout à fait guéri, déclara-t-il lorsqu’ils montèrent en voiture. Je ne suis pas sûr de pouvoir te protéger en toutes circonstances. Par conséquent, je veux que tu m’obéisses sans discuter si je te demande quelque chose. C’est promis ?

Il soupira et ferma les yeux pendant quelques instants. L’odeur de cette femme était aussi exquise qu’un parfum de luxe. Son lit allait sans doute en rester imprégné pendant des semaines même s’il changeait les draps tous les jours…

S’il n’avait pas été blessé, il se serait sûrement jeté sur elle et aurait accepté toutes ses propositions.