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SGANARELLE
Non, je ne puis sortir de mon étonnement ;
Cette déloyauté confond mon jugement ;
Et je ne pense pas que Satan en personne
Puisse être si méchant qu'une telle friponne.
J'aurois pour elle au feu mis la main que voilà :
Malheureux qui se fie à femme après cela !
La meilleure est toujours en malice féconde ;
C'est un sexe engendré pour damner tout le monde.
J'y renonce à jamais, à ce sexe trompeur,
Et je le donne tout au diable de bon coeur.
Afficher en entierValère
Ah ! j'enrage !
Ergaste
Et de quoi ?
Valère
De quoi ! C'est que j'enrage
De voir celle que j'aime au pouvoir d'un sauvage,
D'un dragon surveillant, dont la sévérité
Ne lui laisse jouir d'aucune liberté.
Afficher en entier"Toujours au plus grand nombre on doit s'accommoder,
Et jamais il ne faut se faire regarder.
L'un et l'autre excès choque, et tout homme bien sage
Doit faire des habits ainsi que du langage,
N'y rien trop affecter, et sans empressement
Suivre ce que l'usage y fait de changement.
Mon sentiment n'est pas qu'on prenne la méthode
De ceux qu'on voit toujours renchérir sur la mode,
Et qui dans ses excès, dont ils sont amoureux,
Seraient fâchés qu'un autre eût été plus loin qu'eux.
Mais je tiens qu'il est mal, sur quoi que l'on se fonde,
De fuir obstinément ce que suit tout le monde,
Et qu'il vaut mieux souffrir d'être au nombre des fous,
Que du sage parti se voir seul contre tous."
(Ariste, scène 1, Acte I)
Afficher en entierMon frère, son discours ne doit que faire rire.
Elle a quelque raison en ce qu'elle veut dire :
Leur sexe aime à jouir d'un peu de liberté ;
On le retient fort mal par tant d'austérité ;
Et les soins défiants, les verrous et les grilles
Ne font pas la vertu des femmes ni des filles.
C'est l'honneur qui les doit tenir dans le devoir,
Non la sévérité que nous leur faisons voir.
C'est une étrange chose, à vous parler sans feinte,
Qu'une femme qui n'est sage que par contrainte.
En vain sur tous ses pas nous prétendons régner :
Je trouve que le coeur est ce qu'il faut gagner ;
Et je ne tiendrois, moi, quelque soin qu'on se donne,
Mon honneur guère sûr aux mains d'une personne
A qui, dans les desirs qui pourroient l'assaillir,
Il ne manqueroit rien qu'un moyen de faillir.
Afficher en entierVALERE- « Je vous conjure donc d'assurer Isabelle
Que si depuis trois mois mon cœur brûle pour elle
Cette amour est sans tache, et n'a jamais pensé
A rien dont son honneur ait lieu d'être offensé.
SGANARELLE- Oui.
VALERE- Que, ne dépendant que du choix de mon âme,
Tous mes desseins étaient de l'obtenir pour femme,
Si les destins, en vous, qui captivez son cœur,
N'opposaient un obstacle à cette juste ardeur.
SGANARELLE- Fort bien.
VALERE- Que, quoi qu'on fasse, il ne lui faut pas croire
Que jamais ses appas sortent de ma mémoire ;
Que, quelque arrêt des Cieux qu'il me faille subir ;
Mon sort est de l'aimer jusqu'au dernier soupir [...] ».
Afficher en entierVALERE- « Partout où ce farouche a conduit cette belle,
Elle m'a toujours vu comme une ombre après elle,
Et mes regards aux siens ont tâché chaque jour
De pouvoir expliquer l'excès de mon amour.
Mes yeux ont fort parlé ; mais qui me peut apprendre
Si leur langage enfin a pu se faire entendre ?
ERGASTE- Ce langage, il est vrai, peut être obscur parfois,
S'il n'a pour truchement l'écriture ou la voix.
VALERE- Que faire pour sortir de cette peine extrême,
Et savoir si la belle a connu que je l'aime ?
Dis-m'en quelque moyen.
ERGASTE- C'est ce qu'il faut trouver
Entrons un peu chez vous, afin d'y mieux rêver."
Afficher en entierERGASTE- « Apprenez, pour avoir votre esprit raffermi, Qu'une femme qu'on garde est gagnée à demi,
Et que les noirs chagrins des maris ou des pères
Ont toujours du galant avancé les affaires. »
Afficher en entierARISTE- « Mon frère, son discours ne doit que faire rire.
Elle a quelque raison en ce qu'elle veut dire:
Leur sexe aime à jouir d'un peu de liberté.
On le retient fort mal par tant d'austérité ;
Et les soins défiants, les verrous et les grilles
Ne font pas la vertu des femmes ni des filles.
C'est l'honneur qui les doit tenir dans le devoir,
Non la sévérité que nous leur faisons voir.
C'est une étrange chose, à vous parler sans feinte, Qu'une femme qui n'est sage que par contrainte.
En vain sur tous ses pas nous prétendons régner:
Je trouve que le cœur est ce qu'il faut gagner ;
Et je ne tiendrais, moi, quelque soin qu'on se donne, Mon honneur guère sûr aux mains d'une personne
A qui, dans les désirs qui pourraient l'assaillir,
Il ne manquerait rien qu'un moyen de faillir. »
Afficher en entierLISETTE- « En effet, tous ces soins sont des choses infâmes.
Sommes-nous chez les Turcs pour renfermer les femmes ? Car on dit qu'on les tient esclaves en ce lieu;
Et que c'est pour cela qu'ils sont maudits de Dieu. Notre honneur est, Monsieur, bien sujet à faiblesse,
S'il faut qu'il ait besoin qu'on le garde sans cesse.
Pensez-vous après tout, que ces précautions
Servent de quelque obstacle à nos intentions,
Et quand nous nous mettons quelque chose à la tête,
Que l'homme le plus fin ne soit pas une bête ?
Toutes ces gardes-là sont visions de fous :
Le plus sûr est, ma foi, de se fier en nous.
Qui nous gêne se met en un péril extrême,
Et toujours notre honneur veut se garder lui-même.
C'est nous inspirer presque un désir de pêcher,
Que montrer tant de soins de nous en empêcher.
Et si par un mari je me voyais contrainte,
J'aurais forte grande pente à confirmer sa crainte. »
Afficher en entierSGANARELLE, à propos d'Isabelle-
« […] j'entends que la mienne
Vive à ma fantaisie et non pas à la sienne ;
Que d'une serge honnête elle ait son vêtement
Et ne porte le noir qu'aux bons jours seulement,
Qu'enfermée au logis, en personne bien sage,
Elle s'applique toute aux choses du ménage,
A recoudre mon linge aux heures de loisir,
Ou bien à tricoter quelque bas par plaisir ;
Qu'aux discours des muguets elle ferme l'oreille,
Et ne sorte jamais sans avoir qui la veille.
Enfin, la chair est faible, et j'entends tous les bruits. Je ne veux point porter de cornes, si je puis ;
Et comme à m'épouser sa fortune l'appelle,
Je prétends corps pour corps pouvoir répondre d'elle. »
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