Extraits

Marianne froissa nerveusement le tissu. À son âge, elle aurait dû être mariée depuis longtemps. Mais qui aurait voulu épouser une héritière sans fortune ? Aucun des hommes qu’elle avait rencontrés en tout cas. D’autant que s’ajoutait à la ruine la déplorable réputation de sa mère : celle-ci s’était enfuie avec un aventurier de passage alors que Marianne n’avait que 4 ans. Elle ne conservait qu’un très vague souvenir de la comtesse. À vrai dire, elle connaissait à peine mieux son père, toujours fourré dans quelque nouveau cercle de jeu, et beaucoup plus préoccupé par sa nouvelle martingale que par l’éducation de sa fille unique. Grâce aux sœurs du couvent Sainte-Blanche, elle avait néanmoins reçu les rudiments de connaissances dispensés aux filles de bonne famille, tout juste nécessaires pour faire bonne figure en société. Elle avait également appris l’envie, l’hypocrisie, la méchanceté et le mensonge avec ses compagnes de classe.

À 22 ans, son unique ambition était de trouver un homme suffisamment riche pour lui permettre de prendre sa revanche sur la société – et, si possible, suffisamment vieux pour avoir le bon goût de la laisser veuve de bonne heure. C’était sa seule chance de mener une existence indépendante, libérée du carcan de la contrainte sociale. Dommage que pour cela, elle n’ait d’autre choix que de passer par le mariage.