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Nous avons rencontré Marc G. au mois de juin 1971 à Lignières, une petite ville plantée à l’orée du Boischaut : là où surgissent dans la plaine, les premières haies de chênes et d’ormeaux qui signalent le monde clos du bocage berrichon. A vingt-cinq ans, Marc G. est très différent des autres jeunes du pays : de taille moyenne, un visage long, d’une beauté qui serait un peu féminine s’il n’y avait ce regard dur ; une poignée de main ferme ; employé dans une usine de Rosières, il consacre tous ses loisirs à lire et à parcourir la campagne à bicyclette. Les paysans sont vite devenus ses amis.
Afficher en entierMarc revient à pas lents vers la porte. Un entrelacs d’ombres figées cerne la maison : deux grands ormeaux qui dressent leurs moignons noirâtres au-dessus du toit de la bergerie, une charrette posée de guingois près d’un mur à demi écroulé, un monceau de tuiles couvertes de mousse, abandonné au milieu de la cour et la masse compacte de la forêt au-delà du chemin qui mène à la ferme voisine.
– Qui peut bien être à l’origine de tout ça ?
Afficher en entier– Ce cinglé a encore déposé une charogne. Le salaud ! Il m’a fait peur… C’est la première fois qu’il ose venir la nuit !
Vania tourne autour de la masse sombre en soufflant. C’est un gros monticule de terre fraîchement remuée. Pourtant, alentour le sol n’a pas été retourné.
Afficher en entierLes flammes qui dansaient, il y a quelques instants autour des bûches, se sont éteintes brusquement. Le bois à demi consumé crache de petits jets de fumée blanche qui montent dans la cheminée, tournoient devant la porte du vieux four à pain et finissent par déborder la hotte de toute part. Rapidement l’air devient irrespirable.
Marc essaie de faire un courant d’air ; ouvre une fenêtre, déverrouille la porte d’entrée. Aussitôt le chien se précipite dans ses jambes et tombe en arrêt sur le seuil, grondant, le poil hérissé.
Et soudain c’est la peur.
Afficher en entierLe vent cogne aux fenêtres. Une porte grince du côté de l’ancienne bergerie et par moments, la gifle d’une branche sur le toit.
11 heures sonnent. Marc sent glisser de ses genoux le livre qu’il ne lisait pas et se laisse bercer par les chuchotements de la nuit. Les yeux fermés, il offre encore cet air indécis de l’enfance. Les cheveux longs, très noirs, rejetés en arrière. Le visage fin. La bouche ronde. Il vient tout juste d’avoir vingt-cinq ans.
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