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« Notre âme moderne est faite en grande partie de civilisation moderne. Nos facultés d’amour, de haine, de générosité, d’égoïsme ont été transformées par le confort, les menaces scientifiques, les angoisses nouvelles, les espoirs d’âge d’or. Nous avons des joies, des désirs, des habitudes, des besoins que ne pouvaient pas imaginer nos grands-pères. Il existe de vastes régions où la civilisation moderne n’a pas pénétré. »
Afficher en entierLa haine est féroce, la colère sans frein, l'ambition démesurée. La jalousie et l'envie font des miracles. Les vertus sont sans commune mesure avec les vertus des êtres dits civilisés. La générosité épouvante ; la tendresse a la saveur d'un péché mortel; l'amitié défie les lois même naturelles [...].
Afficher en entierTout Accusé disposant d'un vocabulaire de deux mille mots serait sorti à peu près indemne de ce procès. Si, en plus, il avait été doué du don de parole et d'un peu d'art de récit, il serait acquitté. Malgré les aveux. (...)
Le clown a cependant un vocabulaire de cent à cent cinquante mots. L'Accusé n'a qu'un vocabulaire de trente à trente-cinq mots, pas plus. (J'ai fait le compte d'après toutes les phrases qu'il a prononcées au cours des audiences.) Le Président, l'Avocat Général, le procureur, etc., ont, pour s'exprimer, des milliers de mots.
Afficher en entierPeut-être mufle, goujat et cruel, mais incontestablement courageux, fier et entier. Une hypocrisie très fine, Renaissance italienne. La cour, les hommes habillés de rouge, les gendarmes et les soldats ne l'impressionnent guère ou, s'ils l'impressionnent, il ne le montre pas. On a vu qu'il répond du tac au tac au Président, sans insolence, avec bon sens. Même à ses risques et périls, il tient tête, et malgré tout ce que disent les enquêtes psychologiques, il tient tête sans colère. Il est rusé mais il n'est pas habile. A maintes reprises il s'est montré laid. Je le crois capable de générosité à condition que cette générosité soit un spectacle. Malgré son vocabulaire très restreint (pendant tout le temps des débats il s'est servi de trente-cinq mots. Pas un de plus. Je les ai comptés), à un moment il commence par : "Moi, on m'a pris comme un mouton dans la bergerie" et il fait sur son état de berger solitaire six phrases parfaites.
Afficher en entierLes mots. Nous sommes dans un procès de mots. Pour accuser, ici, il n'y a que des mots ; l'interprétation de mots placés les uns à côté des autres dans un certain ordre. Pour défendre également... nous sommes dans un total malentendu de syntaxe
Afficher en entierAu moment où je classe ces notes prises pendant le déroulement du procès, c'est dimanche après-midi, le jury et la Cour sont en délibération dans la salle du conseil. Je suis bourrelé de scrupules et plein de doutes. Si je fais le compte, il y a autant de preuves formelles qui démontrent la culpabilité de l'Accusé que de preuves formelles qui démontrent son innocence. J'ai assisté au procès à une place qu'on m'a désignée et qui était de choix : juste derrière le Président. Je voyais très bien l'Accusé, à trois mètres de moi. J'ai vu, de face, et à la même distance, les témoins pendant qu'ils témoignaient. Je pouvais voir les visages de tous les jurés. J'ai regardé et écouté jusqu'à en être brisé de fatigue.
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